La réputation de la scène entrepreneuriale hongkongaise n'est plus à faire. Nous avons rencontré Carmen Salameh, une Française qui vient précisément de lancer un podcast sur ce thème intitulé "Hong Kong Business Owners" (HKBO). Rencontre avec une entrepreneuse dans l'âme.
Je suis arrivée il y a deux ans à Hong Kong
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots, nous en dire plus sur votre parcours ?
Je suis Carmen et je me présente comme une entrepreneuse. J'ai déjà fait beaucoup de choses en fait : de la vente dans la mode, du recrutement dans la Tech. Je suis diplômée d’un Master de marketing et donc je suis naturellement revenue à ce domaine. En effet, j’ai travaillé durant plusieurs années en « marketing digital » pour une entreprise internationale, la maison mère du boncoin à Paris. Il y avait un côté un peu startup intégrée dans une grosse structure, ce qui m’a beaucoup plu. J'ai pu toucher à plein d'aspects du métier et découvrir notamment les réseaux sociaux, les newsletters, les blogs.
Quand je suis arrivée à Hong-Kong, il y a deux ans, je me suis demandé ce que je voulais faire et ce que je savais faire aussi : les deux questions les plus importantes. En fait, j’avais envie de tester le statut d’indépendante et avoir ma propre structure !
Donner la parole aux entrepreneurs de Hong Kong
Vous vous faites connaitre à Hong Kong depuis quelques mois, notamment à travers le Podcast 'Hong Kong Business owners' que vous avez créé. Pourquoi ce choix de support et le parti pris de donner la parole exclusivement à des entrepreneurs ?
Le podcast est un média que j'utilise depuis des années car je trouve qu'il permet de créer une relation plus profonde et aboutie avec les personnes qu'on interviewe et les auditeurs que d'autres canaux. J'ai commencé à faire ce podcast parce car j'étais moi-même une nouvelle entrepreneuse. J'avais envie de rencontrer d'autres entrepreneurs basés à Hong Kong pour sortir de l'isolement.
J'étais aussi curieuse de connaître leur parcours. Savoir comment ils arrivent à mener leur business et leur vie personnelle par exemple et comment ils parviennent à être rentables. Des choses qu'on apprend soi-même sur le tas, et aussi bien en parlant avec des gens qui font la même chose depuis plus ou moins longtemps. Je trouvais plus simple de commencer en « local » pour avoir plus d'impact. Et je voulais échanger autant avec des expats que des locaux, pour avoir une vue d'ensemble de cette ville très diversifiée en termes de profils qu’est Hong Kong.
Podcaster, c'est un peu du journalisme
Média populaire et dorénavant largement diffusé, notamment grâce aux réseaux sociaux et aux plateformes de streaming, comment est conçu le modèle économique du podcast ?
Le podcast est un média relativement neuf, dont le modèle est encore en construction. Souvent, on me pose la question : « Est-ce que tu vis de ton podcast ? ». En fait, dans un premier temps, le podcast est une bonne carte de visite ! Les gens se rappellent : « Ah c'est la fille qui a un podcast ! ». C'est un atout énorme dans une grande ville comme Hong Kong.
Pourriez-vous nous donner quelques informations sur la création d'un épisode de podcast, les coulisses de A à Z, si vous en êtes d'accord ?
Un épisode ça se prépare ! Maintenant, j'ai un process plus défini. J'ai acquis des compétences de journaliste. J'ai envie que ça sonne très « informel » : une discussion agréable et détendue. Or, pour avoir cet effet-là, c'est beaucoup de travail ! Je rencontre mes invités avant pour « briser la glace », pour qu'ils me parlent d’eux. Quand on se revoit le jour d'enregistrement, il y a des anecdotes qui arrivent, ils sont plus à l'aise et ils parlent davantage. Cette étape est absolument cruciale, tout comme, évidemment, la préparation des questions. Sans que ce soit trop « scripté ». En fait, mon travail est de fluidifier l’ensemble, pour qu’il y ait de la place aussi pour la spontanéité.
Et après, sur l'aspect technique, tout s’apprend ! J'ai acheté mes micros, je travaille toujours sur Garage band. Mais, je fais dorénavant éditer les épisodes. J'ai aussi enregistré mon intro et mon outro, pour que ce soit « pro ». Après, évidemment, vient la phase de communication qui suit chaque épisode. Dorénavant, je demande aux invités de s’engager à mettre en ligne un post sur tel ou tel réseau social, afin de maximiser la visibilité de l'épisode.
Il est essentiel de cibler son audience
Quelles sont les recettes d'un podcast réussi ? Quels sont leurs spécificités ?
Avoir un concept clair et l'audience véritablement en tête : cela ne suffit pas d’avoir envie de faire un podcast. Pourquoi monte-t-on un podcast, pourquoi créer un film, pourquoi rédiger un article ? Pour les gens à qui on a envie parler. J’y pense toujours quand je suis en train d'enregistrer. Par ailleurs, il faut être assez rigoureux sur la fréquence et la durée des épisodes. Pour ma part, je pense que 30 à 45 minutes est le bon format. Il est essentiel d’avoir un plan clair dès le début, quitte à être flexible par la suite. Cela permet d’être « pro » pour les personnes qui nous écoutent.
L'audience et les interviews sont-elles spécifiques ici à Hong Kong ?
Comme beaucoup d'entrepreneurs j’ai voulu commencer en « local ». Ce qui est plus simple et permet d’avoir plus d'impact. Hong Kong n’est pas si grand, et l’information circule vite ici ! Les gens se sentent concernés. Pour autant, l'entrepreneuriat, ça ne se limite pas à Hong Kong. Où que l’on soit dans le monde on parle anglais.
C'est volontaire d'ailleurs, je voulais vraiment inclure le plus de monde possible avec ce format anglophone : novice ou entrepreneur expérimenté ou encore salarié qui se pose la question de l’entreprenariat. Le podcast est donc enregistré et disponible en anglais uniquement.
Intégrer la vidéo à ma chaine
Quels sont vos projets pour les mois à venir avec le Podcast et, au-delà, en tant qu'entrepreneuse ?
La nouveauté de ces prochaines semaines : on va intégrer de la vidéo et on va prochainement changer le nom du podcast. L'ambition étant de faire rayonner davantage les business et les entrepreneurs d’Asie. Aujourd’hui, il y a beaucoup de podcasts en provenance des États-Unis. Mais, je pense que l'Asie a aussi beaucoup de choses à dire et qu'on ne l'entend pas assez !
Le podcasting en Asie est encore au début. C'est le bon moment de se lancer. On va garder le même format, au-delà de la vidéo, avec des interviews d'entrepreneurs. Il y aura un autre type d'épisodes avec des CEO, des opinion leaders. L’objectif sera de partager une vision plus stratégique des affaires, et ce, à plus grande échelle, sans pour autant s’éloigner des entrepreneurs. Au contraire, il s’agira de leur faire bénéficier de ces visions stratégiques du business et de l'économie en Asie et à Hong Kong. Je pense que ça va compléter ce qui est déjà disponible.
Toujours faire grandir le podcast : c’est un travail de longue haleine ! Et l’autre objectif est de le monétiser davantage, à travers des partenariats, ou en s'associant avec des entreprises qui vont sponsoriser des épisodes, par exemple ? Je suis aussi en train de travailler en ce moment pour monter des enregistrements de podcast dans le cadre d’évènements publics. En somme, l’objectif est d’inclure de la rentabilité sur le moyen et le long terme. Il y a des voies à inventer. C’est ça aussi que j'aime bien !
L'entreprenariat, c'est avant tout oser
Quels conseils pourriez-vous donner à nos lecteurs qui s'intéressent au monde des médias et à l'entreprenariat ?
Être curieux avant tout ! Apprendre en permanence, écouter, découvrir, rencontrer des gens le plus possible. Ce podcast existe aussi grâce aux autres ! Oser aussi, ça peut paraître intimidant de s'enregistrer en train de parler, surtout dans une langue qui n'est pas à sa langue natale. Il faut se jeter à l'eau et tester des choses et quand on ose, ça ne ramène que du bon et quand en plus on le fait bien ! Les retours ne peuvent être que positifs.
Une anecdote personnelle à propos de Hong Kong ?
A Hong Kong, tout peut se passer ! À la suite d’une rencontre qui s’est produite grâce au podcast, je me suis retrouvée à peindre le rooftop d'une artiste. J'y ai peint des dessins que je fais depuis longtemps et que je n'avais jamais montré à personne. Pour fêter ça, on va même faire une soirée d'inauguration !