Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

DISTRIBUTION - Le super marché des hypermarchés ?

Écrit par Lepetitjournal.com Varsovie
Publié le 4 avril 2012, mis à jour le 5 janvier 2018

 

Les grands surfaces se multiplient en Pologne. Mais les petits commerces ferment plus vite encore. Depuis 2010, 50.000 boutiques ont mis la clé sous la porte. LePetitJournal.com revient sur ce marché polonais de la grande distribution en question...

Inconnues dans la Pologne communiste, les grandes surfaces ont depuis 15 ans conquis le pays. Les premières à s'imposer sont les enseignes françaises avec l'ouverture, en 1996, du premier hypermarché Auchan, suivi de peu par Casino Géant, E. Leclerc et Carrefour (en Pologne, comme en France, un hypermarché est un commerce de détail, en libre service, d'une surface supérieure à 2.500m2, mais aujourd'hui les plus grands dépassent 20.000m2, soit 3 terrains de foot).

En 2000, la Pologne ne comptait que 100 hypermarchés, ils sont plus de 400 aujourd'hui et seront près de 500 en 2014. La banlieue de Varsovie et la Silésie en sont particulièrement pourvues. Les grandes enseignes qui se partagent le marché polonais sont actuellement l'allemand Real (22%), les français Carrefour et Auchan (21% chacun) et l'anglais Tesco (20%).

Pourtant comparé aux autres pays européens, ce secteur reste encore peu saturé. Pour un million d'habitants, on compte en Pologne 11 hypermarchés, contre 25 en France et en République Tchèque, et 31 en Finlande !

Tout sous le même toit ?
Les acquisitions et les investissements continuent donc. Développement d'une offre internet (seulement 5% des acheteurs en ligne font leurs courses alimentaires de cette façon), nouvelles marques, nouvelles surfaces de vente... mais pas forcément plus grandes...

Battus par les hard-discounts sur les prix et par les supermarchés pour la commodité, les hypermarchés sont en effet un peu victime du trop : trop loin, trop de choix, trop grand pour les seniors et les gens pressés...

Les Polonais leurs préfèrent encore les supermarchés (un commerce entre 400 et 2.500m2) et les hard-discounts (leurs petits frères spécialisés dans l'alimentaire low-cost). Le pays en compte respectivement 100 et 70 pour 1 million de Polonais. Autant qu'en France !

Les hard-discounts comme Netto, Lidl ou encore Biedronka continuent d'ailleurs leur forte progression. Plébiscités par les revenus modestes, ils représentent déjà 15% du marché ! Deux fois plus qu'il y a 5 ans.

Au total, hypermarchés, supermarchés et magasins discount contrôlent désormais 40% du secteur (contre 30% il y a cinq ans). Et avec les 38 millions de Polonais, ce marché du détail est justement important : 250 milliards de zlotys en 2011, 9 milliards de plus qu'en 2010.

David contre Goliath
Les grandes et moyennes surfaces se sont rapidement imposées en Pologne. Leurs atouts ? Des prix bas, un offre variée, des promotions, la possibilité de faire les courses pour la semaine et ? last but not least ? la possibilité de payer par carte bleue (chose encore rare chez les petits commerçants). De nombreux Polonais aiment aussi flâner en famille dans les hypermarchés et les galeries marchandes. Les femmes y passent 3h en moyenne !

Avec leur force de vente défiant toute concurrence et à coup de publicités, promotions, et programmes de fidélité (appelés "loyauté" en Pologne), ces magasins distancent facilement les petits concurrents.

Ajoutons à cela des avantages et exonérations fiscales importantes accordées aux investisseurs étrangers (création de zones économiques spéciales, exonération pour 10 ans de l'impôt sur le revenu et des taxes foncières...) ou encore l'absence d'une politique protectionniste envers les petits commerçants, et le tableau du désastre annoncé sera complet.

Des victimes collatérales
La grande distribution est souvent accusée d'exploiter les producteurs et surtout de faire péricliter le tissu commercial local. Non sans raison... Aujourd'hui moins de 43% des Polonais font leurs courses quotidiennes dans leurs magasins de quartier.

En 2010, la Pologne comptait plus de 324.000 petits commerces. Au rythme actuel d'environ 10% de fermetures par an, ils ne seraient plus que 30.000 en 2025. Les plus touchés sont les poissonniers (-15% en 2011). Suivis par les librairies-papeteries et les petits primeurs (11% en 2 ans).

La faillite de ces petits commerçants a malheureusement des répercussions sociales, que ne compensent pas les embauches (limitées, surtout chez les hard-discounts) et les profits (peu taxés) des grandes enseignes aux capitaux étrangers.

En effet, même les chaînes à consonance polonaise comme Biedronka ou Zabka appartiennent respectivement à des intérêts portugais et anglais. Lewiatan ou Piotr I Pawel sont les seuls à défendre les couleurs locales (sans pour autant faire le poids).

W jednosci sil
L'union fait la force. Confrontés à un phénomène mondial et faute d'une politique gouvernementale efficace, les petits commerçants cherchent à consolider leurs efforts dans les domaines tels que la publicité, la fidélisation ou la négociation des prix de gros. On note d'ailleurs ici et là les premières initiatives dans ce sens. A savoir des associations de vendeurs de détail et de grossistes, ou de producteurs et commerçants, réunissant parfois en leur sein plus d'une centaine d'entrepreneurs.

Par ailleurs, les grossistes comme Makro Cash and Carry mettent la main à la pâte et tentent d'aider les indépendants. D'une part en promouvant leur intégration, d'autre part à travers des actions de communication comme "J'habite ici, j'achète ici".

Dans un pays où le pouvoir d'achat est encore très limité, faire ses courses reste une activité sérieuse et les Polonais dépensent donc de façon très rationnelle. Le prix est bien sûr déterminant mais ils n'en oublient pas la qualité.

Même si les prix des fruits et légumes peuvent varier du simple ou double entre le primeur et l'hypermarché, de nombreux clients avouent que la qualité chez ces derniers laisse souvent à désirer. Pour couper la poire en deux, ils peuvent ainsi acheter pommes de terre, oignons et carottes dans leur grande surface et leurs fruits plus savoureux chez leurs petits commerçants. Tout espoir n'est pas perdu...

Anna Riondet (www.lepetitjournal.com/varsovie.html) mercredi 4 avril 2012


lepetitjournal.com varsovie
Publié le 4 avril 2012, mis à jour le 5 janvier 2018