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DE LA PLAC KONSTYTUCJI AU PALAIS DE LA CULTURE - Les empreintes du communisme

Écrit par Lepetitjournal.com Varsovie
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 7 décembre 2015

Sous ses airs de capitale moderne, Varsovie est inévitablement marquée par ses décennies de dictature communiste. La découverte de ces nombreux « cadeaux » staliniens nous projette dans une ère toute autre. Partons sur les traces du communisme à Varsovie, en compagnie de Varsovie Accueil.

Sans même avoir le temps de se remettre des souffrances infligées par les Nazis, Varsovie est de nouveau victime des ambitions totalitaires d'un autre, celles de Staline. Après avoir sagement patienté sur les berges de Praga qu'Hitler détruise 85% de la ville, les troupes du « petit père des peuples » débarquent et imposent le communisme.

Méfiants envers les Varsoviens pour leur forte implication dans l'Etat clandestin de la Seconde Guerre mondiale, les Soviétiques ne souhaitent pas reconstruire la capitale polonaise. Mais face aux citoyens venus rebâtir la ville, ils décident finalement de contrôler cette réédification et de faire de Varsovie le symbole de la puissance communiste. Les artistes se voient donc soumis à la doctrine officielle appliquée en URSS selon laquelle l'art doit participer à la transformation idéologique et à l'éducation des travailleurs dans l'esprit du « socialisme ». Cette idéologie se matérialise par l'architecture dite « réaliste socialiste », connue pour sa grandeur en signe de pouvoir et conçue selon des formes simples pour que le prolétariat puisse en lire facilement les symboles. Varsovie Accueil nous emmène explorer les emblèmes de cette période révolue qui marque encore l'architecture de la ville.

La Plac Konstytucji
La visite débute sur la Plac Konstytucji dont le nom fait référence à la Constitution du 22 juillet 1952, proclamant la République populaire de Pologne. A partir de là, le pays devient officiellement une « démocratie populaire » alignée sur l'URSS. La Pologne sera ainsi nommée jusqu'à la chute du bloc communiste en 1989.

Cette place se trouve au milieu des habitations bourgeoises du quartier Marszalkowska Dzielnica Mieszkaniowa (MDM), signifiant « quartier résidentiel de Marszalkowska ». Les bâtiments qui l'entourent sont édifiés par les autorités communistes afin de dissimuler les logements de cette classe aisée. Ils

répondent au style architectural particulier du socio-réalisme, caractérisé par d'immenses bâtiments, aux formes très carrées, usant de la symétrie et de matériaux comme le granit ou le marbre. Les avenues, et notamment la rue Marsza?kowska qui relie la place au Palais de la Culture et la Science, sont très larges pour accueillir les manifestations officielles telles que le rassemblement du 1er mai. Par ailleurs, des bas reliefs à l'effigie du mineur, de l'agriculteur, de la tisseuse ou encore du forgeron illustrent l'idéologie communiste, la dictature du prolétariat.

La Plac Konstytucji offre également un bon aperçu du rôle de la religion catholique à l'heure de la République populaire de Pologne. La plupart des Polonais étant de fervents croyants, le régime communiste ne pouvait pas détruire les églises et a opté pour une solution de dissimulation. Les autorités ont donc préféré cacher la perspective vers l'église de la place Zbawiciela en construisant aussi haut que possible.

 

L'école, outil essentiel de la propagande communiste
En passant devant l'école Politechnika, la guide en profite pour aborder la question de l'école sous l'ère communiste. En théorie, le régime promet une égalité face à l'accès à l'éducation. C'est dans cette optique que W?adys?aw Gomu?ka a lancé en 1966 le programme "Mille écoles pour le millénaire de la Pologne", permettant la construction de 1417 écoles à travers le pays.

Pourtant l'éducation est un véritable outil de diffusion de la propagande du régime, comme en témoigne notre guide. Elle se souvient de poèmes à la gloire de l'amitié russo-polonaise et nous explique que les examens d'entrée aux universités étaient soumis à un système particulier. Il s'agissait d'attribuer un certain nombre de points en fonction de l'origine sociale de l'élève : un enfant dont les parents sont agriculteurs obtenait plus de points que celui de famille bourgeoise. Ainsi, les autorités communistes exerçaient un véritable contrôle sur le peuple, en évitant sciemment d'instruire ceux qui pourraient se révolter.

La rue Emilii Plater
Cette période se caractérise aussi par la confiscation des biens, notamment ceux de l'aristocratie. Quelques maisons de la rue Emilii Plater en sont l'exemple. Nous pouvons voir des bâtiments datant d'avant-guerre qui ont été saisis par les autorités russes et utilisés comme logements
sociaux pour les personnes alcooliques. Aujourd'hui, récupérer une propriété est d'une grande complexité : très peu de documents ayant été conservés pendant la guerre, il est difficile de prouver la possession d'un édifice. C'est un problème récurrent que rencontrent beaucoup de Varsoviens. Sur notre route en direction du Palais de la Culture et de la Science, une façade est recouverte d'une publicité en russe : il s'agit de l'ancienne fonderie Adolf Witt, en marche à l'époque communiste.

 

La Gare centrale Warszawa Centralny
En débouchant sur l'avenue Jerozolimskie, nous apercevons la Gare centrale de Warszawa Centralny, une construction de la République populaire de Pologne. Conçu par l'architecte Arseniusz Romanowicz selon le style socio-réaliste, ce bâtiment a ouvert ses portes en 1975, après seulement 3 ans de travaux. Mais c'est la venue de Leonid Brejnev qui a précipité les choses. La gare devait absolument être prête pour montrer au premier secrétaire de l'URSS la puissance du pouvoir communiste. Résultat : l'édifice a été terminé à la va-vite et a dû faire l'objet de nombreux travaux jusqu'en 2010.

Le Palais de la Culture et de la Science (PKiN)


Du haut de ses 237 mètres, le Palais de la Culture et de la Science est certainement le plus grand symbole de la domination soviétique sur Varsovie. Et c'est d'ailleurs pourquoi il est le plus impopulaire de tous les bâtiments auprès des Varsoviens. Il a été construit de 1952 à 1955 selon les plans du célèbre architecte russe Lev Roudnev. Ce monument est très semblable à l'Université Lomonossov de Moscou, seuls les motifs utilisés sur les toits diffèrent : il s'agit ici d'éléments décoratifs typiquement polonais. Edifié à la gloire du communisme, ce palais portait le nom de Joseph Staline jusqu'à ce que ce dernier ne soit plus qu'un tyran aux yeux des Polonais. Au moment de la chute de l'URSS, les Varsoviens ne souhaitent pas garder au centre de leur ville ce lourd emblème de la dictature soviétique. Mais étant donné l'utilité des 3.288 pièces que le Palais abrite, ce dernier a échappé à la destruction. Aujourd'hui, on y trouve une salle d'exposition, des musées, écoles, cinémas, bureaux et une salle des congrès. Selon l'adage polonais, le meilleur panorama de la ville est celui depuis le 39ème étage du Palais de la Culture et de la Science? car il n'y que de là que le Palais n'est pas dans notre champ de vision !

C'est donc aux pieds du Palais de la Culture et de la Science que se termine notre visite. Dorénavant, vous ne verrez sûrement plus la capitale de la même manière. Car il sommeille toujours en Varsovie les temps rudes d'une période de totalitarisme, de propagande et d'expropriation.

Remerciements à Varsovie accueil & à notre guide ! 

© Plac Konstytucji : Creative Commons/Wikipédia  
© Publicité russe : capture Google maps 
© Autres : Jeanne Sirot

Jeanne Sirot (lepetitjournal.com/Varsovie) - Mardi 8 décembre 2015

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Publié le 7 décembre 2015, mis à jour le 7 décembre 2015
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