CHAMPIONNAT DU MONDE DE PÂTISSERIE - Un Français, chef pâtissier à Valence, représentera l´Espagne

Yann Bonneau. C´est son nom. Arrivé à Valence il y a cinq ans comme maître pâtissier des boulangeries-pâtisseries El Parisien, après être passé par des maisons françaises prestigieuses, il vient de remporter le championnat espagnol, le mettant à l´honneur pour représenter l´Espagne aux prochains championnats du monde. Car ce qui est pris en compte pour ce concours international, ce n´est pas la nationalité, mais le pays où le participant exerce sa profession. Il figure ainsi parmi les premiers sélectionnés. A partir de maintenant, c´est un véritable marathon qui commence avec plus d´un an de préparation intense, car Yann compte bien monter sur le podium à la prochaine Coupe du Monde de la Pâtisserie, référence de toute une profession.

(Photo DR)

Janvier 2013 : pour la septième fois, l'équipe de France a remporté la coupe du monde de pâtisserie, l'un des plus prestigieux concours du Salon international de la restauration, de l'hôtellerie et de l'alimentation, le SIRHA, organisé à Lyon, qui se déroule tous les deux ans. Le Japon et l'Italie, également grands favoris de la 13e édition de cette compétition mettant en lice vingt-deux nations, ont décroché respectivement la médaille d'argent et la médaille de bronze.
L'équipe lauréate d'une édition ne peut pas participer à l'édition suivante. Une aubaine d´après Yann : "Sur 8 participations, la France a gagné 7 fois. Comme elle ne peut pas se représenter cette année, nous avons toutes nos chances." Cette compétition internationale où se dévoilent les tendances et se découvrent les nouveaux talents  du monde entier, a été imaginée et est présidée par l'une des plus grandes figures de la pâtisserie française, Gabriel Paillasson, Meilleur Ouvrier de France Pâtissier et Glacier. C´est LE concours international référent de l'art de la pâtisserie. A l'issue des quatre sélections continentales (Europe, Afrique, Asie, Amérique du sud) sont désignés les pays participants.

"Tous les meilleurs sont passés par la France."
Avec son CAP Pâtissier, Chocolatier, Confiseur, Glacier, Yann Bonneau a fait ses classes chez les grands dès le début. "J´ai fait mon apprentissage chez un Relais Dessert, ce qui m´a permis de rentrer chez les plus grands." Yann a travaillé chez Lucien Peltier à Paris, chez Pierre Mauduit, puis comme Chef au château de la Messardière à Saint Tropez. Sa première place de Chef, il l´a obtenu à seulement 21 ans, et il a été choisi pour être Conseil pour la carte des desserts pour François Mitterrand en voyage officiel à Prague. "A partir de ce moment là, on m´a proposé New York ou Saint Tropez. J´ai choisi Saint Tropez pour raisons familiales. Aujourd´hui, je suis à Valence, depuis 5 ans. J´ai de la chance, car c´est la condition pour pouvoir se présenter aux championnats du monde : avoir travaillé 5 ans dans le pays. Les chocolats Valhrona qui sont organisateurs de la coupe du monde m´ont demandé si je voulais participer. Alors j´ai pensé à une parole de mon père : 'Mieux vaut se planter que regretter de ne pas l´avoir fait.' Je représenterai donc l´Espagne." La France est non seulement à l´origine de ce concours, et si elle est mondialement connue pour sa gastronomie, elle est également une référence en pâtisserie : "Tous les meilleurs sont passés par la France. Ce n´est pas un concours de spécialités régionales et il est courant qu´il y ait au moins un Français dans les équipes qui gagnent. C´est d´ailleurs le cas de Julien Alvarez de Bordeaux qui a remporté la coupe en 2011 avec l´Espagne. La France est un pays de concours culinaires avec des très hauts niveaux. Grâce à ses nombreux concours récurrents, les Français s´entrainent autrement pour la coupe du monde."

Le champion d´Espagne vise le podium et pourquoi pas la médaille d´or
"Chaque pays fait ses sélections au niveau national. Les dix meilleurs sont sélectionnés d´office. Nous avons passé un concours durant 4 heures, devant un jury composé de professionnels espagnols de la pâtisserie. Ensuite, il existe un championnat d´Europe, en janvier à Genève, pour ceux qui n´ont pas été sélectionnés d´office." Yann Bonneau fait donc parti des premiers sélectionnés pour la Coupe du Monde 2015, et fera parti de l´équipe espagnole : "Au total, il y a cinq personnes dans l´équipe : un pâtissier, un chocolatier, un glacier, un coach et un capitaine. Nous avons avec nous Paco Torreblanca, meilleur pâtissier espagnol qui a passé de nombreuses années en France, et Alain Chartier, célèbre chocolatier-glacier Meilleur Ouvrier de France et champion du monde 2003 des Desserts Glacés, qui vient nous entrainer." Deux ans de sélections sur les 5 continents, 50 sélections nationales, 22 pays participants lors de la finale qui aura lieu au Sirha du 25 au 26 janvier 2015. C´est comme obtenir une médaille d´or aux Jeux Olympiques. Le tout jugé sur pièce par un jury international. Yann Bonneau, Lluís Pérezu (spécialiste du chocolat) et Baltasar Massot (en charge de la pièce artistique de glace) seront les trois membres de l´équipe espagnole à faire face au jury : "Le jury est composé d´une cinquantaine de personnes du monde entier. Il y a tous les anciens champions du monde et les Meilleurs Ouvriers de France. Pendant toute la préparation aux mondiaux, je suis pris en charge pour mes formations. C´est un gros travail d´équipe et nous n´en sommes qu´aux prémices. Se présenter, c´est comme se préparer pour un marathon. On va monter en pression. Au début on s´entraine une fois par semaine, puis deux fois et tout va aller crescendo, jusqu´à s´entrainer quotidiennement le dernier mois dans les conditions réelles du concours." Les concurrents vont s´affronter durant neuf heures, rivalisant de créativité et de prouesses techniques. "J´ai l´habitude de travailler plusieurs heures non-stop. Il m´est arrivé de travailler 48 heures d´affilée, en tenant avec des barres de céréales, au moment des fêtes notamment." 9 heures de concours, face au public et à des centaines de journalistes, afin de réaliser des vraies œuvres d‘art. Une performance éblouissante, un spectacle riche de passions et d'émotions. Comme le stipule le règlement, chaque équipe qui défendra les couleurs de son pays sera composée de trois pâtissiers qui concourront chacun et individuellement à l'une des trois épreuves de cette Coupe du Monde 2015 : un entremet glacé, un dessert sur assiette, ainsi qu´une sculpture en sucre. Comme un véritable champion, Yann jauge les participants à la compétition : "Il y a de plus en plus de pâtissiers qui se présentent. Le Japon, l´Italie, la Belgique et les Etats Unis sont des concurrents sérieux. Mais cette année, l´Italie est l´adversaire le plus à craindre. Ils viennent de remporter le championnat du monde des chocolatiers. Les Japonais sont très bons mais en copiant les Français. Ils commencent à créer donc il faut se méfier. Et il y a beaucoup de Français au Japon, comme Pierre Hermé par exemple qui ont envie que le Japon gagne pour profiter de la médiatisation que la victoire déclenchera et ainsi renforcer leur présence dans ce pays."

Artiste autant que pâtissier
Toutes les notes comptent, mais les notes dégustation sont très importantes, comme les notes artistiques. Yann Bonneau met déjà en pratique ses préparations à la coupe du monde : "Nous innovons plus sur les desserts que je fais. Je monte le niveau en boutique. Je suis dans une fusée. C´est génial personnellement et professionnellement. Et à l´arrivée, c´est une reconnaissance mondiale."

Cécile  PANISSAL (www.lepetitjournal.com- Espagne) lundi 25 novembre 2013
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