L’annonce, le 8 mai, du retrait des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien, a créé une onde de choc chez les entreprises françaises implantées ou ayant des projets d’investissement dans le pays, comme PSA, Airbus et Total. A l’Elysée, on se veut rassurant : la France fera « tout » pour protéger ses entreprises.
Fidèle à sa promesse de campagne, Donald Trump a sonné le glas de l’emblématique accord sur le nucléaire iranien, signé par son prédécesseur en 2015. Sans attendre, le département du Trésor américain a annoncé que les Etats-Unis allaient rétablir une large palette de sanctions pour les entreprises ayant des liens commerciaux avec l’Iran, à l’issue de périodes transitoires de 90 à 180 jours.
Le conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, a fait savoir que le rétablissement des sanctions américaines était effectif « immédiatement » pour les nouveaux contrats et que les entreprises déjà engagées en Iran auraient quelques mois pour en « sortir ». Plusieurs entreprises avaient reçu après la signature de l’accord sur le programme nucléaire iranien en 2015 des licences spéciales ou l’accord du Trésor américain pour commercer avec l’Iran.
« Voulons-nous que les Etats-Unis soient le gendarme économique de la planète ? »
Le ministre français de l’économie, Bruno Le Maire, a estimé qu’il n’était « pas acceptable » que les Etats-Unis se placent en « gendarme économique de la planète », et a appelé l’Union Européenne a « ouvrir les yeux » et « en tirer toutes les conclusions ».
Voulons-nous, nous Européens, être des vassaux qui obéissent le doigt sur la couture du pantalon aux Etats-Unis et les laissent être les gendarmes économiques de la planète ?
— Bruno Le Maire (@BrunoLeMaire) 11 mai 2018
Il est temps que l'#UE défende ses intérêts économiques ! #Iran #E1Matin pic.twitter.com/K0UtTrpTba
« En deux ans, la France avait multiplié par trois son excédent commercial avec l’Iran », précise le ministre dans un entretien avec France Culture. Or, si les entreprises étrangères ne se retirent pas de l’Iran, elles pourraient être frappées par les mesures punitives leur barrant l’accès aux marchés nord américains, note Bruno Le Maire.
PSA et Airbus en difficultés, un projet de gaz naturel de Total compromis
PSA est déjà particulièrement bien implanté en Iran, où il a une part de marché de 30 %. Le constructeur automobile a vendu sur place 444.600 véhicules en 2017. « Nous suivons l’évolution de ce sujet, y compris la position officielle de l’Union européenne sur ce dossier, que nous espérons singulière, déclare un porte-parole du groupe ».
Le constructeur aéronautique Airbus a enregistré des commandes de compagnies aériennes iraniennes (Iran Air Tour, Zagros Airlines) pour 100 avions, valorisés à près de 10 milliards de dollars. Cette commande dépend toutefois des permis délivrés par les Etats-Unis en raison de la forte utilisation de pièces américaines dans la construction des avions de ligne.
Autre projet compromis, celui de Total, qui, associé au groupe chinois CNCP, prévoyait un investissement de plusieurs milliards de dollars dans le plus grand gisement de gaz naturel au monde, pour alimenter le marché domestique iranien dès 2021. Le pétrolier français, achète par ailleurs du pétrole iranien pour ses raffineries européennes, réalise des transactions en dollars et a investi des milliards de dollars aux États-Unis.
« Nous allons tout faire pour protéger nos entreprises »
Les entreprises allemandes devraient cesser leurs activités en Iran « immédiatement », a ainsi demandé, le jour de l’annonce, l’ambassadeur américain en Allemagne. De son côté, l’Elysée a affirmé que les Européens allaient « tout faire pour protéger les intérêts » de leurs entreprises en Iran « en intervenant auprès de l’administration américaine » au niveau de l’Union européenne.
La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni "regrettent" la décision américaine, a réagi Emmanuel Macron sur Twitter, évoquant sa volonté de travailler collectivement à un "cadre plus large" sur ce dossier.
Nous, Européens, avons décidé de rester dans le cadre de l'accord nucléaire de 2015.https://t.co/9oNe7lvcFI
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 9 mai 2018