Lorsque l'on circule à pied ou en voiture à São Paulo et particulièrement dans le Centro, il est difficile de manquer les murs recouverts de graffitis, qui ont progressivement remplacé la publicité depuis la loi ?Ville Propre? édictée en 2006. Comptant de nombreux artistes connus mondialement comme par exemple Os Gemeos ou Crânio, l'art de rue paulistano reste encore méconnu par ses habitants. Thiago Ritual, un jeune grafiteiro paulistano trentenaire, a décidé de le divulguer au public en organisant des visites guidées à travers "Streets of São Paulo?. Il raconte la genèse de ce projet au Petitjournal.com.
Lepetitjournal.com : Pouvez-vous vous présenter et nous raconter comment a commencé ?Streets of São Paulo? ? En quoi consiste-t-il ?
Thiago Ritual : Je suis un multi-artiste et graffeur présent sur la scène de São Paulo depuis environ 10 ans. Streets of São Paulo a commencé de façon spontanée, d'une nécessité que j'ai sentie qu'il y ait quelqu'un, de préférence un grafiteiro, qui organise une visite pour faire découvrir au grand public le graffiti paulistano. C'était aussi pour éviter qu'une personne non artiste ou n'y connaissant rien donne des informations erronées sur le street art, ce qui m'aurait beaucoup frustré. J'ai également passé un mois à Berlin, où j'ai connu les personnes s'occupant du Street Art Tour local et compris qu'il était possible de faire la même chose ici, à São Paulo.
Vous êtes maintenant quatre à l'organiser, comment vous êtes-vous rencontrés ?
Après avoir débuté seul, j'ai voulu créer une identité visuelle. A ce moment, l'un de mes amis, Pablo, directeur artistique chilien habitant à São Paulo, m'a aidé et participe à 100% aujourd'hui au projet. Simon, un français, m'aide également pour le marketing, la logistique et l'organisation des visites. Et enfin, il y a Rafael, qui s'occupe lui plus de la partie audiovisuelle.
Quand a débuté ce projet ?
C'est relativement récent, cette visite guidée a commencé il y a sept mois et la fréquentation a beaucoup augmenté au cours
A quelle fréquence est-il organisé ?
Nous avons pour objectif de le faire sept jours sur sept, mais pour le moment nous le faisons le plus fréquemment en groupe du mercredi au dimanche. Les lundis et mardis, le public change, il s'agit plus de visites individuelles. Le dimanche par exemple, nous avons souvent 15 à 20 personnes. La fréquentation varie aussi avec les touristes venant à São Paulo, notamment le lundi, où beaucoup d'endroits sont fermés.
Sur le plan artistique, qu'est-ce qui vous a amené à faire cette visite guidée ?
Durant mes dernières deux années comme artiste, j'ai une grande passion pour promouvoir l'art. J'ai toujours travaillé avec des enfants en situation à risque, dans des quartiers pauvres, en leur enseignant l'art à travers le recyclage. Pour moi, l'art est un moyen de réunir et d'informer les personnes. L'art possède un aspect esthétique, mais aussi politique et social très fort. Et comme je souhaite le divulguer de façon plus grand public, pas seulement dans une galerie d'art, il me semble que réaliser ce tour permet d'émouvoir les personnes, de les amener plus proche de São Paulo - pas seulement pour les touristes, mais aussi pour les Paulistanos qui ne connaissent pas la ville. Cela rapproche les artistes du public, et inversement ! C'est une motivation très forte pour moi de divulguer l'art de rue et faire en sorte qu'il soit fait pour tout le monde. Parlant anglais, cela facilite également la communication avec les personnes non lusophones.
Les réactions ont été variées. Les personnes qui vivent déjà de l'art ont tout de suite compris la façon dont je fais connaître leurs oeuvres. Celles qui ne sont pas encore reconnues, qui sont en phase de développement artistique, m'ont interpellé, en m'accusant de vendre le graffiti, de gagner de l'argent avec leur oeuvres. Elles n'ont pas beaucoup apprécié le concept. J'ai beaucoup été questionné au début, jusqu'à ce que je leur explique mon objectif de faire connaître l'art de rue et qu'il soit plus démocratique.
Qui sont les personnes qui participent au tour ? Comment réagissent-elles ?
Il y a des familles, des jeunes entre 20-30 ans, voire même plus de 60 ans ! Et elles ne sont pas toutes passionnées par l'art de rue ou du graffiti. Nous avons un public très varié, qui parfois n'a jamais vu le street art comme il le voit durant le tour, et arrive parfois avec beaucoup de préjugés. Certaines personnes n'apprécient pas forcément la visite, mais en ressortent avec une meilleure compréhension.
En quoi consiste votre travail personnel ?
Il y a deux phases dans mon travail aujourd'hui : mon travail de rue, quelque chose de plus ?traditionnel?, de façon illégale, que les personnes perçoivent parfois comme sale, plus politique, et un autre travail que j'intitule ?Orgânico Abstrato?. J'utilise des lignes des fleurs, des feuilles, qui se rejoignent de façon abstraite. Je viens de Varzea Paulista, où il y a beaucoup de nature. Adolescent, quand je venais dans le centre de São Paulo, le vert, la nature me manquaient beaucoup. Je pense que c'est pour cela que j'ai décidé de peindre la matière organique, pour faire référence à l'environnement présent, là où j'habite.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Nous avons l'intention de lancer bientôt la ?Street of São Paulo TV?. Il s'agirait d'une chaîne de télé en ligne, qui parlerait de culture urbaine, incluant donc le graffiti. Il y aurait par exemple des interviews de personnes influentes sur São Paulo et ailleurs dans le monde.
Propos recueillis par Lionel RIVIERE (www.lepetitjournal.com - Brésil) jeudi 5 mai 2016
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Infos pratiques Les visites guidées ont lieu sept jours sur sept, avec un maximum de 30 personnes les fins de semaine. Visites en français, portugais, anglais et espagnol. Facebook : https://www.facebook.com/streetsofsaopaulo/?fref=ts Site Web : http://www.streetsofsaopaulo.com/ Pour réserver une visite : streetsosp@gmail.com Ou par téléphone : (11) 987516 6607 |
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