Chaque événement sportif mondial est l'occasion pour l'ONG française de lancer une campagne dédiée au pays organisateur, principalement quand celui-ci est en délicatesse avec la liberté de la presse. C'est le cas du Brésil. Présentation.
"Certaines victoires ne méritent pas de médailles". Tel est le slogan de la nouvelle campagne de Reporters sans frontières (RSF) lancée cette semaine à l'occasion de l'ouverture des jeux Olympiques de Rio. L'affiche représente une main ensanglantée brandissant une médaille olympique. La victoire évoquée par le message est la deuxième place du Brésil dans le classement du nombre de journalistes tués en Amérique latine.
En effet, depuis les derniers jeux Olympiques de Londres en 2012, près de 23 journalistes sont morts au Brésil pour des raisons directement liées à leur profession et plus de 200 ont fait l'objet de violences. Le dernier assassinat en date a eu lieu il y a à peine quelques jours dans l'Etat du Goias.
C'est ainsi que cette année encore, le Brésil a perdu des places au classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF, passant de la 99e à la 104e place, le pays étant sur une tendance négative depuis plusieurs années, selon Emmanuel Colombié, responsable du bureau Amérique latine de l'ONG, basé à Rio.
"Mobiliser les journalistes brésiliens"
"Cette campagne a été réalisée en collaboration avec l'agence Cheeeeese afin de mobiliser les journalistes brésiliens et attirer l'attention sur ce vrai problème que représente les assassinats de journalistes au Brésil", explique Emmanuel Colombié au Petitjournal.com. "Les jeux Olympiques sont une vitrine pour le Brésil, nous ne voulons pas gâcher la fête, mais nous sommes là pour rappeler certaines réalités, c'est un pays structurellement violent et nous saisissons l'opportunité pour pousser nos propositions visant à offrir plus de protection pour les journalistes", ajoute-t-il.
RSF milite notamment pour la mise en place d'un système d'alerte efficace en cas de menace ainsi que d'un observatoire des violences contre les journalistes. "C'est le rôle des pouvoirs publics de prendre en charge leur protection, le dernier journaliste tué en juillet avait signalé les menaces à son égard et cela n'a rien changé", insiste Emmanuel Colombié.
Une campagne d'affichage massive
Afin d'être le plus visible possible, RSF a prévu des affichages dans la rue, la distribution de cartes postales et flyers dans certains lieux stratégiques, ainsi que des encarts publicitaires offerts gracieusement dans les revues du groupe Abril (Veja, etc.), la Folha de S.Paulo, CartaCapital, ainsi que sur Lepetitjournal.com Brésil.
Les dernières campagnes de RSF durant les jeux Olympiques avaient eu lieu pour Pékin en 2008 ("La Chine, médaille d'or des violations des droits de l'homme", avec des menottes représentant les cinq anneaux olympiques) et à Sotchi en 2014 (des patins à glace avec les anneaux olympiques ensanglantés). Pour le Brésil, l'ONG avait également fait campagne à l'occasion de la Coupe du monde 2014 ("Au Brésil, le foot se porte mal, mais pas autant que la liberté de la presse", avec le Christ Rédempteur se mettant la main sur le visage au centre du drapeau brésilien).
Corentin CHAUVEL (www.lepetitjournal.com - Brésil) jeudi 4 août 2016
- Lire notre entretien avec Emmanuel Colombié sur la liberté de la presse au Brésil