Édition internationale

PORTRAIT DE CARIOCA - Patricia Layolle, une archère paralympique d’exception

Écrit par Lepetitjournal Rio de Janeiro
Publié le 11 février 2024

Mardi prochain, à l'occasion des célébrations du 14 Juillet au futur Club France de Rio, la Franco-Brésilienne Patricia Layolle, quintuple championne paralympique de tir à l'arc pour le Brésil, effectuera une démonstration de sa discipline. Portrait d'une athlète d'exception.

C'est sur son champ de tir, entre l'arrière d'un bâtiment et le bord de l'eau, sur l'Ilha do Governador, à Rio, que nous rencontrons Patricia Layolle. Sa cible est à 70 mètres, sur un terrain herbeux pour ne pas casser les flèches à 35 euros l'unité. Cette athlète d'une cinquantaine d'années est une archère passionnée au palmarès conséquent.

Elle est française d'origine, mais brésilienne de c?ur, ici depuis 33 ans et officiellement candidate à la naturalisation en 2007 pour participer aux compétitions internationales sous les couleurs du Brésil. Si Patricia Layolle a commencé le tir à l'arc très tardivement, il y a quatorze ans, elle participe depuis à tous les compétitions possibles, voyageant aux quatre coins du pays pour parfaire son geste.

Un accident qui a failli tout changer
Mais en janvier 2008, c'est le drame. La veille d'une compétition internationale, elle a le bras explosé dans un accident. Une partie du nerf est sectionné, et les avis sont très pessimistes quand au retour de ses mouvements. "J'ai eu deux personnes formidables que je ne remercierai jamais assez : le chirurgien génial qui a renoué le nerf, et mon physiothérapeute qui ma donné de l'espoir alors qu'aucun médecin en avait. Six mois pour me remettre à bouger le petit doigt de mon bras bionique, puis un an de plus pour tout le bras, et en deux ans je revenais à la compétition", raconte-t-elle au Petitjournal.com.

Dès 2010, elle travaille avec Renato Emilio, son entraîneur, pour retourner au plus haut niveau, corriger toujours un peu plus le geste pour viser juste et ne pas trembler. Début 2011, elle obtient un score suffisant pour entrer dans l'équipe brésilienne et participe au Mondial de Turin où elle finit 9e, puis aux championnats panaméricains de Guadalajara (Mexique) où elle lutte pour le bronze et finit quatrième. Première au championnat national en 2012, elle obtient enfin une bourse pour les athlètes en 2014 grâce à une médaille de bronze sur un championnat international aux Pays-Bas avant de finir troisième aux championnats panaméricains d'Argentine en novembre dernier.

"Avec cela, j'achète juste mon matériel, paye une partie de mes voyages et du salaire de mon entraîneur", explique-t-elle. Au Brésil, à l'inverse de la France, les marques misent seulement sur les athlètes qui ont déjà gagnés, alors peut-être un jour il y aura des sponsors pour couvrir les frais, mais pour l'instant, c'est de sa poche.

90% de psychologie, 10% de technique
Patricia Layolle et Renato Emilio, tout sourire, sont bien complices même si l'entraîneur chevronné pousse sans cesse sa

sportive à la culpabilisation. "Alegria, Alegria", dit-il quand même, c'est le secret d'une bonne préparation. "90% de la performance d'un archer vient de sa psychologie, contre 10% de technique, et encore plus pour un paralympique traumatisé dans le haut du corps. Il faut de la complicité pour adapter le travail aux traumatismes de l'athlète et l'aider à repousser ses propres limites sans l'atteindre encore", ajoute-t-il.

Alors c'est parti pour trois heures de préparation technique, une heure de préparation psychologique où elle note toutes ses sensations, puis encore 45 minutes de musculation journalière et la physiothérapie deux fois par semaine. "A partir du moment où l'on dépasse son handicap, c'est la gêne des autres que l'on surmonte, personne n'aide un handicapé dans un village paralympique, la déficience n'entre simplement pas en ligne de compte", souligne Patricia Layolle.

"Les muscles tendus par l'enjeu et la pression" 
Pour nous montrer, elle se lève et elle tire toutes les flèches du carquois dans la cible, puis nous fait tester sans que nous n'arrivions à tendre la corde. "Le plus dur, c'est prendre en compte la force du vent, car mon arc est très peu puissant et il faut parfois viser la limite de la cible pour arriver en plein c?ur", indique-t-elle. En compétition, l'athlète franco-brésilienne doit tirer 72 flèches pour se qualifier, puis les combats éliminatoires commencent : "C'est émotionnellement très fort car les muscles sont tendus par l'enjeu et la pression."

Les Jeux Paralympiques de Rio sont en vue, et c'est maintenant la sélection. Alors elle ferme un ?il, se concentre, et oublie les sollicitations. C'est sa joie intérieure qui en aura raison. Après tout ce travail, c'est plus que du bonheur, c'est une passion !

Xavier DAUSSIN (www.lepetitjournal.com - Brésil) jeudi 9 juillet 2015

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lepetitjournal.com Rio
Publié le 8 juillet 2015, mis à jour le 11 février 2024

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