Depuis le 15 août et jusqu'au 2 novembre, le Palais impérial de la Praça XV, à Rio, reçoit l'exposition "Operação Zuzu", qui revient sur le parcours de cette grande styliste brésilienne. C'est dans une ambiance d'après-guerre et très "girly" que se succèdent des pièces, photos et lettres de l'artiste. Lepetitjournal.com s'est rendu sur place et revient sur le parcours de cette femme dont le destin tragique se mêle à celui de la dictature brésilienne.
Il y a quelques semaines, une photo a resurgi, confirmant un peu plus que l'accident de voiture qui a coûté la vie à Zuzu Angel en 1976 avait été prémédité par la junte militaire. Après un passage par São Paulo, une exposition vient justement rendre hommage à Rio à cette grande styliste brésilienne, femme admirable qui a payé de sa vie son opposition à la dictature.
Zuleika de Souza Netto est une Mineira. Née le 5 octobre 1921 à Curvelo (Minas Gerais), la jeune femme confectionne, adolescente, ses premières robes destinées à ses cousines. Un peu plus tard, elle rencontre à Belo Horizonte Norman Angel Jones, un Américain avec qui elle se marie en 1943. Les jeunes époux partent s'installer à Salvador, ville dans laquelle ils donneront naissance à leur premier enfant : Stuart Edgar en 1945.
Renommée internationale
Un an après la naissance de leur fils, la famille part s'installer à Rio où ils auront deux filles : Ana Cristina et la plus jeune, Hildegard. Zuzu Angel se sépare de son mari en 1961. Habituée à coudre pour ses enfants et sa famille, la jeune femme avait commencé en 1957 à créer des vêtements pour d'autres personnes que ses proches. Petit à petit, la styliste se fait un nom dans la société carioca, puis brésilienne.
Talentueuse, avant-gardiste et anglophone sont autant de qualités qui lui permettent de se projeter socialement, mais aussi professionnellement. Styliste des actrices nationales et internationales, notamment nord-américaines, Zuzu Angel connaît un succès qui dépasse les frontières du pays. Invitée pour défendre ses collections aux Etats-Unis, elle va commencer à étendre ses productions pour les hommes et les enfants. Au final, c'est une vraie entreprise qui est mise en place avec plusieurs boutiques de Rio, ainsi que divers bureaux aux Etats-Unis. La Brésilienne légitime la mode de son pays aux yeux du monde entier et promeut la culture de son pays à travers des motifs colorés et fleuris.
Luttes successives contre la dictature
En 1964, le coup d'état militaire bouscule la dynamique de la famille. Stuart Angel, engagé dans les mouvements sociaux de
C'est alors une seconde lutte à laquelle se livre la styliste pour récupérer le corps du jeune homme. Face à cette tragédie personnelle, la Brésilienne n'a jamais délaissé sa passion. Au contraire, elle fait de son influence, de ses créations, des armes pour dénoncer la mort de son fils et la situation politico-sociale au Brésil. Ses critiques, son engagement, sa virulence à travers la mode pour dénoncer le pouvoir des militaires, lui valent la mort au matin du 14 avril 1976, à la sortie d'un tunnel de Rio qui porte désormais son nom. A l'époque on parle d'un triste accident de voiture, mais l'attentat contre l'artiste, alors âgée de 54 ans, a depuis été confirmé.
Zuzu Angel est de fait une vraie icône de la mode, une styliste talentueuse et avant-gardiste qui a su porter fièrement les couleurs de son pays : "Eu sou a moda brasileira" ("Je suis la mode brésilienne"). Mais elle est aussi et surtout cette figure du Brésil meurtri par la dictature militaire. Zuzu Angel, c'est à la fois les femmes du monde, les femmes coquettes et les mères détruites, les femmes fortes en quête de justice.
Margot GALLOT (www.lepetitjournal.com - Brésil) mardi 26 août 2014
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