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CHINE – Le marathon de la Grande Muraille, vu du haut des marches

Écrit par Lepetitjournal Pékin
Publié le 25 mai 2015, mis à jour le 25 mai 2015

Par Delphine Gourgues

En mai, chaque année, certains montent les marches en talons hauts au Festival de Cannes, et d'autres celles de la Grande Muraille de Chine, en courant? "The Great Wall Marathon" (le GWM pour les habitués) est un des marathons dits "d'exception" proposés en Chine. Pour encore plus d'authenticité, la rédaction lepetitjournal.com de Shanghai l'a testé pour vous le 16 mai dernier ! A vos marques, prêts?

 

5 164 marches?

Le Great Wall Marathon est organisé par Albatros Adventure, qui propose des courses dans des lieux mythiques : désert de Petra, Cercle Polaire, Bagan (Birmanie), le Big 5 en Afrique du Sud et la Grande Muraille de Chine. Des lieux dont la beauté est à couper le souffle, un comble

étant donné la nature de l'épreuve sportive? Créé en 1999, le Great Wall Marathon se déroule à Huangyaguan dans la province de Tianjin. Marathon (42 km), semi-marathon (21 km) et Fun Run de 8,5 km, ces trois courses comportent des montées et descentes non négligeables mais surtout, surtout?les marches de la fameuse muraille? 5 164 marches pour la version marathon ! Organisée chaque année au mois de mai, cette course attire de nombreux étrangers venus du monde entier et a une capacité de 2 500 participants maximum. Le tracé du parcours est assez simple : 9 km de côte raide et de marches pour commencer, puis 12 km dans les villages environnants pour le semi-marathon. Les marathoniens, les "vrais" sportifs, ont un tour plus long dans les villages avant de réattaquer la muraille entre le 35ème et le 42ème km, un enfer ! Quelques performances pour vous donner une idée : le meilleur temps hommes sur ce marathon fut cette année de 3:41:40 et de 4:18:35 pour les femmes (les records du monde étant respectivement 2:02:57 et 2:15:25).

L'avant-course : une préparation progressive et spécifique

Tout amoureux de la course s'entraine toute l'année bien sûr. Mais pour ce marathon de la Grande Muraille, un entrainement plus spécifique et ciblé s'impose. Plusieurs aspects sont à travailler : la distance, le dénivelé et les marches. J'avais pour ma part l'objectif de boucler le semi-marathon, bien suffisant pour une première fois? J'ai donc commencé il y a quelques mois à allonger progressivement la distance de mes sorties running. Bravant la météo hivernale, jonglant avec les jours trop pollués, j'ai arpenté les rues d'Hongqiao, choisissant les rues aux larges trottoirs et faible circulation, mais aussi les quartiers plus traditionnels, traversant un marché 

par-ci, croisant un coiffeur de rue par-là, longeant la Suzhou Creek pour y rejoindre les parcs, une jolie manière de découvrir la ville. Et les samedis, les entrainements avec les copains "pros", habitués des marathons, avec des exercices plus techniques, pour améliorer (entre autre) sa capacité respiratoire, m'ont aussi énormément fait progresser, merci les amis ! Concernant le dénivelé, pas évident à Shanghai, c'est assez plat? N'appréciant pas vraiment les tapis de courses en salle, j'avoue avoir un peu négligé cet aspect de mon entrainement, et je l'ai regretté lors de la course? Promis, la prochaine fois, je serai plus sérieuse ! Et les marches me direz-vous ? Mon meilleur allié fut? le métro ! En effet, j'ai ponctué mes sorties urbaines de séries de montées et descentes des escaliers de la station de mon quartier, alternant les marches une par une et deux par deux. Imaginez la tête des Chinois me regardant faire mes allers et retours ! Puis les jours précédant la course, repos conseillé (et là, pas de souci pour suivre cette recommandation !), on range les baskets dans la valise et on boit de l'eau.

Le jour J, une énergie décuplée !

Nous y voilà, enfin presque, car en raison de violents orages la veille, certains d'entre nous n'ont jamais pu prendre leur avion, ils nous ont bien manqué !  Samedi, 5h30 du matin, je me réveille avant l'heure, l'enjeu me tient en alerte ! L'ambiance (contrairement à la température extérieure) est déjà chaude à 6h30 près de la ligne de départ, échauffement en musique, coordonné par deux charmantes coachs (ces messieurs apprécient toujours !), photos de groupes, discours du maire, de l'organisateur et pan ! C'est le départ de la première vague (la "wave 1"), dans laquelle j'ai la chance de figurer (moins de cohue et moins de chaleur). Départ en trombe comme une bande de gamins filant en cour de recréation?

Seulement voilà, passées les premières minutes euphoriques, les choses sérieuses commencent, la montée vers la muraille? Inutile de vous dire que je me suis progressivement faite doubler par beaucoup de coureurs (vous comprenez là ma promesse du paragraphe précèdent), le moral en a pris un coup ! Mais peu à peu, me fixant de petits objectifs ("ne pas perdre de vue tel coureur", "elle, je peux la doubler"), je réussis à maintenir un rythme. Premières distributions de bouteilles d'eau, ah oui, bonne idée, j'ai déjà soif ! Au bout de quelques kilomètres bien raides, c'est la révélation, les marches sont là : on attaque gaiement les premières en courant, puis rapidement, on ralentit. Parfois il faut marcher, pas le choix, voire escalader en s'aidant des mains sur les parois ! Et puis soudain, les marches deviennent toutes petites, et même trop étroites pour la longueur d'un pied, il faut sans cesse changer de cadence, une par une, non deux par deux, on ne sait plus comment les prendre, puis cela descend, les marches se transforment en pierres, un coureur glisse et tombe devant moi, plus de peur que de mal. Nouveau ravitaillement en eau, premier poste de "First Aid", tout est dit? De nombreux photographes aussi, on sourit, on fait un petit geste, fier d'y être et encore avec une bonne réserve d'énergie. Quelques touristes aussi, mais que font-ils là ? Le panorama est magnifique, le ciel bleu pur, le soleil commence à taper, certains s'arrêtent pour prendre des photos, un petit selfie, une petite vidéo, moi je préfère regarder où je mets les pieds?

Le plus dur ? La fin de la course?

Bientôt, on entend une rumeur, de la musique, nous nous rapprochons du point de départ, les vagues suivantes se préparent, la fin des marches approche. Un petit tour du portique d'entrée et on prend le chemin des villages. Tout d'abord, une longue ligne droite de 3 km, avec des voitures, des bus, des deux roues car nous sommes en Chine, on n'arrête pas la circulation ! Beaucoup de spectateurs du coin aussi, surtout des policiers au début, plus occupés à nous prendre en photo qu'à dégager le passage? mais des encouragements bienveillants, on apprécie. De l'eau à nouveau, des bananes parfois, des éponges pour s'arroser car il commence à faire vraiment chaud, la logistique est parfaite ! Une route de chantier, des autocars de touristes, un chemin étroit à travers la broussaille, c'est un trail en fait ?! Nous croisons les premiers coureurs sur le retour du semi-marathon, déjà ? ! Du coup, j'accélère?

Et nous entrons dans les villages. De nombreux enfants veulent nous taper dans la main, nous donner de l'eau, encore du dénivelé, ça monte même raide par endroits, nous zigzaguons entre ruelles et arbustes et puis le point de demi-tour arrive, c'est bon signe mais ça n'est pas terminé ! J'avoue avoir vécu les 6 plus longs kilomètres de ma vie de coureuse, la chaleur est plus forte, les jambes sont lourdes, très lourdes, j'ai encore soif alors que je viens de boire, je lutte contre moi-même pour ne pas m'arrêter. Heureusement un coureur m'encourage et m'accompagne sur ces derniers kilomètres. Je sens que je le ralentis mais il reste à mes côtés, belle solidarité ! Plus que 3 km, la fameuse route en ligne droite au trafic encore plus dense qu'à l'aller. Nous croisons les coureurs de la vague 4, les pauvres, ils ne savent pas?, à notre tour de les encourager. Sur le dernier kilomètre, mon compagnon de route accepte de me laisser, je lui promets de ne pas m'arrêter et je le vois se retourner régulièrement pour vérifier ! Et puis la clameur s'intensifie, on entend le haut parleur, la musique, et c'est la ligne d'arrivée ! "Yes, I did it !" et plutôt bien en plus, vu ce qu'annonce le chrono ! Médaille, photos, ravitaillement, étirements, retrouvailles avec les amis, c'est déjà fini ! Un joyeux groupe d'élèves français participent à l'animation, ils viennent de Wuhan et ont couru les 8,5 km avec leurs professeurs, un beau voyage de classe !

Quelle aventure ! Cette course est magnifique, ce travail sur moi-même fut plein d'enseignements et je l'avoue, moi qui ne suis pas très adepte de la compétition, les quelques courbatures aux cuisses des jours suivants ne sont rien, comparées au plaisir que j'ai eu à me préparer et à faire cette course. Il ne reste plus qu'à décider quelle prochaine course faire, avant de retenter l'aventure sur la muraille l'an prochain, qui sait? ? A vos agendas, le Great Wall Marathon 2016 sera le 21 mai !

Pour plus d'informations : http://www.great-wall-marathon.com.cn/

Delphine Gourgues lepetitjournal.com/shanghai Mardi 26 mai 2015

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Publié le 25 mai 2015, mis à jour le 25 mai 2015

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