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DJANG SAN - Un chercheur d'or musical à Pékin

Écrit par Lepetitjournal Pékin
Publié le 21 mars 2013, mis à jour le 21 mars 2013

Procédé inhabituel dans le milieu musical, Jean-Sébastien Héry aka Djang San, vient de sortir quatre albums d'un coup. Un besoin viscéral pour ce prospecteur de sons nouveaux, de partager ses pépites musicales, aux notes ancrées dans ce pays chinois qu'il a fait sien.


L'artiste français, aussi connu sous le nom chinois de Zhang Si'an, parcourt physiquement et musicalement la Chine depuis plus de dix ans, écrivant sa première chanson en chinois en 2000, s'installant définitivement à Pékin en 2006. Artiste boulimique, Djang San a constamment besoin de se nourrir d'expériences musicales nouvelles. Résultat, comme tout bon chercheur, il fait des découvertes inédites, qu'il partage ensuite avec le public. Dernier exemple en date, la sortie de 4 albums simultanés le 9 mars, l'occasion de montrer les multiples facettes de sa personnalité. "Tous ces albums représentent une partie de ma vie ici, et j'avais besoin d'exprimer toutes ces choses en moi".

Folk, électro et instruments chinois
"One Man Live Orchestra Vol.4" est un album live enregistré à partir de trois concerts différents l'année dernière. "En concert, même si certains morceaux sont préparés, j'improvise beaucoup. Le rayon de possibilités va du folk chinois à l'électro pure, en passant par l'expérimentale, les délires de guitare, ou encore des morceaux utilisant des instruments chinois. Je produis aussi beaucoup de vidéos, que je projette pendant les concerts. Ça aide le public à rentrer dans mon univers." "Electronic Music for Chinese Restaurants" et "This is Nonsense" sont deux albums enregistrés entre 2011 et 2013, entre électro-lounge et musique folk. Exemple avec "Instant noodle", un mix entre électro et musique classique chinoise :




Le 4ème album, "Zhongruan", est une compilation de morceaux enregistrés avec le zhongruan, un instrument traditionnel chinois utilisé dans l'opéra local. C'est l'exemple le plus évident de ce que la vie en Chine a apporté à la musique de Djang San. "J'ai su m'approprier le zhongruan, en créant ma propre façon d'en jouer. J'ai probablement été le premier à le détourner, par exemple pour faire du jazz, ce que l'on peut entendre dans "Summertime" ou "Take the A train", standards que j'ai réarrangés pour le zhongruan." Pour un résultat surprenant. Même les Chinois l'approchaient en concert pour lui demander d'où venait l'instrument, et s'il était chinois.



Perte de repères dans la Chine moderne
L'influence chinoise a d'autres facettes, parfois moins agréables. Par exemple la pollution, le bruit constant des travaux, les gens qui parlent fort, le bruit en général, qu'il traduit, selon son humeur, dans ses performances live aux séquences improvisées, heureusement de manière beaucoup plus agréable. "I wanna make some money" parle de l'obsession de l'argent, et "End of the World part 1 et 2" de la fin du monde, que beaucoup de Chinois, comme ailleurs, pensaient possible. Un choc des cultures, qui l'interpelle non pas en tant que Français à Pékin, mais "en tant qu'être humain". "La Chine est un endroit où il y a peu de repères, et que ce soit pour l'être humain français, occidental ou chinois, il n'est pas facile de s'adapter."

Djang San s'attache aussi à jeter un pont entre ces cultures. Avec le zhongruan, il crée une musique à cheval, entre folk chinois et électro ou jazz. Dans ses albums précédents comme "Is it China ?", il s'est ainsi inspiré de poésie chinoise classique, qu'il a mise en musique. "Jianlou House" correspond ainsi au poème "Lou Shi Ming" écrit sous la dynastie Tang par le poète Liu Yuxi. Là encore, c'est une expérience pionnière.



Une communauté française dynamique
Mais il n'y en a pas que pour la Chine. La France intervient aussi à sa manière. D'abord grâce au multiculturalisme. "Le fait d'avoir grandi dans une société où l'idée de cultures différentes existe m'a clairement permis de m'ouvrir". Y compris de venir en Chine, et, paradoxalement, de s'y dépouiller de ses habits de Français. Ensuite via la communauté française, "la plus active au niveau artistique à Pékin, et même en Chine. Je dirais que les Américains sont juste derrière. Les Français bénéficient des évènements de l'ambassade, de l'Alliance française, avec Croisements, Mars en folie, la Fête de la musique... Sans compter les tourneurs et producteurs privés, et les propriétaires de bars." Un réseau sur lequel s'appuyer pour organiser des concerts.

La scène live chinoise encore instable
Car même s'il a été bien accueilli à son arrivée, y trouvant les rencontres plus faciles, avec moins de barrières qu'en France, et bien que les jeunes Chinois se réapproprient progressivement les bars, habitude nocturne venue d'abord des expatriés, la situation de la scène live en Chine n'est pas encore idéale. "En dix ans, la situation a évolué bien sûr. Il y a beaucoup plus de groupes et d'artistes de musique moderne, plus de festivals, plus d'intérêt. Mais cela reste limité en pourcentage de la population. La plupart préfère encore le karaoké à la musique live. Il n'y a probablement pas assez d'investissements financiers dans le milieu du rock chinois pour que les choses démarrent vraiment. Il y a quand même plus d'initiatives qu'avant, mais ça reste pour beaucoup du DIY (Do It Yourself, fait soi-même, ndlr)." Comme dans beaucoup de domaines en Chine, la logique financière est à court terme, source d'instabilité. Les différents acteurs vont et viennent, "ceux qui restent et tentent vraiment se comptent sur les doigts d'une main". Il y a aussi un problème de culture. "Le rock en Chine a connu son heure de gloire dans les années 80 parce que c'était nouveau, parce qu'il y a eu à l'époque un élan social différent de celui qu'il y a maintenant".

Un esprit peut-être moins rebelle, qu'il s'attache à combler avec l'énième visage de ce Janus musical : The Amazing Insurance Salesmen. Le 16 mars, il a célébré les 3 ans de ce trio rock, qui l'a amené à jouer devant près de 6.000 personnes, au Zebra festival à Chengdu ou de gagner contre une centaine de groupes, le concours Battle of the bands, à Kuala Lumpur, en février 2011. Comme le transformiste italien Arturo Brachetti, Djang San change une nouvelle fois de costume, en joyeux showman, plus extraverti, mais toujours dans ses habits, musicaux, de lumière. Pour ensuite, encore et toujours, retourner à ses recherches.


Informations pratiques : Djang San jouera à Pékin le 5 avril pour le festival Sound of the Xity avec son groupe AIS, et le 13 avril pour le festival Croisements au bar Jianghu, en solo.


Joseph Chun Bancaud (www.lepetitjournal.com/pekin). Vendredi 22 mars 2013


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Publié le 21 mars 2013, mis à jour le 21 mars 2013

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