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Loan Favan : des créations entre tradition Kanak et modernité Calédonienne

Portrait de Loan Favan artiste de Nouvelle-CalédoniePortrait de Loan Favan artiste de Nouvelle-Calédonie
Écrit par Clotilde Richalet
Publié le 24 août 2021, mis à jour le 10 avril 2024

S’ils ont quitté la Nouvelle-Calédonie, la Nouvelle-Calédonie ne les a jamais quittés. Éloignés pour quelques semaines ou plusieurs années, ils sont la preuve que l’on peut avoir des racines et des ailes. Partons ensemble à la rencontre de ces Calédoniens explorateurs, voyageurs, créateurs…

Aujourd’hui j’ai RDV avec Loan Favan : artiste créatrice et designer de bijoux. Dans un style bien à elle qui puise son inspiration dans les racines des sa Nouvelle-Calédonie natale, Loan transfigure des pièces traditionnelles en œuvres futuristes qui véhiculent l’esprit de son île.

 

L'enfance en Nouvelle-Calédonie et l’exploration du monde

D’une famille calédonienne depuis des générations, Loan grandit en Nouvelle-Calédonie, proche de sa famille et de sa grand-mère chez qui elle explore sa créativité dès l’enfance. Là-bas elle aime se déguiser et créer des costumes avec les robes de sa grand-mère. Vers 14 ans c’est déjà décidé dans son esprit d’enfant : elle sera designer, le meilleur des 2 mondes avec la facette ingénieur et la partie artiste. 

Très vite à sa majorité les aventures internationales s’enchaînent entre Auckland pour apprendre l’anglais et la rentrée parisienne à l’Ecole Boule. A Paris, elle dévore les musées où elle découvre et redécouvre des œuvres mythiques « en vrai » !  En arrivant au Pays-Bas, c’est l'expérience de l'univers étudiant international à l’Ecole Design Academy Eindhoven : école de design et de conceptualisation artistique, où des artistes de dizaines de nationalités différentes se côtoient, partagent et échangent.

Loan est y diplômée du département : L'homme et son identité < Department ‘Man and Identity’- Textile Minor Design Academy Eindhoven, Netherlands >.

Alors qu’elle se spécialise dans le métal et dans le bijou, elle effectue un stage à NYC chez Chrishabana à New York City qui lui permet de travailler le costume, le design et le bijou. Elle prend part à la fabrication de commandes importantes comme celle des danseurs de Beyoncé ou encore pour Cristina Aguilera :

"J'ai eu la chance de faire les ongles d’une paire de gants pour Cristina Aguilera, c'était fou ! C’était beaucoup de gros projets là-bas, une belle expérience. »

 

ongles crée par l'artiste de Nouvelle-Calédonie Joan Favan pour Cristina Aguilera

 

Bali est son dernier port d’attache en date. De nouveau une île, comme pour se rapprocher du Caillou, et surtout pour développer sa marque de bijou puisqu’elle y a implanté la production.

 

Chaque pays et chaque expérience d'expatriation m'a aidé à me développer en tant qu'artiste et à développer mon design.

Lors de ses retours réguliers en Nouvelle-Calédonie, Loan multiplie les interventions professionnelles dans des établissements scolaires pour transmettre son savoir. Elle organise des workshops et des lectures dans l’espoir de voir naître une génération de designers calédoniens et de continuer, à son échelle, à enrichir la culture calédonienne.

 

L’INTERVIEW MOTS CLEFS : 

Si je te dis : INSPIRATION

 

Loan : Depuis toujours j’aime créer des histoires, inventer des scénarios. J’ai été inspirée par des artistes comme Barthess, Lucy Mcrae ou Gentle Monster, qui basent leur art sur du « storytelling » qui raconte quelque chose ; beaucoup sont sous forme de scénarios dans des vidéos très futuristes. 

Il y a aussi une facette de mon inspiration qui est tribale et traditionnelle. Je trouve dommage que souvent il soit compliqué de toucher aux traditions. Moi j'aimerai qu’elles évoluent avec nous.

Quand je vois des expos d’art traditionnel tribal je suis impressionnée par la technique et la beauté du traditionnel. Mais j’aime aussi les expo beaucoup plus modernes et conceptuelles qui questionnent ma conception des choses. Et j'ai envie que ces 2 mondes cohabitent.

Dans mon art je veux créer quelque chose qui ait du sens, pas seulement quelque chose qui soit beau.

Aujourd’hui la Nouvelle-Calédonie est une source d’inspiration.  Mon engagement pour mon pays à travers mon art a un sens : comment en tant qu'artiste je peux avoir une voix ? Comment je peux changer des choses ? Je veux vraiment m'engager personnellement pour mon pays au fur et à mesure de ma carrière : lui rendre hommage est important pour moi, notre culture est tellement belle !

 

Si je te dis : NAULA 

 

Loan : Naula est le nom de ma marque de bijoux et cela signifie : "Braise". Quand je cherchais un nom de marque qui représenterai bien mon travail j’ai trouvé ça extrêmement beau.

J'aime la signification et la symbolique autour de ce nom :  travail sur le métal, lien avec la Nouvelle-Calédonie ; et le feu qui représente la passion : cette passion pour mon art qui m’anime.

J’ai créé la marque il y a 2 ou 3 ans, au début je faisais tout toute seule, à la main. Tout a commencé par quelques amis qui m’ont passé commande et Instagram aidant j’ai aujourd’hui installé l’atelier à Bali et j’ai 2 employés qui travaillent sur place.

 

 

Si je te dis : LA KE BO 

 

Loan : LA KE BO se traduit par : « Qui es-tu ? Qui est ta famille ? De quel endroit viens-tu ?» en Nengone - langue vernaculaire Kanak. Une question qui souligne l’importance de nos origines, notre identité et sentiment d’appartenance.
Un mot important est la famille. En tant que Calédonien tu n'es rien sans ta famille et ta terre. Comment faire si elle disparait à cause de la montée des eaux ?

LA KE BO est une utopie futuriste, où les terres de Nouvelle-Calédonie prennent vie, menacées par la montée des eaux et le réchauffement climatique.

Dans ce scénario apocalyptique, les paysages se transforment doucement pour survivre. Ces créatures sont inspirées par les légendes et traditions calédoniennes, où chaque terre possède un « esprit », un caractère et une histoire. 

 

J'ai créé 5 espaces clefs: Les terres du Sud, la Piscine Naturelle, le Marché, la Barrière de Corail et le Centre Culturel Tjibaou. Chaque espace évolue en « créatures totems » qui arborent des textiles, imprimés et silhouettes qui rendent hommage au lieu qu’ils représentent et à la culture calédonienne.

 

 

 

Si je te dis : NGEI

 

Loan : NGEI signifie :  "plus tard dans le futur" en Nengone, la langue de Maré. Dans les îles nos traditions prennent racines dans le passé et se transmettent par la parole. Je me demande alors comment notre héritage va-t-il évoluer, voir même survivre dans le futur ?

L'envie originale était de créer une collection et de l'exposer au Quai Branly à côté des artéfacts traditionnels pour ouvrir une conversation. Oui ces objets anciens sont magnifiques mais j'ai envie de les ramener au goût du jour et de créer leur version moderne ou future sous forme de bijoux monumentaux. A travers mon art et ces bijoux je veux rendre hommage à ma terre.

Ngei sera une collection de 5 accessoires monumentaux inspirés des artefacts Kanak, confronter les 2 et ainsi re-questionner leur avenir.

 

 

Au cours de ce projet j’ai recherché l’Histoire de ces objets et leurs légendes, afin de créer des pièces qui seraient bien plus que de simples bijoux mais feraient parti de nos traditions. J’ai intégré les détails des cases, des flèches faîtières, des piques d’oursin, des détails des bambous gravés...des symboles qui ont été les piliers de notre passé et seront, selon moi aussi ceux de notre future.

 

Une campagne de crowdfunding pour mener à terme de projet NGEI 

Pour ce projet : Loan a besoin de votre soutien. Elle a lancé une campagne de crowdfunding que vous pouvez retrouver ici : https://www.indiegogo.com/projects/ngei/x/26902957#/

N’hésitez pas à visiter sa page, chaque participation peut l’aider à mener à bien ce projet, à partager sa vision et à promouvoir la culture Kanak.

 

Entre passé et futur, entre tradition et modernité, laissez-vous embarquer dans l’univers introspectif et visionnaire de cette jeune artiste.

 

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