L'année 2024 marque une avancée historique pour la représentation des femmes à l’écran : pour la première fois, la parité entre protagonistes féminins et masculins est atteinte parmi les films les plus rentables aux États-Unis. Pourtant, derrière la caméra, les femmes restent largement sous-représentées, et leur présence à l’écran demeure marquée par des stéréotypes et un manque de diversité.


En mars 2025, deux études majeures ont mis en lumière une avancée significative pour la représentation des femmes dans le cinéma. Selon le Center for the Study of Women in Television and Film de l’Université d’État de San Diego, 42% des 100 films les plus rentables aux États-Unis en 2024 mettaient en scène une protagoniste féminine, un chiffre égal à celui des films avec un héros masculin. L’USC Annenberg Inclusion Initiative va encore plus loin en annonçant que 54% des films à succès de l’année écoulée avaient une femme en rôle principal, une progression spectaculaire par rapport aux 30% de 2023 et aux 20% de 2007.
Si ces chiffres semblent indiquer un tournant, les chercheurs rappellent que cette évolution est encore fragile. « Des films comme The Substance ne sont aujourd’hui pas la norme, ils sont une exception », analyse Martha Lauzen, directrice du Center for the Study of Women in Television and Film. Les progrès en termes de rôles parlants et de postes clés demeurent minimes.

Une sous-représentation persistante derrière la caméra
L’analyse des blockbusters de 2024 met en évidence une industrie toujours dominée par les hommes. Selon le Center for the Study of Women in Television and Film, 82% des films à succès n’avaient pas de réalisatrice, 76% n’avaient pas de femmes scénaristes et 75% n’avaient pas de monteuse. Plus frappant encore, 92% de ces productions ne comptaient aucune femme cheffe opératrice.
L’ironie est que plusieurs films de 2024, comme The Fall Guy, Maxxxine ou A Family Affair, mettaient en scène des personnages de réalisatrices. Toutefois, ces figures fictives étaient souvent décrites comme incompétentes, manipulatrices ou dépendantes de leurs collègues masculins, renforçant ainsi les stéréotypes sur la place des femmes dans le milieu du cinéma.
Devant la caméra, ce n’est pas beaucoup mieux
Si les protagonistes féminines sont désormais plus présentes, leur représentation reste inégale. Dans 72% des films étudiés, moins de cinq femmes occupaient des rôles significatifs. À l’inverse, la majorité des productions comptait au moins dix hommes dans des rôles majeurs. Le Napoléon de Ridley Scott en est un exemple frappant : bien que Joséphine, l’épouse de l’empereur, ait eu un rôle important dans son histoire, elle reste largement éclipsée par la figure masculine centrale et son entourage dans le film.
Autre problème : l’âge des actrices. Seuls 6% des femmes visibles à l’écran ont environ 50 ans et seulement 5% dépassent la soixantaine. Chez les hommes, ces proportions sont respectivement de 16% et 9%. Alors que Robert De Niro, 81 ans, continue d’obtenir des rôles majeurs comme dans Killers of the Flower Moon, les actrices du même âge peinent à décrocher des premiers rôles.

Les femmes racisées sont encore plus marginalisées dans l’industrie du cinéma. En 2024, seulement 17% des rôles féminins étaient attribués à des actrices noires et 4% à des actrices latinas. De plus, les personnages féminins sont encore largement définis par leur relation aux hommes, tandis que leurs homologues masculins sont davantage identifiés par leur métier ou leur statut social.
L’édition 2025 des Oscars illustre ces inégalités persistantes. Sur les dix films en lice pour le prix du meilleur film, un seul, The Substance, était réalisé par une femme, Coralie Fargeat. Cette dernière était d’ailleurs la seule femme en compétition pour l’Oscar de la meilleure réalisation, aux côtés de quatre hommes déjà maintes fois primés.
Si la parité entre protagonistes féminins et masculins dans les films à succès est une avancée notable, elle ne suffit pas à masquer les nombreuses disparités qui persistent dans l’industrie du cinéma. L’accès aux postes clés de réalisation, de scénarisation et de production demeure limité pour les femmes, et leur représentation à l’écran reste encore marquée par des stéréotypes et des inégalités d’âge et de diversité. Alors, même si la route vers l’égalité dans le septième art est encore longue, ces études montrent que des avancées sont possibles.
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