Aujourd’hui responsable du développement de la plateforme Crew United en France, Sonia est habituée à se produire sur les planches des théâtres allemands. Berlin, Wiesbaden, Baden Baden et maintenant Munich, la jeune femme nous partage son parcours lors d’un entretien.
Sonia sera également l'invitée du prochain événement networking municité, l’art de faire des ponts aux côtés de l’illustratrice Kera Till. Le 12 juin prochain à l’Institut français de Munich.
Grandir avec la frontière franco-allemande en vue
Sonia fait partie de ces chanceux qui ont grandi avec deux cultures et deux langues. Sa mère est allemande - bavaroise même ! - nous précise Sonia. Et son père est français. Elle est née à Kehl, ville frontalière à un pont et 5 minutes de Strasbourg. Sa famille déménage plusieurs fois - du Baden Wurtemberg en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, puis en Rhénanie-Palatinat - toujours la frontière franco-allemande en vue. D’ailleurs, lorsque son père se voit proposé un poste à Berlin (encore divisé à l’époque), il refuse car les allers-retours avec la France seraient trop compliqués.
L’éducation à la française, elle la reçoit surtout les étés qu’elle passe avec son frère chez leurs grands-parents à Biarritz. « Il y avait des règles assez strictes entre nous. Par exemple, nous pouvions parler en allemand mon frère et moi lorsqu’on était tous les deux. Mais dès que nos grands-parents étaient là, même si l’on ne s’adressait pas directement à eux, il fallait que nous parlions français. Finalement c’était aussi par politesse et pour qu’ils comprennent ce que nous nous disions. » Il n’y avait donc pas de cachotterie possible en allemand devant les grands-parents. Et on comprend que cet atmosphère a permis à Sonia de s’approprier également la langue et la culture française dans la bonne humeur et sous le soleil basque.
Aujourd’hui Sonia parle français à ses enfants. « C’est mon père qui m’avait encouragée à le faire et je lui en suis reconnaissante. (…) Depuis que nous habitons à Munich j’essaie de faire en sorte de me rapprocher de la communauté francophone pour que mes enfants et moi puissions pratiquer cette langue plus régulièrement. »
Du théâtre au management culturel deux modes de vie pas forcément opposés
Dès le départ, Sonia oscille entre ces deux univers. Elle commence ses études par un cursus franco-allemand de médiation culturelle. Elle étudie alors à Weimar puis à Lyon. Mais au bout de 2 ans, elle ressent le besoin et l’envie de faire elle-même partie de cette culture qu’ils apprennent à promouvoir dans ses études.
Il y a toujours eu ce conflit à l’intérieur de moi entre d’un côté vivre et faire la culture de manière active, et d’un autre côté, la gérer et la promouvoir.
Elle se lance alors dans les concours des grandes écoles, les écoles supérieures d'art dramatique. « C’était des concours très difficiles. Sur un millier de personnes, ils ne prenaient qu’une dizaine d’élèves chaque année. Les concours se déroulaient par vagues de sélection. Au premier tour on n’était plus que 100, puis plus que 30, etc. J’ai eu la chance d’être prise à Essen dès mon premier essai au concours. » Entre 2002 et 2006 elle se forme donc au métier de comédienne. « L'accent était clairement porté sur le métier de comédien pour la scène de théâtre. On apprenait à s’exprimer avec le corps, avec les expressions. »
A la suite de ses études, elle est embauchée dans différentes scènes allemandes. Il faut savoir que le système des théâtres est assez unique en Allemagne (et dans les pays germanophones). En ce sens que les comédiens ont des contrats fixes avec les théâtres qui dépendent de la municipalité. Chaque théâtre municipal a ainsi sa propre compagnie de comédiens (son “Ensemble”). « C’est un peu le graal de signer un contrat fixe pour un comédien. »
C’est à Berlin que Sonia commence sa carrière, au sein de la troupe du Grips Theater, un théâtre spécialisé dans le politisches cabaret, des sortes de pièces de boulevard avec un angle politique. Et des pièces pour les enfants en journée. Puis elle enchaîne avec un période de contrats à courts termes « un peu à la française finalement » et retrouve un contrat fixe à Baden Baden. Une sorte de retour aux sources dans la région où elle est née. « Le hasard a fait que des personnes qui venaient me voir avaient connu mes parents. Je me souviens d’un soir au restaurant qui était à côté du théâtre et où comédiens et public se mélangeaient après la représentation, un homme vient me voir et il m’explique qu’il dirigeait l’hôpital où mon père travaillait il y a près de trente ans. Et qu’il m’avait connue tout bébé. »
A cette période, elle rencontre son futur mari - lui aussi comédien - et ils ont leur premier enfant : « avec un enfant c’était encore possible de se partager le travail avec mon mari. Mais à la naissance de notre second, il a fallu réorganiser un peu notre mode de vie. Avec deux enfants, c’est plus compliqué d’être deux à se déplacer pour des pièces. »
Elle fait donc le choix de ralentir sur les pièces et reprend ses études de management culturel avec une formation à distance de l’université de Hambourg. « C’est un peu ma Zweites Standbein comme on dit en allemand. J’ai gardé ces compétences de mes premières études et ça me permet aujourd’hui de faire un autre métier. » Depuis 2019, elle est donc responsable éditoriale de la version française pour le site Crew United, le plus grand réseau européen pour les professionnels du film, un croisement entre Imdb et LinkedIn pour le monde du cinéma et de l'audiovisuel européen, nous explique-t-elle.
« C’est drôle parce qu’avant de travailler pour eux je cherchais souvent une plate-forme pour les comédiens en français et cela manquait. Quand j’ai donc vu passer l’offre pour mon poste actuel, j’ai de suite trouvé que cela faisait sens. »
Munich, l’équilibre vie pro et vie de famille, et le français !
Aujourd’hui elle équilibre donc son quotidien professionnel entre un travail de gestion et des missions de comédienne ponctuelles. « À Munich, il y a beaucoup de tournages et plus d’offres pour des jobs de voix. Donc je continue quand même à exercer en tant que comédienne, mais j’ai plus de flexibilité pour ma vie privée. Je ne suis plus mariée au théâtre nous dit-elle en rigolant. » Elle nous explique en effet que lorsqu’on fait partie d’une troupe fixe, les contraintes sont nombreuses et notamment on ne peut pas partir où on veut lors des jours de congés. « Il faut faire des demandes pour les déplacements, même personnels, car on peut toujours être amené à remplacer quelqu'un au pied levé. Donc ça m’a fait bizarre dans ce nouveau job, de pouvoir poser un jour de congé presque la veille pour le lendemain ! »
Un autre projet dans lequel elle s’est lancée récemment et qui lui tient à cœur c’est d’entretenir un peu plus ses liens avec la communauté francophone et de pratiquer plus régulièrement le français pour elle mais aussi pour ses enfants. « L’éducation bilingue ce n’est pas évident. J’ai suivi un programme de coaching pour les familles multilingues, le multilingual momentum club et l’un des objectifs que je me suis fixée, était de me rapprocher plus de la communauté francophone. Je découvre qu’il y a énormément de français et de francophones à Munich. Ça me plaît beaucoup et me fait du bien. »
« La ville en elle-même offre une qualité de vie exceptionnelle. Moi qui adore faire de la randonnée, je suis au bon endroit ! Et l’offre culturelle est aussi au rendez-vous. » Elle nous recommande particulièrement le Theatiner kino pour leur programmation de films en français. Mais aussi les deux festivals de films de Munich : le Filmfest München et le DOK.fest München (festival du film documentaire), tous les deux très accessibles et qui projettent souvent des films en français.
Pour en savoir plus sur Crew United et sur le parcours de Sonia, rendez-vous le 12 juin prochain pour le deuxième rendez-vous des rencontres municité.
Pour recevoir gratuitement notre newsletter du lundi au vendredi, inscrivez-vous !
Pour nous suivre sur Facebook, Twitter, LinkedIn et Instagram.