Ce jardin est certainement l'un des plus beaux de Lisbonne, mais aussi l'un des plus récents, puisqu'en 1873 la plus grande partie des quatre hectares de terrain qui lui étaient destinés se trouvaient encore à l'état de friche. Il est également considéré comme l'un des plus fameux jardins botaniques d'Europe.
Un peu d´histoire
Primitivement installé au XVIIIº siècle à Ajuda, là où le Marquis de Pombal avait projeté sa conception initiale en l'associant à un musée d'histoire naturelle et à un laboratoire de physique, du temps où le développement scientifique et l'esprit des Lumières prenait leur plein essor, il fut transféré progressivement, à partir de 1838, dans une partie de l'ancienne Ferme du Monte Olivete, vaste propriété ayant appartenu à la Compagnie de Jésus (Jésuites), qui y enseignait déjà la botanique entre 1609 et 1759.
Ses débuts ne furent guère brillants comme jardin d'étude conçu pour servir d'appui pédagogique à la Faculté des Sciences. Enfin, après presqu'un demi- siècle de léthargie, en 1878, deux grands hommes de science, les professeurs de botanique João de Andrade Corvo et le Comte de Ficalho, arrivèrent au prix de gros efforts et de dévotion professionnelle à la réalisation concrète de ce jardin, regroupant dans ses collections, en à peine quatre ans, plus de 10.000 plantes. Sous leur direction éclairée, le jardin botanique de Lisbonne devint l'un des plus réputés d'Europe, recevant la visite de nombreux voyageurs étrangers, qui en firent rapidement les éloges. Parmi ces derniers, un certain docteur et botaniste suisse, Robert Chodat, qui n'hésitera pas à déclarer publiquement: "Ce jardin est, sans conteste, une des plus grandes merveilles du sud de l'Europe. Les jardins de Provence, de Ligure et même de Malaga ne sont que de vulgaires carrés de verdure comparés à cette végétation tropicale luxuriante et exubérante... . Il n'y a pas d'endroit aussi paisible dans tout Lisbonne. On ne peut pas visiter ce jardin en un seul jour comme il se doit, car son ampleur ne trouve aucun rival dans toute l'Europe. Tous ses palmiers, bananeraies, conifères, cycas et dicotylédones arborescents constituent un arboretum incomparable."
Un jardin d´une grande richesse botanique
L'énorme diversité de plantes recueillie par ses premiers jardiniers en chef, l'Allemand Edmund Goeze et le Français Jules Daveau, provenant des quatre coins du monde, mais plus particulièrement des territoires sous domination portugaise, prouve l'ampleur de la puissance coloniale du Portugal de l'époque.
La référence officielle est de 1493 espèces distinctes recensées, bien que ce chiffre soit assez aléatoire. Les collections servent plusieurs branches de l'investigation scientifique et démontrent auprès du grand public et des écoles la grande diversité des formes végétales et des multiples processus écologiques, tout en représentant un moyen important et effectif à la conservation de plantes menacées ou en voie de disparition.
Certains éléments de cette collection méritent une mention spéciale; la notable diversité de palmiers (40 espèces différentes), provenant de tous les horizons et constituant la plus grande palmeraie d'Europe en plein air. Les Cycadacées sont aussi un des ex-libris du lieu et d'un intérêt notoire avec les espèces des genres Ceratozamia, Encephalartos, Cycas, représentants d'authentiques fossiles vivants. Considérées comme de grande rareté, certaines espèces ne se trouvent plus uniquement que dans des jardins botaniques comme celui-ci.
Le jardin est aussi particulièrement riche en espèces tropicales, ce qui prouve encore une fois la douceur du climat de Lisbonne et les micros-climats soigneusement crées dans cette irrégularité du terrain.
Dans la partie supérieure, ayant pour objectif principal la diffusion des connaissances botaniques et désignée comme "la classe", Jules Daveau, qui fut plus tard directeur du Jardin des Plantes de Montpellier, y fit construire la grande serre et planta la fameuse allée de palmiers de Californie et du Mexique (Washingtonia robusta et filiforma) de l'ancienne entrée du jardin. Par la suite, le Portugais Antonio Ricardo da Cunha apportera sa longue expérience acquise à la conservation du jardin botanique de Ajuda. En plus de nombreux exemplaires transplantés de ce dernier, le Jardin des Plantes de Paris fut aussi la source de contributions de haute valeur, tout comme les jardins des Ducs de Palmela et ceux du docteur José do Couto, situés sur l'île de São Miguel, aux Açores. Grâce à tous ces efforts collectifs et malgré le peu de moyens financiers, il en ressortira un excellent instrument de travail et un splendide refuge, qui éveille l'admiration de tous.
Les parcelles dans cette partie du jardin sont disposées de manière symétrique, autour d'une pièce d'eau circulaire accueillant des plantes aquatiques et sont délimitées par des haies de buis (Buxus sempervirens).
A signaler également la très belle collection de Ficus (figuiers) de provenances multiples, dont l'impressionnant Ficus Macrophylla d'Australie, véritable monument végétal. Toujours dans cette partie, s'érige un centre météorologique, de 1863, et un observatoire astronomique inauguré en 1880.
Partie inférieure du jardin
Au milieu de l'élégant escalier qui conduit à la partie inférieure du jardin dite arborée, Arboretum, a été placé le buste du docteur Bernardino Antonio Gomes (père), dont le travail dans le domaine de la pharmacologie et de la botanique appliquée à la médecine fut de portée internationale. En arrivant en bas, une belle collection de plantes xérophytes ou succulentes s'épanouie sur le côté droit; agaves, aloès, opuntia ou cactus à raquette avec deux dragonniers géants en sont des exemples notoires. Puis, c'est cette allée de palmiers, plantée en 1880, comprenant des représentants de Chine, d'Australie, du Mexique ou de Nouvelle-Zélande avec aussi un palmier endémique du sud de l'Europe, le fameux doum ou Chamaerops humilis. Cette allée nous conduira jusqu'au portail de la rue da Alegria, qui est fermé depuis longtemps.
En revenant sur nos pas, nous croiserons un ensemble d'arbres à la hauteur impressionnante, tels les Araucarias d'Océanie, les Tipuanas du Brésil et de Bolivie, les Casuarines d'Australie, le cyprès du Mexique (Taxodium mucronatum) ou celui des marais, avec ses nodules pneumatophores visibles sur ses racines (Taxodium distichum).
Il faut rappeler que le développement de tous ces arbres fut relativement rapide grâce à un sol argilo-calcaire riche en humus et à une exposition privilégié et bien abrité des vents dominants. Du temps de la Ferme des Jésuites, c'était d'ailleurs l'emplacement d'un grand champ d'oliviers.
Un havre de fraîcheur
On ne peut que répéter l'immense valeur de ce jardin, implanté avec habilité sur ce terrain accidenté dont la configuration naturelle fut exploitée en profitant des différences de niveau du versant de la colline. Ce jardin offre une ombre généreuse pendant les journées de canicule grâce à toute cette végétation luxuriante dont il est pourvu et une fraîcheur bien agréable dégagée par ses petits lacs.
Pour la commémoration de ses 130 ans d'existence, en 2008, une ligne de conduite a été fixée :
- divulguer les connaissances sur la biodiversité et sa conservation
- stimuler la culture et l'éducation
- s'ouvrir davantage à la ville de Lisbonne en fournissant des programmes attractifs d'ateliers et de visites guidées.
Le 4 novembre 2010, le Jardin botanique a été classé Monument National.
André Laurins (www.lepetitjournal.com/lisbonne.html) Reprise vendredi 6 juin 2014
Technicien agronome (laurins.andre@gmail.com)
(Photos : M.J. Sobral)
www.mnhnc.pt
Rua da Escola Politécnica, 58 - Lisbonne
Horaires d´ouverture tous les jours:
- 9h à 20h du 1er avril au 31 octobre
- 9h à 18h du 1er novembre au 31 mars
Entrée : 2?
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