Lauréate du Prix Social attribué par Decathlon dans le cadre du Grand Prix France Hong Kong 2025, l’association hongkongaise Women In Sports Empowered (WISE) est engagée pour la promotion de la pratique du sport pour les femmes à Hong Kong. Sa présidente, Alicia Lui, revient pour lepetitjournal.com sur les débuts de l’association, les impacts concrets de son action dans les écoles, et ce que représente ce nouveau soutien.


Nous voulons toucher toutes les couches de la société
Quel est le cœur de votre approche dans les écoles ?
Nous intervenons principalement dans des établissements secondaires, notamment en niveau secondaire 2 et 3. Nous avons mis en place un programme de cinq sessions, souvent intégrées dans les cours d’EPS. Chaque session dure environ 75 à 90 minutes, mêle activité physique et moment de réflexion. Le but n’est pas de devenir expert en un sport, mais de développer des compétences sociales, de renforcer la confiance en soi, et de créer un espace d’expression. On utilise le sport comme un levier pour apprendre autrement.
Vous avez mentionné un ciblage spécifique des établissements scolaires. Pourquoi ?
À Hong Kong, il existe un système informel de hiérarchisation académique. Nous essayons de travailler dans des écoles moins favorisées, car elles accueillent souvent des élèves issus de milieux moins aisés. Le sport peut être un formidable outil d’émancipation, mais encore faut-il y avoir accès. Or, les inégalités sociales se reflètent dans l’accès à la pratique sportive.
J’ai grandi en entendant que le sport n’était pas pour les filles
Quel a été le déclic personnel pour créer WISE ?
J’ai toujours aimé le sport. J’ai grandi à Hong Kong, j’ai été scolarisée à l’école française, et j’ai eu accès à des installations de qualité. Mais culturellement, j’entendais que certains sports étaient trop masculins, que ce n’était pas sérieux pour une fille d’en faire son métier. Vingt ans plus tard, ces stéréotypes persistent. Nous voulons les déconstruire et montrer que les filles peuvent jouer au foot ou au basket sans que cela soit un problème.
Travaillez-vous uniquement avec des filles ?
Notre mission reste centrée sur les filles, mais dans certains établissements, pour pouvoir intervenir, nous devons aussi intégrer les garçons. Et c’est une bonne chose. Par exemple, nous avons introduit un atelier sur l’"alliance masculine" : comment les garçons peuvent être des alliés et soutenir les filles dans leur pratique sportive. C’est fondamental pour créer un changement culturel global.
Le soutien de Decathlon est une étape clé pour nous
Que représente ce Prix Social décerné par Decathlon dans le cadre du Grand Prix France Hong Kong ?
C’est un immense honneur. Nous travaillons déjà avec Decathlon sur certaines actions — leurs salariés ont participé à nos ateliers comme facilitateurs — mais ce prix ouvre la porte à une collaboration plus stratégique. Grâce à cette reconnaissance, nous espérons pouvoir étendre notre impact à d’autres publics, notamment les familles ou les adultes qui n’ont pas eu accès à ce type d’éducation sportive.
Comment impliquez-vous les adultes dans cette transformation culturelle ?
Nous n’avons pas encore de programme structuré pour les parents, faute de financements. Mais nous travaillons beaucoup avec les enseignants et les facilitateurs, qui deviennent à leur tour des relais de nos messages. Certains professeurs de sport nous ont dit qu’ils n’avaient jamais été formés sur des sujets comme les règles et le sport ou le choix de soutien-gorge adapté. Ce sont des éléments essentiels pour la pratique et la confiance des adolescentes.
Les filles osent se dévoiler, et ça change tout
Quel est votre plus grand motif de fierté ?
Quand une élève nous dit des semaines plus tard ce qu’elle a retenu du programme, qu’elle se sent plus confiante, qu’elle comprend que "ce n’est pas toujours de sa faute", on se dit que le message est passé. On a aussi des retours touchants de nos facilitatrices, comme cette jeune femme qui, en randonnée, n’a pas hésité à continuer malgré ses règles grâce à ce qu’elle avait appris avec nous. C’est ce genre de petits déclics qui montrent l’impact de notre travail.
Quels sont vos prochains projets ?
Nous serons partenaires caritatifs d’une course féminine organisée par une communauté de sportives locales le 12 octobre à Aberdeen Country Park. L’événement sera accessible à toutes, avec des distances adaptées pour les enfants, les débutantes. En juin, nous avons aussi des projections de films sur le sport, et un atelier de football avec Lara Dickenmann, ex-joueuse de l’équipe nationale suisse, organisé avec le consulat de Suisse.
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