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TAXIS - Hausse du prix à Hong Kong, un savant équilibre dans un contexte tendu

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Écrit par Lepetitjournal Hong Kong
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 20 mars 2018

Le gouvernement de Hong Kong en approuvant une augmentation du prix des taxis (en moyenne 10% sur la prise en charge et la course) répond à une demande ancienne des représentants de l'industrie du taxi et des prix inchangés depuis décembre 2013. Le nouveau barème voté entrera en vigueur le 9 avril prochain avec la reprogrammation des taximètres.

 

Cette hausse, bien que justifiée par de multiples facteurs, intervient dans un contexte particulier d'insatisfaction des usagers au regard de la qualité du service proposé, couplée à des tensions entre le gouvernement et l'industrie du taxi quant aux réformes à mettre en ?uvre pour améliorer et moderniser ce service.

Une hausse légitime

Le gouvernement a considéré comme recevable la demande d'augmentation de l'industrie du taxi en fixant un nouveau barème en hausse. Mais soucieux de l'impact financier sur les usagers, il n'a pas avalisé intégralement la hausse réclamée.

Plusieurs facteurs ont penché favorablement dans la balance :
-  l'érosion du salaire des chauffeurs dont le revenu moyen est apparu inférieur à celui des personnels de l'industrie du transport,
-  l'augmentation des charges des opérateurs de taxis due notamment à une inflation persistante (+9% depuis la date de la dernière augmentation des tarifs en décembre 2013)
-  et l'expansion des lignes ferroviaires qui ont pu restreindre le recours aux taxis.

Le gouvernement a veillé également à harmoniser le coût des taxis avec celui des différents modes de transport disponibles, les tarifs du métro ayant quant à eux augmenté constamment, de 2,7% en moyenne par an entre 2009 et 2016.

Selon une étude UBS de 2015, les tarifs pratiqués par les taxis de Hong Kong semblent très compétitifs, figurant parmi les moins chers du monde. Dans le port aux parfums, il faut acquitter 3,34 euros pour une course de 5 km en ville contre 11,39 euros à Paris (3,5 fois plus cher) ou 29,41 euros à Oslo, championne toute catégorie du classement.

L'augmentation appliquée sera ainsi comprise entre 8,60% et 11,15% selon les secteurs. Les chauffeurs des taxis en circulation sont invités à informer leurs clients et à afficher les nouveaux tarifs officiels en attendant la reprogrammation de tous les taximètres.

Les nouveaux tarifs en détail:

 

Tarif des taxis Hong Kong

 

Ces facteurs objectifs entraîneront-ils pour autant compréhension et adhésion de la part des usagers ? Rien n'est moins sûr tant la qualité du service s'est dégradée.

La qualité du service en question

Cette dernière est souvent mise à l'index et les « mauvaises manières » sont en augmentation. Le nombre de plaintes enregistrées contre les taxis a ainsi atteint le niveau record de 10.359 en 2015, à comparer aux 6.227 plaintes enregistrées 10 ans plus tôt (+66%). Ces « mauvaises manières » font référence à des comportements tels que la rudesse des chauffeurs, le style de conduite chaotique mais également à des faits plus graves, en infraction avec les règles (cf. guide du service de taxi édité par le département des transports, chapitre 8), tels que l'allongement volontaire des trajets, le choix sélectif des passagers ou le refus de prise en charge.

La dégradation du service semble s'être opérée insidieusement au fil des ans, notamment depuis 1994, date du gel de l'octroi de nouvelles licences de taxis. Les 18.163 licences actuelles sont détenues par de nombreux acteurs : sociétés indépendantes, associations regroupant des propriétaires indépendants ou à moindre échelle, chauffeurs propriétaires de leur taxi. 70% des taxis sont par conséquent conduits par des chauffeurs titulaires du permis taxi qui louent leur outil de travail, le véhicule, pour environ 400 HK$ par rotation (2 rotations par jour). Ce gel des licences, associé à un rendement intéressant, a accru l'intérêt des investisseurs et des spéculateurs. Il est reproché à ces derniers de louer les taxis à la demande, sans fidéliser leurs subordonnés, les manager et encore moins les gratifier en fonction de leur niveau de performance. Bref, d'attendre que la valeur de leur bien croisse sans être corrélée pour autant avec le service proposé in fine aux usagers.

Illustration taxis en chiffres : 

 

Taxi Hong Kong infographie

 

Certains pointent également le fait que le « Road Traffic Ordinance », qui gouverne et régule le secteur avec un certain succès depuis 40 ans, n'a pas su fixer le juste cadre permettant à cette industrie de se moderniser ou de faire sa révolution technologique.

Quelles sont les pistes d'amélioration ?

En contrepartie de l'augmentation votée, le gouvernement, conscient de cette réalité, exige nouveaux équipements et résultats. Si de nombreuses initiatives avaient déjà vu le jour (formation continue des chauffeurs, développement d'applications mobiles permettant la commande de taxis à distance, pre-booking avec prestations supplémentaires, introduction du paiement par carte Octopus, campagne de courtoisie au volant avec dispositif de notation des chauffeurs transmis par GPS), elles n'ont jusqu'ici pas été couronnée de succès. Le secteur reste aux mains de diverses corporations avec chacune leurs représentants dont les intérêts, pas forcément alignés, ne convergent pas vers la satisfaction du client.

Un test (l'installation de la CCTV dans 10 taxis, enregistrant tous les faits et gestes des chauffeurs) a été lancé, en septembre 2016, par une association regroupant 5.000 propriétaires de licence. Il a fourni des résultats prometteurs justifiant l'extension de ce dispositif à 2.000 taxis sous un an.

Le gouvernement cherche de son coté à évaluer la mise en place d'un service premium via le lancement d'un appel d'offre pour sélectionner trois sociétés distinctes à qui octroyer jusqu'à 200 licences chacune, pour une durée de 4 à 6 ans (Uber, encore non autorisé dans sa forme VTC, pourrait prendre part à cet appel d'offres). L'industrie du taxi, y est bien évidemment fermement opposée arguant que ces nouvelles licences ne représenteront que 3% de la flotte totale de taxis, soit une grosse goutte d'eau, et qu'elles n'aideront en rien à régler les déficiences actuelles du service classique de taxi.

Cette initiative apporterait effectivement, si le projet va à son terme, une réponse très partielle au problème, en offrant un service plus qualitatif à ceux qui sont prêts à payer plus cher pour être transportés d'un point à un autre dans de meilleures conditions.

Léna Pelletier (www.lepetitjournal.com/hong-kong) - jeudi 6 avril 2017
 

* Etude UBS présentée dans Le Figaro - Taxis: le prix dune course dans 71 capitales:
 http://bit.ly/lefigarocoutdestaxis

 

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Publié le 6 avril 2017, mis à jour le 20 mars 2018

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