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CULTURE CHINOISE - Petite leçon de jade avec Jacky Lau

Écrit par Lepetitjournal Hong Kong
Publié le 7 décembre 2014, mis à jour le 28 février 2015

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Dessinateur de bijoux, Jacky Lau ne travaille exclusivement le jade que depuis quelques années. C'est en cherchant un bracelet de "ice jade", ce jade d'une transparence trouble comme la glace, que Jacky est tombé amoureux de cette pierre précieuse ancrée dans l'art et la culture de la Chine. Interrogé par le Petit Journal, le designer a accepté de révéler quelques uns des secrets de cette gemme à laquelle les Chinois prêtent mille vertus.

Yau Ma Tei, Kowloon. Nous suivons Jacky Lau dans les allées étonnamment désertes du très touristique Jade market. Indifférent aux vendeurs qui l'interpellent, l'expert observe d'un ?il critique les étals de bijoux et de porte-bonheurs chinois qui se présentent à lui. Tout à coup, il s'arrête devant une échoppe, touche, évalue, étudie mais grimace finalement, avant de secouer la tête.

Intriguées, nous lui emboitons le pas mais quelques aller-retours entre les comptoirs de vente suffisent à confirmer son analyse: "Ce n'est pas du jade.", nous assure-t-il, "Il n'y a en pas ici en fait, ou très peu. Ce sont soit des imitations venues de Malaisie, soit des jades de basse qualité (catégories B et C) qui ont subi un traitement chimique, ce qui annule leur valeur."

Si le verdict sans appel de l'artiste hongkongais ne nous surprend pas - on imaginait bien que les breloques du Jade market n'étaient pas de la meilleure qualité -, il laisse tout de même un sentiment désagréable, surtout lorsque l'on pense aux milliers de touristes qui chaque année achètent ici avec candeur un souvenir "précieux" du port parfumé. 

Néphrite et jadéite

Une heure plus tard, nous retrouvons Jacky Lau dans son atelier de Fo Tan pour notre première leçon sur le jade. Il existe en réalité deux qualités de pierres, nous explique notre professeur : la néphrite qu'on utilise depuis plus de 2000 ans en Chine pour la réalisation d'outils, d'objets rituels et ornementaux, et la jadéite, une pierre plus dure, plus brillante et plus rare, qu'on trouve principalement en Birmanie. Du blanc glacé au noir en passant par le jaune, le rouge, le bleu, le vert et la lavande, cette dernière que les Chinois nomment "fei cui" (littéralement "rouge vert") offre une large gamme de couleurs très appréciées, même si la jadéite vert émeraude qui doit sa teinte aux sels de chrome est de loin la plus recherchée.

"Le jade s'apprécie non seulement à travers sa couleur, sa transparence mais aussi son volume et sa coupe", nous explique l'ancien élève des Beaux-arts de Dijon. Si la transparence et une belle taille s'ajoutent à la couleur verte, la pierre est alors jugée "exceptionnelle". Les bracelets taillés d'une seule pièce, symboles d'éternité et du Yin et Yang sont d'ailleurs les pièces les plus chères tout comme les cabochons montés en collier, bague ou boucles d'oreilles. "Les Chinois aiment le jade dans sa simplicité. Cette pierre est magnifique en soi, la tendance est donc d'en conserver le maximum."

Le bijou de jade popularisé en Chine par l'impératrice Cixi

Dans la tradition chinoise, le jade est associé au junzi, un concept confucéen qui désigne l'être supérieur, l'homme de bien. On lui prête ainsi les qualités morales du sage : résistant, calme, posé. "Autrefois, les hommes portaient une pièce de jade à la ceinture", explique Jacky Lau, pour éloigner les mauvais esprits et leur donner chance, courage et tempérance. Associé à l'eau en référence à sa translucidité, le jade est en effet supposé "absorber l'excès de chaleur du corps" et rétablir ainsi l'équilibre physique et moral. Ce n'est que sous la dynastie Quing et l'influence de l'impératrice Cixi, la grand-mère du dernier empereur de Chine Puyi, que le jade monté en bijou devient populaire à la cour de Pékin.

Quelques conseils pour trouver du jade authentique

A Hong Kong, place forte du commerce du "yu" (la belle pierre), le prix du jade atteint aujourd'hui des sommets car les Chinois du continent en raffolent. "Il y a 10 ans, un bracelet en jade de bonne qualité se vendait 25 000 $HK. Aujourd'hui, du fait de la demande chinoise, un bracelet de qualité équivalente se vend à plus d'un million de dollars", nous apprend Jacky Lau.

Des chiffres très éloignés de ceux affichés au Jade market, qui ne vend au fond que de la verroterie. Mais comment savoir ? Comment reconnaitre le vrai du faux  jade quand on est un simple néophyte? Là encore notre expert intervient pour nous donner quelques conseils utiles. "Vous pouvez tout d'abord toucher la pierre. Le jade est froid et il est dense dans la main. Ensuite, vous pouvez faire tinter deux pièces ensemble, le son d'un authentique jade est cristallin. Enfin, le jade véritable (zhen yu - de catégorie A) ne se raye pas et présente un effet miroir naturel, même si aujourd'hui certains marchands trichent en enduisant les pierres de cire pour les faire briller". Mais le plus simple est encore d'avoir quelques bonnes adresses.

A Yau Ma Tei, à deux pas du Jade market, Jacky nous conduit dans l'une de ses bijouteries de référence, où se rendent les professionnels. Situé sur Battery street, le magasin ne doit pas faire plus de 9m2, mais dans ses vitrines des cabochons bombés, des bracelets nervurés côtoient des "laughing buddhas" de différentes couleurs et des disques étincelants, de jolies pièces dont nous devinons la qualité après la leçon de la matinée. Jacky Lau les observe un moment en silence. "Ces petits disques sont parfaits pour être montés en pendentifs. Beaux, simples et d'une grande qualité." Mais son regard s'attarde surtout sur trois bracelets de jade noir disposés dans un coin, "les pièces les plus remarquables du magasin aujourd'hui", nous confie-t-il. C'est aussi là le secret de ces magasins de confiance où chacun vient choisir le jade qui lui sied : ils ne proposent à leur clientèle que des pièces uniques.

Elsa Ponchon et Florence Morin (www.lepetitjournal.com/hongkong) lundi 8 décembre 2014

Crédits photos Elsa Ponchon et Florence Morin

Infos pratiques :

Fai Shing Jade
G/F, 27 C Battery Street
Yau Ma Tei, Kwoloon

Lire également :

FAA - Rencontre avec Jacky Lau, président de la French Alumni Association

 

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Publié le 7 décembre 2014, mis à jour le 28 février 2015

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