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MOHAMED ALI – L’insoumis et son combat contre la guerre du Vietnam

Celui qui se surnommait « le plus grand » est décédé le 3 juin dernier, après 32 ans de lutte contre la maladie de Parkinson. Légende planétaire, Mohamed Ali, né Cassius Clay, brillait autant sur le ring qu'en dehors. Défenseur des droits des Noirs aux Etats Unis, il incarne aussi la lutte contre la guerre du Vietnam. Retour sur son téméraire combat qui a failli le mettre KO.

En 1966, alors qu'il est au sommet de son art et qu'il enchaine les victoires, Mohamed Ali refuse d'aller combattre au Vietnam. Une prise de position inébranlable et courageuse qui marquera un tournant dans sa carrière sportive et qui fera couler beaucoup d'encre?

"Ma conscience ne me laissera pas aller tuer mes frères ou de pauvres gens affamés dans la boue pour la grande et puissante Amérique", lance-t-il. "Les tuer pourquoi? Ils ne m'ont jamais appelé nègre, ils ne m'ont jamais lynché, ils n'ont jamais lâché les chiens sur moi. (...) Comment pourrais-je tuer ces pauvres gens? Mettez-moi en prison!"

Adulée par certains, mais surtout critiquée par beaucoup d'autres, sa décision ne laisse personne indifférent. Mais Cassius Clay a choisi son camp : lui qui était déjà engagé dans la NOI, « Nation of Islam », une organisation politique et religieuse noire-américaine aux côtés de Malcom X, sera désormais Mohamed Ali l'insoumis et il défendra coûte que coûte ce qu'il pense être juste. Et la guerre du Vietnam ne lui semble pas juste : pour lui, « les Viêt-Cong sont des Asiatiques noirs » et il n'a pas à « combattre des Noirs ».

Le 28 avril 1967, il refuse symboliquement son incorporation. Invaincu mais dérangeant, il paie cher son insoumission : le 20 juin, il est condamné à 10 000 dollars d'amende et à 5 ans de prison. Il est également déchu de son titre de champion du monde et perd sa licence. Il ne peut donc plus boxer?

Il traverse alors une période difficile, ses poings ne pouvant plus le faire vivre. Écarté des rings et du monde de la boxe, il se lance dans un autre combat, celui pour les droits civiques des minorités, l'égalité raciale et contre la guerre du Vietnam. Il survit grâce à des conférences auxquelles il participe et il est ainsi la première personnalité américaine à s'exprimer ouvertement contre la guerre du Vietnam.

Il fait appel de sa condamnation et évite finalement d'effectuer sa peine de prison. Mais ce n'est qu'en 1971, alors que l'opinion publique américaine s'affirme de plus en plus contre la guerre du Vietnam, que la Cour Suprême casse finalement sa sanction et qu'Ali peut reprendre sa carrière.

Après des retours difficiles, il prouvera qu'il était réellement le plus grand et parviendra à nouveau au sommet, notamment lors de la célèbre « bataille de la jungle » à Kinshasa où il mettra Foreman K.O. en octobre 1974.

Celui qui avait commencé la boxe à 12 ans sur les conseils d'un policier à qui il avait raconté qu'il voulait infliger une correction à celui qui venait de lui voler son vélo, restera à tout jamais une légende aussi bien sportive que politique. Et son engagement a certainement eu un impact sur la mobilisation mondiale de l'opinion publique contre la guerre du Vietnam.

De nombreux hommages lui ont été rendus depuis vendredi, notamment par Barack Obama qui a insisté sur son rôle dans les transformations de la société américaine : « C'est un homme qui s'est battu pour ce qui était juste (?), son combat en dehors du ring lui a coûté son titre, lui a valu nombre d'ennemis. (?) Mais Ali a tenu bon. Il a secoué le monde et le monde s'en est trouvé meilleur, et nous nous en sommes trouvés meilleurs. »

 

 

Marielle Capelle (lepetitjournal.com/Hochiminhville) 7 Juin 2016

Lepetitjournal Ho Chi Minh Ville
Publié le 6 juin 2016, mis à jour le 13 avril 2024

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