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Sur le chemin tortueux de l’école

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« Nous restons dans notre logique globale, en passant des élèves plus âgés aux plus jeunes », a déclaré Alexander Lorz, ministre de l’Education et des Affaires culturelles de la Hesse. Faisons le point sur un sujet très discuté en ce moment, la réouverture des établissements scolaires en Allemagne et en France.


Une réouverture progressive dans l’ensemble des Länder

Depuis le 27 avril, l’école reprend progressivement pour plus de 100 000 jeunes en Allemagne. La priorité est accordée aux élèves de dernière année, à ceux qui passeront leurs examens l’année scolaire suivante, et aussi aux élèves du primaire qui passent au secondaire. Ces reprises sont soumises à des règles strictes afin de protéger au mieux les enfants, comme un nettoyage quotidien de l’établissement scolaire, la distance sociale minimale de 1,5 mètre et un maximum de 15 élèves par classe. C’est donc une organisation complètement nouvelle pour les enseignants et professeurs, qui vont devoir allier sécurité et enseignement. Les élèves défavorisés (ceux qui n’ont pas internet ou pas de matériel adapté à un enseignement à distance), auront la possibilité de reprendre plus rapidement, Berlin et Francfort font par exemple partie des villes offrant cette possibilité. Julien et Solange, tous deux professeurs des écoles ne cachent cependant pas leurs craintes au quotidien :« La réouverture des écoles n’aurait pas dû se faire avant septembre tout comme ce sera le cas en Italie ou en Espagne » « Nous passons plus de temps à faire respecter les gestes barrières, à nettoyer les stylos, trousses et autre matériel scolaire qu’à réellement enseigner. Faire respecter la distance sociale entre les enfants est d’autre part quasiment impossible ! On ne peut pas les surveiller en permanence surtout quand ils sont dans la cour de récréation ». « Nous vivons dans la crainte permanente de contracter le virus ».

 

La question épineuse des crèches et des écoles

Beaucoup de parents doivent actuellement jongler entre travail et éducation. En effet, les décisions concernant les réouvertures progressives des crèches et des écoles primaires continuent d’être discutées cette semaine, et des parents angoissés et débordés, souhaitent des changements rapides. Les plus petits n’ont donc pas encore tous retrouvé le chemin de l’école, mais certains parents doivent tout de même aller travailler. Quelles sont alors les possibilités qui leur sont proposées ? L’Allemagne développe des services de prise en charge en urgence, notamment pour les crèches et les écoles primaires. La place est accordée aux enfants de parents des groupes professionnels étant dans l’impossibilité de télétravailler (santé, forces de l’ordre, services de secours, enseignants assurant les services de garde, justice, employés municipaux, agriculture…). Ce système de garde pose néanmoins problème, car nombreux sont les parents, qui comme cette maman de la région de Hanovre, infirmière de nuit qui n’a pas obtenu de place pour son enfant. « Mon mari travaille en home office, il est très occupé et doit assister à de nombreuses conférences en ligne, lui laissant peu de temps pour s’occuper des enfants…». Certaines familles doivent donc faire un choix entre travail à l’extérieur et rester garder les enfants à la maison afin de pouvoir être à leurs côtés et assurer leur instruction.

 

GARDE ENFANTS ALLEMAGNE
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Du côté des écoles françaises en Allemagne

Ces dernières semaines ont été assez compliquées pour les écoles françaises, tant au niveau organisationnel que financier. Organisationnel, car comme le reste de l’Allemagne, elles doivent mettre en place différentes mesures afin d’assurer aux élèves un retour après le 11 mai, date du déconfinement en France, dans les meilleures conditions possibles. Et surtout financier, car une aide de 30 millions d’euros pour soutenir l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) a été refusée par la Commission Mixte Paritaire. De plus, ce sont également les parents qui s’inquiètent, car certains ne sont plus capables d’assumer en cette période de crise, le coût de la scolarité de leurs enfants. Olivier Brochet, directeur de l’AEFE, avait souligné que « L’AEFE est entièrement mobilisée », alors pour faire face à ce problème, le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères a décidé de mettre en place un dispositif exceptionnel visant à aider ces familles en difficulté financière. Il leur est notamment demandé de se rapprocher de leur établissement scolaire et des consulats, afin de déterminer l’aide qui pourra leur être apportée. Les demandes sont à déposer avant le 28 mai au lieu du 15 mai, date initialement annoncée.


Le ton monte

Dans certaines villes d’Allemagne, des parents d’enfants scolarisés dans des établissements français se sont retrouvés le bec dans l’eau, livrés à eux-mêmes pendant cette période de crise. A Francfort, le ton est monté sur les réseaux sociaux, de nombreux parents ont exprimé leur grogne en ce qui concerne des systèmes de garde en urgence inexistants pour les plus petits « Le problème de ne pas faire comme en Hesse mais à la carte, c’est que l’on se retrouve dans une drôle de situation face à l’employeur. Notre choix d’école n’est pas son problème. ». D’autres regrettent également que la continuité pédagogique ne soit pas toujours assurée correctement en distanciel par les enseignants, les enfants peu ou pas autonomes se retrouvant lourdement pénalisés et les parents dépassés. « L’enfant peut également vite saturer face aux réseaux sociaux lorsqu’il est submergé de messages d’enseignants qui utilisent des canaux de communication différents (whatsapp, zoom, skype, facebook, …) » renchérit une maman.

Concernant le système de garde en urgence dans les écoles françaises en Allemagne, certains soulignent que les écoles n’en proposent pas toutes en raison d’un soi-disant manque de personnel. Si les enfants du primaire peuvent depuis peu bénéficier de ces mesures de garde en période de crise sanitaire en attendant la réouverture des écoles, des parents regrettent que leurs enfants soient dans un système de garderie uniquement et craignent l’échec cuisant d’un retard scolaire. « Il est dommage que ma fille n’aille à l’école que pour faire de la « garderie », même si je suis conscient que c’est un réel défi pour les enseignants que de continuer à fournir un apprentissage aux élèves avec toutes les règles qu’ils ont à respecter », déclare un père anxieux.

Les familles monoparentales particulièrement vulnérables sont parmi les plus touchées. « Etant seule à tout gérer à la maison, ma charge de travail est énorme » nous confie une maman. « Mon fils est trop jeune pour bénéficier du système de garde proposé aux enfants du primaire et je n’ai pas les moyens de payer une nounou. Même si je peux travailler de chez moi, les journées sont très longues et ne se terminent jamais avant minuit ! ».


Repenser sa vie de famille

Si la crise sanitaire actuelle est source de moult tensions au sein des familles, certains parents ont vu dans cette expérience de vie inédite une occasion de se recentrer sur des valeurs simples et de repenser leur mode de vie en famille. « J’ai compris à quel point nous passions à côté de notre vie, dans le stress des transports, dans une course contre la montre au rendement, tout cela nous faisant oublier à quel point il est important de prendre le temps avec nos enfants » s’exclame un papa à la fois épuisé mais serein. Et de poursuivre « Oui nous travaillons beaucoup de la maison, gérons nos visioconférences avec les clients et les collègues, jouons à la fois les nounous, nous improvisons professeurs pour nos enfants, mais quelle joie de pouvoir passer du temps avec nos bambins qui paraissent beaucoup plus épanouis, faire de la cuisine ou du jardinage avec eux, c’est aussi ça l’école de la vie ! ».

 

FAMILLE
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Tandis que dans l'Hexagone...

En France, cette « rentrée », qui, à la différence de l’Allemagne, privilégie un retour des plus jeunes, inquiète énormément. La réouverture des écoles est prévue pour le 12 mai, et malgré des protocoles sanitaires stricts, beaucoup de parents ne remettront pas leurs enfants à l’école, estimant le risque trop important, « La situation reste floue, je ne ferai courir aucun danger à mes filles. On nous dit que le covid ne touche presque pas les enfants mais on découvre ensuite en lisant les journaux que plusieurs d’entre eux développent des symptômes graves ressemblant à la maladie de Kawasaki, maladie qui peut être mortelle », s’exprime une maman près de Lille. De plus, certains maires, qui jugent ce retour trop rapide, ont décidé de ne pas ouvrir les écoles maternelles et primaires de leur ville. Ces inquiétudes ont fait l’objet d’un déplacement à l’école élémentaire Pierre de Ronsard à Poissy en Ile de France, par le président de la République, Emmanuel Macron mardi 5 mai. Il a tenu à faire un point sur cette réouverture, en essayant notamment de rassurer sur les mesures prises, en affirmant, que « personne ne serait mis en situation de danger ». Mais est-ce que quelque chose a été mis en place, une aide financière par exemple, pour ces enfants, qui justement ne retourneront pas à l’école ou dont la classe reste tout simplement fermée ? Non, nous rétorquent des parents habitant dans la région de Lens, « c’est à nous de nous arranger ». S’ils font le choix de faire appel à une nourrice par exemple, ils devront payer eux-mêmes tous les frais. Cette réalité est vécue par une assistante maternelle qui souligne, que « certains parents décident de ne pas faire garder leur enfant toute la semaine, car ils ne peuvent pas supporter toutes ces dépenses et ils doivent malheureusement demander de l’aide aux grands-parents pour la garde des enfants, alors qu’il est déconseillé d’avoir des contacts avec ces personnes plus fragiles ! ».

A savoir également, le retour à l’école étant basé sur le volontariat, si après le 11 mai, un parent préfère rester chez lui pour garder son enfant, il continuera à bénéficier du chômage partiel comme l’a précisé la ministre du Travail Muriel Pénicaud, au moins jusqu’au 1er juin où un justificatif de l’école devra alors être fourni à l’employeur pour justifier de l’incapacité de cette dernière à accueillir l’enfant. Les parents non salariés (indépendants, professions libérales…) dont l’activité ne peut être organisée en télétravail, pourront quant à eux, continuer à percevoir une aide financière de l’Etat, jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire, c’est-à-dire le 24 juillet prochain. Un petit bout de solution pour certains qui se disent être au bord de la crise de nerfs avec des journées à rallonge pour une rémunération moindre, à devoir jouer les équilibristes depuis des semaines entre leur job depuis la maison, les « enfants dans les pattes », les nuisances sonores des voisins « qui se sont soudainement découvert des talents de bricoleurs pendant le confinement » soupire Laure depuis son 35 m2 parisien

En bref, que ce soit en France ou en Allemagne, la situation dans laquelle la crise sanitaire du Covid-19 a plongé de nombreuses familles semble inextricable aux yeux de nombreux parents.


Auteures : Chloé Ferrante et Valérie Keyser

 

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