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Hưng Trần peint ses émotions sur des toiles empreintes d’idées tourmentées

À 22 ans, Hưng Trần transforme ses blessures en œuvres d’art. Ce jeune artiste vietnamien, marqué par des épreuves familiales, explore à travers la peinture et la musique des thèmes profonds tels que le deuil, la mémoire et la résilience. Entre thérapie personnelle et quête d’honnêteté, son travail sombre mais sincère aspire à toucher l’universel et à offrir un espace d’expression aux émotions enfouies.

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Hưng Trần chez lui à Hanoï.
Écrit par Guillaume Marchal
Publié le 25 novembre 2024, mis à jour le 26 novembre 2024

 

Le charbon trace les contours de ses traumatismes enfouis, comme autant de cicatrices entre ses côtes. À travers son art, il espère transmettre un message d’ouverture d’esprit et de compréhension mutuelle. La peinture est devenue une véritable thérapie pour le jeune homme, qui a commencé à peindre professionnellement après le décès de sa mère il y a deux ans et l’incarcération de son père pour des problèmes d’addiction. « Ces événements m’ont brisé, mais j’ai compris que je pouvais renaître en extériorisant grâce à l’art », confie Hưng Trần.

 

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L’artiste, qui refuse de peindre des sujets ordinaires, aspire à aller plus loin dans sa démarche. Mais son parcours à l’École des beaux-arts de Hanoï ne s’est pas déroulé comme prévu. « Je peignais partout, même en escaladant des endroits improbables. Mais à cause de ma situation familiale compliquée, j’étais souvent absent, ce qui m’a valu une exclusion », explique-t-il. Malgré cet obstacle, il n’a jamais abandonné la peinture. Ses œuvres ont été exposées à Ngã Artspace et dans plusieurs lieux autour de Hanoï. Polyvalent, il s’illustre également dans la musique, utilisant divers moyens créatifs pour panser les blessures du passé.

 

 

Peindre pour apaiser ses maux

 

« Mes œuvres sont sombres. J’aimerais y ajouter de la lumière, mais je n’y arrive pas », admet-il. Ses créations abordent des thèmes profondément personnels : le harcèlement sexuel, la mort ou encore des moments marquants de son histoire familiale.
« Je me souviens de beaucoup de choses depuis mes trois ans. Ces souvenirs restent gravés en moi. » « J’ai l’impression que beaucoup de gens n’ont pas d’espace pour exprimer ce qu’ils ressentent. Ils n’osent pas par peur du jugement. Même au Vietnam, où il existe des centres d’aide pour les troubles mentaux, les gens hésitent à y aller. Ils minimisent leurs souffrances et se sentent coupables », analyse Hưng Trần.

 

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Après avoir traversé une période d’excès pour tenter de s’automédicamenter, l’art est devenu pour lui la meilleure des thérapies. « Personne ne mérite de vivre des périodes aussi difficiles. Tout le monde a droit à du soutien et à un moyen sain de s’exprimer. » Lors d’une de ses expositions à Royal City, il a vécu un moment marquant avec un visiteur. « On se comprenait sans parler. Les œuvres parlaient pour nous. Ce n’était pas une question de langage, c’était universel. » Pour créer, Hưng Trần s’isole dans sa chambre, entouré de toiles vierges qui peuvent attendre des mois avant d’être peintes. « Avant chaque œuvre, je fais un travail sur moi-même pour retranscrire mes pensées de la manière la plus brute possible. Il faut que je sois honnête avec moi-même », explique-t-il.

 

Un « trop-plein » de couleurs

 

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L'œuvre en question explore la thématique de l'utilisation des couleurs vives dans l'art.

 

Lors d’un voyage à Hô Chi Minh-Ville, l’artiste a été frappé par l’omniprésence des publicités et des lumières vives. « Ces couleurs semblent conçues pour stimuler notre dopamine, pour nous attirer. Mais au final, elles manquent de profondeur, ce ne sont que des flashs. Tout se mélange, et les gens cherchent à être tape-à-l’œil. Moi, je veux être en accord avec ce que je pense vraiment. » Cette réflexion a donné naissance à une de ses œuvres, où il tente de rester fidèle à lui-même.

Fasciné par la nature, il déclare : « Mother Nature est l’un de mes artistes préférés. J’ai étudié la botanique, participé à des camps à la campagne, collecté des plantes et observé leur évolution. Les gens me trouvent bizarre pour ça, mais je m’en fiche. Voir grandir un être vivant, c’est se reconnecter avec la vie. » Sans se préoccuper d’un avenir lointain, Hưng Trần rêve de voyager à l’étranger. « Je n’ai jamais quitté le Vietnam. J’ai envie de m’ouvrir au monde. Chaque jour, j’essaie de rester fidèle à mes convictions et d’être la meilleure version de moi-même. »

 

 

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