Créée en 1979 à l’initiative des maires de Paris et de Québec, l’AIMF regroupe aujourd’hui plus de 350 municipalités sur les cinq continents. Reconnue opérateur officiel de la Francophonie, elle déploie des projets concrets dans les domaines de l’assainissement, de la culture, de l’égalité femmes-hommes ou encore de l’accès à l’eau. À l’occasion d’une tournée canadienne, Frédéric Vallier a partagé avec nous la philosophie et les ambitions d’un réseau qui entend plus que jamais conjuguer Francophonie avec développement local.


Un acte fondateur franco-québécois
C’est au croisement de deux volontés politiques — celle de Jacques Chirac, alors maire de Paris, et de Jean Pelletier, maire de Québec — qu’est née l’AIMF, en 1979. À l’époque, la Francophonie institutionnelle balbutiait encore. Eux ont misé sur la ville. « Ils ont réuni une vingtaine de maires francophones pour créer un espace de dialogue, de solidarité, et surtout d’action », raconte Frédéric Vallier. Une intuition fondatrice qui, 45 ans plus tard, s’est transformée en réseau mondial.

Un opérateur reconnu… et connu pour son efficacité
Devenue opérateur officiel de la Francophonie en 1995, l’AIMF ne s’est pas figée dans la représentation. Elle agit, finance, soutient. « Nous sommes passés d’un espace d’échange à un véritable acteur du développement local », affirme Vallier. Son fonds de coopération permet chaque année de déployer des dizaines de projets sur le terrain, en réponse directe aux besoins des villes membres, qui doivent cofinancer à hauteur d’au moins 20 %. « Rien n’est plaqué d’en haut. Tout part d’une volonté locale. »
Les opérateurs de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) sont des organismes spécifiquement mandatés pour mettre en œuvre, sur le terrain, les grandes orientations et décisions prises par les instances politiques de la Francophonie. Ils traduisent concrètement les politiques, programmes et missions de l’OIF.
Ces opérateurs sont au nombre de quatre :
L’Agence universitaire de la Francophonie (AUF)
TV5MONDE
L’Université Senghor d’Alexandrie
L’Association internationale des maires francophones (AIMF)
Une approche de terrain, pas de vitrine
Pas de plans clefs en main ni de prestataires parachutés. À l’AIMF, on accompagne, on ne remplace pas. « Les projets sont portés par les maires, intégrés dans leur plan de développement, et mis en œuvre par des acteurs locaux », insiste Frédéric Vallier. L’association privilégie les entreprises du cru, les solutions adaptées, les compétences existantes. Résultat : des villes plus fortes, des savoir-faire renforcés, et des impacts durables sur le tissu social et économique.
Des projets qui traversent le temps
Loin des logiques de guichet ou de l’affichage institutionnel, l’AIMF s’inscrit dans la durée. À Libreville, une médiathèque financée dans les années 1990 retrouve aujourd’hui une seconde jeunesse. À Phnom Penh, la requalification de bâtiments patrimoniaux et les premiers chantiers d’assainissement ont ouvert la voie à une nouvelle dynamique urbaine. « Ce que nous avons construit il y a vingt ans vit encore, se transforme, sert à nouveau. C’est cette continuité qui donne du sens à notre action », résume le délégué général.
L’égalité femmes-hommes, plus qu’un axe : une urgence
Partout où elle intervient, l’AIMF porte la voix de l’égalité. Soutien aux femmes élues, accompagnement des victimes de violences, centres de santé périnataux, projets d’autonomisation : l’engagement est constant. « Nous faisons de l’égalité femmes-hommes une priorité stratégique. Pas par posture, mais parce qu’elle change concrètement la vie des communautés », explique Vallier. Une priorité également portée par Anne Hidalgo, maire de Paris et présidente actuelle de l’AIMF.
Le climat au cœur de la ville francophone
Face aux bouleversements climatiques, les villes francophones sont en première ligne. Et souvent mal soutenues. En réponse, l’AIMF a lancé en 2025 une Alliance des villes francophones pour le climat. Objectif : dans un secteur encore très anglophone, produire des ressources et formations en langue française, mais aussi améliorer l'accès des villes à la finance climat. Un enjeu important alors que l'accès direct des collectivités à ces fonds internationaux n'est pas toujours possible. « La Francophonie ne peut pas rester à la marge de ces débats. Il faut que nos villes puissent faire entendre leur voix, avec leurs mots, leurs priorités, leur langue », plaide Frédéric Vallier.

Avec les villes d'Afrique et d'Asie du Sud-Est : soutenir l'innovation territoriale
Si le réseau est mondial, ses ancrages les plus actifs se situent en Afrique et en Asie du Sud-Est. À Siem Reap mais aussi Phnom Penh, Vientiane et Hué, l'AIMF a financé, avec ses partenaires, la construction de centres de traitement des boues qui transforment les déchets en intrants agricoles. À Yaoundé, elle travaille sur des solutions d’assainissement adaptées à l’urbanisation rapide. « Ce sont des territoires où les besoins sont immenses, mais où les villes ont aussi des idées, de l’énergie, et une capacité d’innovation que nous devons accompagner », affirme Vallier.
Une diplomatie discrète mais déterminante
En pleine recomposition géopolitique, l’AIMF joue une carte singulière : celle de la diplomatie des villes. « Nos liens vont au-delà des relations d’État. Ils reposent sur la confiance entre maires, sur des années de coopération. Et ça, ça ne s’efface pas par décret », affirme Frédéric Vallier.
Exemple parlant : dans la région des Grands Lacs, en dépit de la crise entre les Etats, la Plateforme des autorités locales soutenue dès l'origine par l'AIMF reste un espace de dialogue et permet aux Maires de se coordonner pour régler des problèmes concrets. Et ainsi faciliter la poursuite du commerce transfrontalier, essentiel à la survie économique des femmes commerçantes.
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Une Francophonie des solutions, à inventer ensemble
Ni vitrine, ni machine diplomatique, l’AIMF agit là où se vit la langue française : dans les rues, les écoles, les marchés. À travers ses maires, elle incarne une Francophonie d’action, de solidarité et d’avenir. Mais les défis à venir — crise climatique, migrations urbaines, fractures numériques — nécessitent des alliances nouvelles. Et si les villes francophones devenaient le véritable moteur d’une Francophonie du XXIe siècle ?
Loin d’un réseau symbolique ou purement représentatif, l’AIMF illustre une Francophonie active, concrète, enracinée dans les besoins des villes. Ses 45 ans marquent autant un anniversaire qu’un point de départ : face aux défis du climat, des inégalités et de l’urbanisation rapide, les villes francophones sauront-elles, demain, continuer à inventer ensemble des solutions à hauteur d’habitants ?
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