L’artiste peintre français Bruno Zaid exposera certaines de ses œuvres les 24 et 25 octobre 2020 lors de l’exposition « Tatorte Kunst » à Wiesbaden. Il s’est confié sur son parcours à la rédaction.
Né en 1963 à Nice, Bruno Zaid vit depuis plus de 30 ans à Wiesbaden. Après des études d’histoire de l’art mais aussi de langues et littératures romanes, il poursuit son parcours dans une école de cinéma à Paris. Père de trois grands enfants, Bruno est très créatif et se consacre depuis plusieurs années à la peinture. Entretien.
Lepetitjournal.com/francfort : votre parcours est riche et vous avez plusieurs cordes à votre arc. Au cours des dernières années, alors que vous avez fait des études de lettres et de cinéma, vous avez exposé vos peintures à plusieurs reprises à Wiesbaden, Mayence et Darmstadt. Quand et comment vous êtes-vous tourné vers la peinture ?
Bruno Zaid : la peinture est arrivée un peu par hasard. En 1998 à la naissance de mon fils, j’ai commencé à faire de la peinture murale, des trompe-l’œil. J’avais peur de peindre sur une toile car je ne me considérais pas comme un artiste à l’époque, j’avais peur de l’étiquette d’artiste. Donc je pouvais peindre sur 200 m2 de mur mais pas sur une toile !
A force de montrer mes travaux, pas mal de gens autour de moi m’ont dit que j’étais plutôt un artiste qu’un peintre du dimanche. C’est à ce moment-là, en 2004 plus exactement, que j’ai commencé à peindre sur toile, c’était en 2004. Peindre sur une toile n’était pas évident, je suis allergique à l’essence de térébenthine donc je ne pouvais pas peindre à l’huile, et puis la peinture murale était à l’eau, pas à l’huile. Puis j’ai fini par trouver un produit pour remplacer l’essence de térébenthine. Depuis 2004, j’ai peint environ 80 toiles à l’acrylique ou à l’huile.
Dans vos œuvres on retrouve un format film, le format 16/9. Par ailleurs, depuis environ un an, lorsque vous ne peignez pas, vous travaillez en tant qu’ouvreur et projectionniste au cinéma Caligari de Wiesbaden. Comptez-vous revenir au cinéma un jour en tant que réalisateur ?
Vous allez rire par parce que demain j’ai un tournage ! (au moment de l’interview, ndlr) Je vais réaliser un film de promotion pour une amie qui est peintre, nous allons organiser une expo ensemble, donc on se réunit pour filmer tout ça.
J’écris beaucoup et comme j’ai fait des études de lettres, l’écriture c’est quelque chose qui m’a toujours accompagné. J’écris souvent des textes qui sont en rapport avec mes tableaux. Je trouve d’ailleurs que le cinéma, l’écriture et la peinture se marient bien ensemble. Mais me tourner complètement vers la réalisation de films, je ne suis pas sûr...
Au Caligari, vous avez eu l’occasion de participer à la soirée animée par Daniel Cohn-Bendit pour les 80 ans du célèbre cinéaste allemand Volker Schlöndorff le 5 avril 2019, vous avez également aidé l’actrice française Tatiana Rojo à présenter en allemand le film « Qu’est-ce qu’on a encore fait au bon Dieu ? » aux spectateurs avant sa projection » en salle en avril 2019 également. Avez-vous des anecdotes ?
Concernant Volker Schlöndorff, c’est quelqu’un que j’aime beaucoup. On s’était rencontrés tout à fait par hasard en 1979 quand j’habitais à Cannes avec mon père et mon oncle. On allait régulièrement au festival de Cannes et en 1979, Schlöndorff a eu la Palme d’or pour son film « Le Tambour » (Die Blechtrommel). Nous l’avons croisé dans le hall de l’hôtel par hasard et nous avons échangé quelques mots. Pour ses 80 ans, juste après la soirée au Caligari, il y a eu un buffet dans une petite villa avec quelques invités, dont Daniel Cohn-Bendit, l’acteur Mario Adorf et aussi le compositeur de Schlöndorff, Klaus Doldinger. Durant cette soirée, j’ai demandé à Volker s’il se souvenait d’un jeune garçon rencontré à Cannes 1979. Il m’a répondu dans un français impeccable : « Ah bon c’était toi ! » m’a-t-il dit. J’ai rétorqué « Vous vous souvenez ? », il a alors rétorqué « Ah non pas du tout ! » (Rires.).
Quant à Tatiana Rojo, je me souviens d’une jeune femme très sympa, très jolie et très coquette. Elle m’a tutoyé tout de suite. Je l’ai interrogée en français et si vous voulez une anecdote, lorsque je lui posais les questions en français, elle me répondait dans un anglais approximatif, mais au lieu de traduire en allemand, je me suis aperçu que je traduisais en français au public ! Alors le public a rigolé. Aussi, à un moment donné, elle a commencé à parler de sexualité dans son pays, alors j’ai dit : « écoutez les enfants, ça, je ne vais pas le traduire ! » (Rires.).
Vous donnez également des cours de manga à la médiathèque Mauritius de Wiesbaden. Comment l’idée d’enseigner les mangas vous est-elle venue ?
En fait quand j’ai fait mes études de lettres, j’ai appris le japonais pendant 3 ans. Je n’ai rien retenu mais j’ai toujours adoré la culture japonaise et tout ce qui attrait au Japon. Jusqu’à il y a quelques années, même si je sais peindre, je ne pensais pas savoir dessiner. C’est lorsque j’ai été choisi pour faire les dessins d’un livre pour enfants que je l’ai su. Pour mes peintures, je me servais de la mise au carreau puisque je ne savais pas dessiner. Mais quand je me suis rendu compte que je savais dessiner et comme j’aime beaucoup le dessin, la BD, les comics et les mangas, j’ai parlé de tout cela avec une amie. J’avais envie de donner des cours de mangas et quelques temps après, nous avons monté un « Manga Workshop » où nous avons invité des gamins. C’est comme ça que le projet a été lancé il y a 7 ou 8 ans maintenant.
Quand les petits dessinent des modèles, je leur indique les erreurs de traits, la construction d’un personnage manga, je leur explique aussi d’où vient le manga, comment ça fonctionne, ce que ça signifie. Suite à des articles parus dans les journaux locaux et un reportage TV, j’ai été de plus en plus sollicité autour de Wiesbaden et de Mayence. Du coup je donne des cours 3 à 4 fois par mois à différents endroits de la région, pendant les vacances scolaires. Les cours durent 2 h et il faut payer chaque cours individuellement à la séance, il n’y a pas d’abonnement.
Le 30 janvier 2021, vous allez participer au projet « tête à tête » avec l’artiste allemande Mireille Jautz qui va peindre des portraits d’hommes qui ont compté dans sa vie tandis que de votre côté, vous peindrez de portraits de femmes. Comment cela va-t-il se dérouler exactement ?
Mireille Jautz est très connue à Wiesbaden, elle mélange tous les styles, peinture, sculpture, etc. Elle représente surtout des femmes dans ses travaux et moi surtout des hommes parce que je me retrouve dedans. Quand Mireille m’a dit qu’elle voulait faire un portrait de moi et que de mon côté j’en fasse un d’elle, on a extrapolé l’idée.
Il faut savoir que depuis deux ans, je porte ce projet en moi de faire une soixantaine ou une centaine de petits portraits de personnes qui me touchent et qui m’ont accompagné toute ma vie (acteurs, peintres, artistes, écrivains, auteurs, philosophes, mes parents, mes enfants…). Le projet avec Mireille se rapproche donc du mien et nous avons décidé de peindre chacun une vingtaine de petits portraits jusqu’en janvier 2021 où l’exposition aura lieu dans l’atelier de Mireille Jautz. Elle ne peindra que des hommes et moi que des femmes. De mon côté, je compte faire un portrait d’elle en grand et plein de petits portraits en format 20x20 qui se placeraient comme des satellites tout autour. Je les peindrai en noir et blanc et les ferai disparaître sous une couche de peinture plus ou moins blanche selon l’importance de la femme dans ma vie : plus le portrait d’une femme sera sombre, plus elle aura de l’importance, plus il y aura de peinture blanche par-dessus le portrait, moins elle aura d’importance.
Pour l’instant, j’ai fait déjà 3 portraits sur 20 !
Vous allez probablement participer au projet artistique organisé par le « Schlachthof » à Wiesbaden en juin 2021 sur la thématique « Quelle est la part de l’introduction de la machine dans l’homme ? » Pourriez-vous nous dévoiler comment vous envisagez de traiter ce sujet ?
Pour ce projet, je compte peindre le Christ en dimension réelle, voire surdimensionnée. Je voudrais le représenter mi-humain, mi-machine et avec les formes d’un athlète. La société est en pleine évolution, parfois radicale, mais les prophètes etc. n’ont pas changé de forme, ils n’ont pas évolué, et je voudrais imaginer à quoi ressemblerait le Christ aujourd’hui.
A côté de la religion, il y a la science qui est une autre forme de religion. Pour ce projet, je me suis demandé : où va l’homme à l’heure de l’électronique et de l’ordinateur ?Je m’intéresse à la bionique, à la robotique, à la bio-ionique. La bionique c’est le fait de copier la nature pour créer quelque chose, par exemple s’inspirer de la libellule pour inventer l’hélicoptère. La bio-ionique, c’est l’intrusion de la machine dans l’homme et c’est ce qui m’a inspiré pour ce projet.
Depuis une dizaine d’années, j’ai cette idée de réaliser une peinture du Christ grandeur nature. Je suis athée mais intéressé par la religion en général. Je suis spirituel et ça me tenait à cœur d’avoir, à travers cette peinture, une réponse à cette question que je me pose : pourquoi je n’accepte pas la religion ?
Les 24 et 25 octobre 2020, vous allez exposer à Wiesbaden avec plusieurs autres artistes. Le nom de l’exposition « Tatorte Kunst » a-t-il un rapport avec la célèbre série allemande du dimanche ? Pouvez-vous nous en dire plus sur cette expo ?
Les organisateurs ont simplement pris le nom « Tatorte » qui signifie « scènes de crimes », mais cela n’a rien à voir avec la série. Peut-être ont-ils choisi ce nom pour mettre en avant l’idée d’un rapport criminel à l’art ?
Durant ces deux jours, il y a des expositions dans une soixantaine de lieux selon un parcours à suivre pour admirer les œuvres des artistes. Pour voir les œuvres, il faut aller chez les gens, dans les ateliers ou encore dans une cour pour voir l’exposition d’une quarantaine de participants. Pour ma part, je vais exposer des petits tableaux, des portraits et quelques nouvelles toiles dans une église.
L‘exposition « Tatorte Kunst » aura lieu samedi 24 octobre 2020 et dimanche 25 octobre 2020 de 12 h à 18 h dans le Rheingauviertel et à Wiesbaden-centre.
Pour en savoir plus, c’est ici.
Pour découvrir le site de Bruno Zaid, c’est par là.