Notre voisin, l’Arabie Saoudite, nous est méconnu. Et pourtant, ce pays garde des superbes bâtiments, sites et témoignages historiques. Djeddah, notamment sa vieille ville Al Balad avec ses habitations traditionnelles de pierre et de bois, fut un lieu majeur de la découverte de l’Arabie par les occidentaux et particulièrement les français.
C’est précisément pour nous parler de la ville de Djeddah, porte de l’Arabie dès le XVIIe siècle, que Louis Blin, chercheur au CEDEJ, historien, spécialiste du monde arabe et diplomate, sera au Théâtre de l’Alliance Française Dubai le 11 juin pour présenter son nouvel ouvrage «“La découverte de l’Arabie par les Français ». Certains textes de ce livre sont écrits par des grands noms de la littérature, et nous font découvrir cette Arabie, alors lointaine, au XIXe et XXe siècles par le regard des français qui s’y sont aventurés.
Afin d’en savoir plus sur ce nouveau livre écrit en français et qui sera bientôt traduit en arabe, nous avons posé quelques questions à l’auteur.
Louis Blin, vous êtes auteur de nombreux ouvrages sur le Moyen-Orient. Qu’est-ce qui a déclenché l’écriture de cette anthologie ?
J'ai occupé les fonctions de consul général à Djeddah de 2012 à 2015. Comme je suis historien et qu'il suffit de se promener dans la vieille ville pour voir à quel point elle est chargée d'histoire, j'ai organisé une série d'activités culturelles visant à mettre en lumière la contribution française à cette histoire. La fondation de ce Consulat remontant à 1839, je me suis intéressé aux écrits français publiés depuis lors, qui permettent de retracer le passé de la ville et l'histoire du regard français sur Djeddah et l’Arabie.
Pourquoi les voyageurs, les français, plus particulièrement, allaient à Djeddah autrefois?
Djeddah a toujours été une ville cosmopolite et marchande accueillante pour quiconque respecte ces deux traits, un peu comme Dubaï de nos jours ! Mais c'est le pacha d'Egypte Mohammed Ali qui enrôla de nombreux Français dans sa conquête de l'Arabie entamée en 1811, pas seulement des militaires car il entendait appliquer la même méthode que son modèle Bonaparte en Egypte. Voilà pourquoi Djeddah est devenue la porte de l'Arabie pour les Français.
Qui entreprenait le voyage pour l’Orient autrefois ?
Les premiers voyageurs étaient des aventuriers, puis vinrent le temps de la découverte et enfin celui des administrateurs, ces derniers chargés de la surveillance des flux de pèlerins issus des colonies françaises. Ceux-ci débarquaient à Djeddah avant de gagner La Mecque. Dans les années 1930, les plus grands journalistes français rapportèrent des reportages sensationnels de Djeddah.
Le premier Français à s'être aventuré à Djeddah, puis à avoir consigné son récit, fut Pierre-Antoine Monneron en 1793. Son équipée parut tellement étrange au Pacha Ottoman de Djeddah qu'il l'emprisonna pour espionnage ! Monneron s'évada à la nage, au milieu des requins...
Votre livre est publié aux éditions Geuthner, une maison d'édition spécialisée dans les études orientales ?
Geuthner le principal éditeur orientaliste français. On a beaucoup critiqué les diverses expressions de l'orientalisme, mais on se rend compte aujourd'hui des trésors de l'orientalisme français, totalement méconnu en ce qui concerne l'Arabie. Les sources françaises représentent, de loin, le principal corpus pour connaître l'histoire de Djeddah.
Ces textes apportent-ils un éclairage sur la relation actuelle de la France avec l’Arabie Saoudite?
Djeddah et l'Arabie étaient bien mieux connues en France au XIX° siècle que de nos jours. Victor Hugo a consacré à cette ville un de ses poèmes majeurs de La Légende des siècles, oublié de nos jours ! Il nous faut redécouvrir l'Arabie, au delà des préjugés qui en obscurcissent la compréhension.
“La découverte de l’Arabie par les Français” une conférence en français de Louis Blin, suivi d’une séance de dédicaces, le mardi 11 juin à 19h30 au Théâtre Alliance Française Dubai, Oud Metha.
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Louis Blin présentera également son ouvrage le 12 juin à La Sorbonne Abu Dhabi.
Propos recueillis par Anne Cabanel