Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

TATIANA ANTONELLI ABELLA - « J’ai un rêve : un monde sans plastique. Que cela nécessite 20 ou 100 ans, c’est aujourd’hui que l’on doit s’y mettre »

Écrit par Lepetitjournal Dubai
Publié le 16 août 2017, mis à jour le 17 août 2017

Tatiana est la fée verte derrière de nombreuses initiatives visant à promouvoir un Dubai plus proche de la nature et respectueuse de son environnement. C'est la créatrice de l'entreprise sociale Goumbook, des campagnes «Give a Ghaf Tree Planting Program » et « Drop it : Re-think plastic ». La passion de l'écologie chevillée au corps, elle serait capable de convaincre n'importe quel industriel pur et dur de s'engager vers le développement durable. Aujourd'hui sa croisade contre les bouteilles en plastique nous touche : donnons une chance aux océans, et à nos enfants, pour un monde vraiment sans plastique.

Lepetitjournal.com/dubaï : Qu'est-ce qui vous a motivé à mettre sur pied votre société (www.goumbook.com) dédiée à la communauté et au développement durable, dans une mégapole que spontanément on n'associe pas avec l'écologie ? 

Tatiana Antonelli Abella: A l'époque de la naissance de mon second fils, on commençait à voir des étiquettes dans les supermarchés portant la mention « sans BPA », c'est ce qui piqua ma curiosité, je n'avais aucune idée de ce qu'étaient les BPA, ni de pourquoi on devait les éviter. En ouvrant cette petite porte, c'est toute ma vision du monde qui petit à petit s'est modifiée, jusqu'à me faire sentir coupable ? mais comme toutes les mères s'imaginent l'être, pour une raison ou une autre - d'avoir élevé mon premier enfant dans l'inconscience la plus totale !

Tout part donc d'une véritable prise de conscience intime, mais ensuite ? 

Je me suis rendue compte que non seulement ce nouveau mode de vie me passionnait, que j'adorais partager mes trouvailles autour de moi, mais surtout qu'il y avait une vraie demande. C'est donc en toute logique que dès 2009 nous avons mis sur pied avec une amie un premier site centré sur l'écologie et le biologique sous forme de bons plans, bonnes adresses et infos diverses.

C'est le début de l'aventure pour une Dubai plus « verte », vous démarrez pourtant en période de crise, comment avez vous fait pousser malgré tout cette première bouture ?

Paradoxalement le fait d'arriver juste après la crise nous a fait bénéficier d'un climat favorable. Nous n'avions pas de budget, et j'ai pris au pied de la lettre le conseil de Steve Jobs « pick up your phone and ask » (décrochez votre téléphone et allez demander la lune). Les grands Malls en période creuse étaient ravis de se voir proposer des évènements qui leur permettaient de promouvoir un sens communautaire et une conscience écologique, tout en enregistrant des pics de fréquentation significatifs (plus de 1000 personnes la première année et plus de 2500 la seconde). Il faut croire que nous répondions aux besoins d'une population en recherche de sens et d'appartenance : c'est tous ensemble que l'effort porte ses fruits. 

C'est alors que vous lancez la fameuse campagne « Give a Ghaf » (www.giveaghaf.com) pour promouvoir cette forme d'acacia aux multiples vertus, une des rares formes de végétation indigène à pousser en plein désert ? 

J'étais fascinée à chacun de mes voyages dans la région ou de mes journées passées à camper, par cet arbre incroyable capable de pousser tout seul au milieu d'un océan de dunes. Le EWS-WWF (Emirates Wildlife Society en collaboration avec le World Wildife Fund) venait de terminer une campagne d'une année pour accorder au Ghaf le statut d'espèce protégée et en même temps de symbole national des UAE. Au terme de cette campagne nous avons demandé si nous pouvions prendre le relais, et ils ont accepté. Depuis c'est non seulement un moyen important de reforestation, mais un vecteur extraordinaire qui permet vraiment aux habitants des UAE de nouer ou de renouer contact avec les racines ? au sens propre et figuré ? de cette terre, et qui touche toutes les générations à travers un large éventail d'actions (team-building, sorties d'écoles éducatives etc?). 

Après la terre, sauvons la mer ? D'où vient Drop it, votre campagne contre les bouteilles en plastiques ?

C'est une évidence : nous sommes envahis par le plastique, nous en tant qu'êtres humains, et la planète avec nous. Les enjeux environnementaux et de santé publique sont bien plus profonds et de bien plus grande envergure qu'on ne l'imagine. Pourtant, chaque geste compte, et il serait très facile de se diriger vers un monde sans  plastique. Très peu de personnes savent que le plastique est déjà rentré dans la chaine alimentaire: nous mangeons du plastique toutes les fois que nous mangeons du poisson, des fruits de mer ou lorsque nous mettons du sel marin sur nos plats?

Sans aucun plastique ? Et toutes les initiatives visant à fabriquer des objets ou des vêtements en plastiques recyclés ?

Ce sont des projets avec une intention positive, mais il faut bien garder en tête que la fabrication d'une chaussure en plastique recyclé nécessite tout de même de l'énergie, et produit tout de même des déchets, sans compter qu'elle finira tôt ou tard de nouveau dans une décharge : et le cycle recommencera. La solution est dans une prise de conscience collective pour refuser, réduire et recycler le plastique de manière systématique.

Cela semble pourtant une tâche titanesque !

Peut être, mais pas impossible! Il suffit de commencer: par exemple en filtrant l'eau chez soi. L'eau de Dubai fournie par DEWA est parfaitement potable, et il existe tout un panel de filtres adaptés à différents besoins et situations, qui vous permettent de cuisiner, de vous laver et de boire directement l'eau de votre robinet. Cette dernière est tout aussi pure et son goût est tout aussi agréable que n'importe quelle eau en bouteille. Il faut savoir que la plupart des eaux locales sont en effet de l'eau du robinet en bouteille de plastique, et que nous payons jusqu'à 2,000 fois son prix réel ! Il faut bien lire les étiquettes qui écrivent « Pure Drinking Water » au lieu de « Mineral Water ». 

C'est aussi un mythe de penser que l'eau que vous buvez doive contenir un certain nombre de minéraux et être totalement dépourvue de sel. L'eau doit être potable, et vous hydrater, c'est tout. Ce sont les aliments que vous ingérez qui vous fournissent tous les nutriments nécessaires, et le sel que vous ajoutez en excès sur vos plats dont il faudrait limiter la consommation. 

Comme vous l'avez dit vous même, une fois cette porte ouverte vers une vie plus consciente, le sentiment de culpabilité ? ou de responsabilité -est difficile à ignorer, et l'on voudrait mieux faire, mais comment s'y prendre?

Nous sommes là pour vous aider ! Il suffit d'aller sur notre site www.dropit.ae pour y trouver déjà de nombreux conseils, et de nous écrire a dropit@goumbook.com : nous vous conseillerons les fournisseurs de filtres à eau les meilleurs du marché, et les laboratoires indépendants  pour faire tester votre eau et connaître son exacte composition. 

Et si vous voulez en savoir plus, simplement prendre du recul et mieux comprendre ces enjeux, je vous invite à venir profiter d'une occasion fantastique, la projection publique du film-documentaire A Plastic Ocean  le lundi 22 mai au Souk Madinat Theater. La projection (16h30) sera précédée (15h30) d'une discussion passionnante avec des intervenants professionnels du milieu de biologie et de protection marine. Des bons et des cadeaux ?plastic-free' seront distribués. Venez avec vos enfants et pensez à réserver vos places, elles sont gratuites mais limitées ! 

Réservez ici

Propos recueillis par Marie-Jeanne Acquaviva (lepetitjournal.com/dubai) republication du 14 mai 2017

Marie-Jeanne est rédactrice au Petit Journal de Dubaï, et traductrice littéraire.

 

 

 

lepetitjournal.com Dubai
Publié le 16 août 2017, mis à jour le 17 août 2017

Sujets du moment

Flash infos