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Danseuse dans l’âme : Magali Mazzella

Magali MazzellaMagali Mazzella
Écrit par Irène Idrisse
Publié le 6 octobre 2017, mis à jour le 6 janvier 2021

Ancienne danseuse de revue, Magali Mazzella est installé à Mbour où, depuis un an, elle a initié une école de danse. En cette rentrée 2017 elle a encore une fois décidé d’innover, adjoignant aux autres styles déjà proposés, son domaine de prédilection qu’est  la danse classique.   De la flamme olympique à son expérience japonaise et ses joies de danseuses, retour sur le carrière d’une femme pour qui  la danse s’esquisse: « grâce, légèreté, élégance, sourire et don de soi”.

Même quand elle marche on croirait qu’elle danse 

                                                                                                                              ( Charles Baudelaire )

Vous résidez à Saly. Pouvez-vous revenir sur les circonstances qui vous ont fait fouler les terres de Mbour pour la première fois ?

Je réside à Saly depuis plus de sept ans, mais auparavant j’étais venue m’y installer à la fin de ma carrière avec mes enfants. Il fallait que je danse à nouveau, encore une fois sur scène, je suis donc rentré en France, avec mes enfants : mon fils Morgan, qui parlait wolof couramment et ma fille, Jade. Aujourd’hui ils vivent en France. Et moi je vis donc seule à Saly avec mes 2 petits chiens. La première fois que je suis venue c’était en vacances, accompagnée de ma fille Jade qui avait 4 ans. Cependant les premiers à venir furent mes parents il y a 30 ans et ils avaient adoré. À la retraite, ils souhaitaient s’installer ici, malheureusement mon papa décédait peu de temps après. Ma sœur et sa famille sont installés à Saly depuis plus de 20 ans. J’étais venue leur rendre visite 15 jours.

Vos premières impressions ?

J’ai adoré ! Oui j’ai adoré du premier jour où j’ai posé les pieds sur ce sol. Ma tête et mon corps étaient au repos total. Surtout ma tête. Un sentiment de bien-être...

Était ce votre première fois en Afrique ?

Oui, toute première fois. J’étais plutôt en Asie. Ma petite maman m’a toujours parlé de l’Afrique et aurait aimé y faire de l’humanitaire. J’ai été bercée par Racine, Kunta Kinte donc vous pouvez comprendre cet amour pour l’Afrique.

Aviez-vous des à priori ?

Non pas vraiment. Parfois je rage en voiture lorsque je vois tous ces enfants dans la rue. Je voudrais être leur maman. Normal, je suis une maman. Il faudrait instaurer certains principes dès la petite école tels que la propreté, la responsabilité.

Qu’est ce qui vous a le plus étonné ?

La convivialité, les gens vous invitent chez eux sans véritablement vous connaitre, cette hospitalité m’a touché, ému.

Le plus séduit ?

L’accessibilité des gens, leur façon de partager un repas.

Le plus dérouté ?

La non ponctualité (rires) mais on s’y fait à la longue. Sinon pas grand chose ne me déroute. Je m’adapte facilement. C’est mon point fort. Et je respecte le pays où je vis. 

                     Danseuse de revue

Magali Mazella

Pouvez-vous revenir sur votre carrière en tant que danseuse de revue ?

J’avais environ 15 ans et venais de terminer un stage de danse avec des américains professionnels dans les comédies musicales. A la fin de ce stage il fallait préparer un numéro: J’ai trouvé un partenaire et créé ma première chorégraphie en duo sur la chanson de Lisa Minelly : « New York New York ».  Un jour une revue passait dans ma ville et a accepté de nous auditionner pendant leur spectacle. A  la fin de notre danse, tout le public nous a ovationné debout. Ma carrière a débuté ce soir là. J’ai sillonné la France dans tous les sens, ensuite l’Angleterre.  A 17 ans et demi j’ai passé une audition a Paris :  je fus la seule retenue et me voila partie pour le Japon. J’étais sur scène tous les soirs pour 3 spectacles par jour, 7 jours sur 7. J’ai vécu avec des Anglaises et 2 françaises. Le niveau de danse était très élevé et les costumes étaient magnifiques. J’ai sillonné tout le sud du Japon et de la Corée pendant quelques années : j'ai vécu un rêve chaque soir.

Les jeux de Séoul en 1988 ?

Un grand moment, surtout à mon âge : j’avais a peine 18 ans… J’étais descendue dans la rue pour voir passer la flamme olympique. En plus de nos spectacles nous dansions aussi pour le Village Olympique, c’était grandiose surtout lorsqu’on terminait le show avec le french cancan. Je n’étais jamais fatiguée et souvent nous étions invités à des soirées privées: j’ai rencontré Carl Lewis qui me disait que je ressemblais à un ange.  Bien sur, tout était féerique.

Que ressent-on lorsque l’on est à coté de la flamme olympique ? Un sentiment de consécration ? D’euphorie ?

J’étais jeune et je ne sais pas si je réalisais vraiment l’importance de cet événement. J’étais allée voir quelques disciplines mais très peu car nous avions aussi beaucoup de shows à faire. Mais je n’oublierai jamais le Village Olympique: quelle sacrée ambiance !!!

Les différents pays où vous avez dansé et les anecdotes et émotions afférentes ?

J’ai beaucoup dansé en France, en Angleterre, à Saint Martin aux Antilles, et au Japon pendant longtemps, en Corée et en Malaisie. E aujourd’hui au Sénégal mais pas dans la revue. Pas encore. J’ai adoré le Japon, les japonais sont très exigeants. J’ai eu à danser avec 40 degrés de fièvre. Une fois à Nagasaki, il pleuvait tellement que les gens ne sont pas venus au show et malgré cela nous avons dû faire les 3 spectacles sans public. J’ai aimé chaque pays et avec toutes mes anecdotes, je pourrais vous écrire un livre.

Même blessés, nous devions assurer le show

 

Quel genre de sacrifice l’exercice assidu de la danse requière t-il ?

L’éloignement de ma famille fut difficile, la première fois je n’avais que 17 ans et je n’ai pas vu ma famille durant 3 ans. Et il nous était interdit de mettre beaucoup de photos sur les murs de nos chambres. Nos courriers étaient lus après les spectacles. De plus, même blessés, nous devions assurer le show.

A un moment donné, la souffrance ne supplante t elle pas le plaisir ?

Non jamais. Il n’y avait pas de souffrance lorsque j’étais sur scène. Dès que je dansais je ne sentais plus rien sauf le Plaisir. La souffrance était celle d’après le spectacle lorsque les lumières s’éteignaient et le show se terminait. Certains soirs nous nous sentions terriblement seuls. Mais on ne peut pas tout avoir dans la vie.

Comment la passion de la danse a t’elle germé en vous ?

Très jeune, je dansais tout le temps. Je faisais des spectacles et mon public était mes poupées. Un jour mon grand père m’a fait découvrir à la télévision la revue, et j’ai alors su quel métier j’allais faire. Je n’ai jamais douté.

Votre blondeur a-t-elle été  un avantage ?

Non pas du tout.  Vous savez on danse toujours les cheveux tirés et nous portions des coiffes et des perruques. Mais toutes les danseuses de revue étaient blondes. Donc en Asie, on nous reconnaissait très vite.

                Danse : un univers impitoyable ?

Magali Mazella

Tel dans le film black Swann, avez-vous eu des professeurs au sadisme avéré ? Si oui, comment celui-ci s’est-il manifesté ?

Je ne sais pas si on peut appeler cela du sadisme, quelque part, oui, peut-être, mais cela fait partie de notre métier, surtout à ce niveau. On tombe sur sa propre sueur ? Et bien on se relève et on recommence. Et j’en passe.  Travail, discipline, rigueur.

Le microcosme de la danse est-il violent ?

Un peu oui. Lorsque j’étais à l’étranger, oui, avec les mêmes filles 24 heure sur 24, mais en France, non.

La danse est synonyme de grâce, de légèreté, d´élégance, de sourire et de don de soi  

Votre école de danse a un an. Qu’est ce qui a provoqué le déclic ? Aviez-vous ressenti un manque ?

Oui mon école a un an. Lorsque le club Padel Sénégal a ouvert ses portes je suis allée jouer quelques fois avec une amie et un jour Jordi Rovira, le fondateur du Padel au Sénégal, m’a dit que je jouais comme une ballerine. L’amie avec qui j’étais lui a expliqué que c’est mon métier et de là il m’a proposé une salle pour faire une école de danse. Aujourd’hui nous sommes une véritable famille, il m’a donné cette magnifique chance,  je ne l’oublierai jamais.

Quel genre d’activités y proposez-vous ?

Danse classique et Modern, Jazz, Yoga, Remise en forme, Pilate, Aqua-gym. Aujourd’hui  je pratique un sport tout en douceur et basé sur le bien-être.

        Saly et danse classique

Pourquoi le choix en cette rentrée d’adjoindre à votre répertoire de  la danse classique ?

C’est la base je pense. Mes élèves sont toutes petites. Je leur apprends la discipline, le maintien et les bonnes positions et cela leur reste imprimé à vie. Ce sont mes princesses.

Est-ce une offensive visant à contrer la déferlante du tout twerk qui semble tout emporter sur son passage : même la très british actrice Helen Mirren s’y est mise.

Pour moi la danse classique c’est la base. En faire un peu ne fait pas de mal et savoir tout danser c’est bien aussi, même le twerk.

Croyez vous que le monde ait besoin de grâce ?

Oui. De plus en plus. Il faudrait que le monde danse.

Croyez-vous la danse à même de le lui apporter ?

La danse est synonyme de grâce, de légèreté, d´élégance, de sourires et de don de soi.

Votre mère est infirmière. Qu’a-t-elle dit lorsque petite, vous lui avez annoncé vouloir faire de la danse votre métier ? Au regard de son propre travail, n’a-t-elle pas trouvé votre choix futile ?

De toute façon, je n’allais laisser ce choix à personne. C’était une évidence. Personne n’aurait pu m’arrêter. Ma petite maman a toujours été fière de moi. À mes tous premiers spectacles, ma maman organisait une séance l´après-midi à son hôpital et je dansais pour toutes ces personnes âgées. Même lorsque je suis revenue de ma tournée en Asie, je suis revenue danser à l’hôpital. Voulez-vous que je vous dise ? Que je sois sur les plus grandes scènes du monde, aux jeux olympiques ou dans un hôpital, je danse avec autant de bonheur et de plaisir.

Vous vous occupez d’une chorale.  Pouvez-vous nous en toucher deux mots ?

Oui. C’est tout nouveau pour moi. Je ne suis pas que danseuse, je suis aussi chorégraphe et metteur en scène. J’ai mis en scène des spectacles de Disney, des opérettes, des revues, mais pour la chorale c’est le première fois. Cela se passe à Nianing, la salle de répétition est un terrain de basket face à la mer. Il y a presque 50 enfants et un spectacle est prévu pour Noël. Actuellement nous sommes en répétition alors je ne souhaite pas en dire d’avantage mais cela promet d’être superbe.

Que représente cette chorale pour vous ?

Beaucoup. Déjà ce ne sont que des enfants et pour eux c’est vraiment nouveau. Aujourd’hui on raconte une histoire, leur histoire. Je les aime beaucoup, et c’est réciproque.

Selon vous, est-il possible d’être danseuse sans aimer la musique ?

Ça je ne le pense pas. C’est la musique qui fait onduler votre corps, le mien, c’est certain.

Quel est votre genre de musique préféré, vos airs préférés ?

J’aime à peu près tous les genres de musique, certains à petites doses. En danse la plus belle musique, c’est le Boléro de Ravel, je la trouve tellement puissante. Voyez-vous, quand j’entends de la musique, je danse et parfois je chante. Mais chez moi.

Sur quel genre de musique ne pourriez-vous absolument pas danser ?

Le rap. Je laisse les professionnels de cette danse pour ça.

Votre mère a t’elle joué un grand rôle dans votre approche du monde ?

Oui. Elle m’a donné l’envie de tout, elle m’a donné sa force le jour où elle m’a dit qu’elle aurait aimé partir et faire de l’humanitaire. Ça commence par ça pour moi l’approche du monde : L’humanité.

Danseuse un jour danseuse toujours ?

Oui, toujours. Aujourd’hui encore, un Bonheur. Si un jour une revue pouvait se réaliser au Sénégal, je serai partante. Danseuse dans l’âme. Merci à ce si beau pays que j’aime tant.  L’Afrique est à  tout jamais dans mon coeur.

( Padel Saly : 78 424 11 44)

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