Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--

OUSMANE MBAYE - Le métal qui vous gagne

Ousmane-MbayeOusmane-Mbaye
Stéphane Tourné
Écrit par Lepetitjournal Dakar
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 18 février 2021

 

 

Figure contemporaine du design africain, le sénégalais Ousmane Mbaye a ouvert samedi son showroom à Dakar. L'occasion de revenir sur le fabuleux parcours de cet homme de fer.

Non loin du marché artisanal de Soumbédioune, à l'angle d'une rue, une grande façade noire dotée d'une enseigne jaune attire les foules. C'est samedi, il est 15 heures et déjà on peut apercevoir par les grandes baies vitrées des dizaines de personnes dans l'antre de la pièce. À l'intérieur ? Un mur blanc immaculé permet de mettre en avant  tables, assises et luminaires métalliques aux couleurs chaleureuses. Au coeur de cette agitation, un homme : Ousmane Mbaye, le designer qui inaugure aujourd'hui son nouveau showroom.

"En l'espace de quelques heures, pas moins de 300 personnes sont venus visiter mon nouvel espace de vente. C'est une réelle fierté", se réjouit Ousmane Mbaye. L'homme d'une quarantaine d'année a son atelier à quelques mètres mais "n'avait pas d'espace pour exposer ses créations". Le manque est comblé. C'est un succès. Les confortables assises sont prises d'assauts par les visiteurs. Les commodes façonnées à partir de fûts d'essence  intriguent. Les petites mains ouvrent les portes, caressent la surface, analysent l'intérieur. Futur réseau artistique, le showroom permettra à d'autres créateurs de venir prendre place au côté des oeuvres du designer. Il est comme ça Ousmane, dans le partage. 

"Apprendre en faisant"

Pour ce designer en herbe, rien n'était écrit à l'avance. Né non loin, dans la Médina à Dakar, il quitte tôt l'école pour travailler aux côtés de son père, frigoriste. Le jeune homme apprend à souder, scier et se familiarise avec les matériaux tel que le métal. "Ce métier m'a permis d'arriver là où j'en suis aujourd'hui", déclare-t-il. Encouragé par ses proches, à 30 ans Ousmane effectue un virage à 180°. Il prend le risque de quitter l'entreprise familiale pour se consacrer à sa passion : la création. "J'ai d'abord réalisé de petits objets tel que des lampes de chambre. Quand je les regarde aujourd'hui cela m'amuse mais je ne peux m'empêcher de penser à la philosophie Bauhaus qui dit : Apprendre en faisant."    

Son matériau de prédilection ? Le métal. L'artiste conçoit des meubles d'intérieur et extérieur pour le grand public et les professionnels. Dans son atelier, une dizaine d'artisans s'activent. On découpe. On soude. On peint. Mais surtout on vieillit le métal. "User un objet, c'est pour moi la touche finale", confie-t-il. Le matériel est commandé et fait sur mesure. Le designer met un point d'honneur à souligner que sa matière première n'est pas de la récupération. "Le continent africain n'est pas celui de la récupération. Il ne faut pas enfermer les pays en voie de développement dans cet univers artistique". Sa signature ? Des meubles très linéaires et une touche pop colorée pour le "pep's".

Pourtant l'étiquette du designer africain "spécialiste de la récup", Ousmane l'a porté. Conséquence : une clientèle avant tout occidentale. "Les expatriés et touristes s'intéressaient à mon art parce qu'ils pensaient que c'était de la récupération mais c'est aussi la raison pour laquelle je n'intéressais pas les africains qui sont plus à la recherche du luxe", explique l'artiste. Depuis cette prise de conscience, l'homme peaufine toujours plus ses oeuvres et attire désormais la clientèle africaine.

 "Je suis citoyen sénégalais mais j'aime le monde"

Depuis ses débuts, l'artiste a participé à de nombreux salons dans le monde entier mais n'a en aucun cas envie de s'expatrier du continent africain. Pourtant, c'est bien au-delà des frontières que son regard est stimulé. "Mon influence ? Je la trouve partout, au détour d'une rue à Dakar ou lors de mes voyages. Il suffit d'une rencontre, d'un objet. Je suis citoyen sénégalais mais j'aime le monde et mon art aussi", indique Ousmane. 

Savoir-fer

À peine une étape supplémentaire vient-elle d'être franchie qu'Ousmane a déjà de nouveaux projets en tête. Le dernier en date ? La création d'une école de design. "Je n'ai pas reçu de formation artistique. J'ai appris des techniques au travers de mon métier de technicien en froid. Je ne sais même pas dessiner. Je trouve qu'il y a un réel manque au Sénégal dans le domaine du design. Je souhaite créer une école où on apprendrait à travailler les matières", explique le designer avant d'ajouter, "je ne dis pas que désormais ma vie ne tourne qu'autour du design, je pensais même changer de métier  à 40 ans et devenir cuisinier. Mais il y a une demande et je dois y répondre".  

 

Plus d'informations : C'est par ici.

 

Pauline Autin (www.lepetitjournal.com/dakar)  25 mai 2017

 

 

Flash infos

    Pensez aussi à découvrir nos autres éditions