Le recyclage, nouveau « sujet » artistique ? À Copenhague oui, évidemment, puisqu’il vient alimenter et nourrir l'art de manière très large. Si l’on s’en réfère à Thomas Dambo et sa ribambelle de célèbres personnages élaborés à partir de chutes de bois et qui forment comme un jeu de piste à travers la ville, on saisit tout de suite le message. « Mes trolls sont faits à partir de déchets, parce que j’adore les déchets ! Mon but est d’éduquer les gens, leur démonter que les déchets ont une connotation positive, et que les ordures ne sont pas le problème mais plutôt la solution car avec, on peut faire de belles et grandes choses ! On peut créer un bel avenir, on doit associer les déchets au fun, à la beauté, à la richesse ! ». Une vision que partage Laurette Tribert, française expatriée depuis plusieurs années à Copenhague. Employée par Amager Ressource Center, qui gère les déchèteries de la capitale, elle organise des visites de l’incinérateur et présente son travail. Passionnée par la thématique du réemploi, qu’elle envisage comme une réelle possibilité artistique, elle nourrit un véritable intérêt pour la récupération d’objets qu’elle glane de-ci de-là. Des trésors qui lui permettent d’alimenter sa créativité, et de performer en tant qu’artiste. On vous explique !
The Magic of Things
« C’est dans les déchèteries que j'ai trouvé l’inspiration. Un objet ou un matériau va me donner une idée, et je vais lui offrir une seconde vie à travers l’art », explique Laurette. « Je veux transmettre cette approche. Regarder ce qui nous entoure avec un œil curieux, un œil qui va au-delà de la fonction d'un objet, afin de le réinventer ».
Vision qui a donné lieu à la création d’une performance autour du réemploi, The Magic of Things, où l’artiste convie un public, de tout âge, à adopter un regard neuf sur les objets pour leur offrir potentiellement une autre fonction.
« C’est en étudiant l'histoire de l'art, que j’ai découvert l’assemblage et les fameuses boîtes de Joseph Cornell ».
Des objets de différentes matières, formes et tailles, allant du métal au bois en passant par le plastique ou la céramique, du siège à l’étagère en passant par le tapis ou une fausse plante, que Laurette dispose sur un espace dédié où elle invite le public à entrer. À ce moment précis, le jeu débute, elle se transforme en magicienne qui leur faire voir les objets d'une autre façon.
« Je trouve intéressant d’avoir une réflexion autour des objets, sur la façon dont on les consomme et on les jette, sur leur existence et usage avant de les retrouver devant nous. Tu prends par exemple un verre, ça peut être un verre fabriqué en série de manière industrielle, ou un verre qui a été soufflé et a une autre valeur, il y a une histoire derrière, et souvent, on n'a plus le temps ou on ne prête plus cas à cette histoire parce qu'on est dans la consommation pure et simple. Donc, mon rôle, c'est de redonner aux objets toute leur dimension invisible ».
In fine, les visiteurs deviennent acteurs et sont sollicités afin de créer une composition à partir des objets.
« Cela génère pas mal d'échanges très sympathiques, le public est curieux en général et ravi qu’on fasse appel à son imagination. Le jeu stimule les sens et fait rejaillir notre âme d'enfant ! Les arts créatifs sont encore trop souvent destinés aux enfants, mais en réalité, les adultes adhèrent complètement ».
S’amuser pour mieux prendre conscience
Il ne faut pas s’y tromper, l’enthousiasme généré par cette approche ludique amène en réalité vers de nouvelles voies d'action, et on ne peut que s’en féliciter.
« Sous couvert du jeu et du moment de plaisir, il y a la prise de conscience qui est stimulante. Saisir à quel point les objets font partie de nous, de notre environnement, prêter un regard qu'on n'a plus le temps de porter sur les objets, se remémorer un moment lié à notre enfance, une exposition vue par le passé, un pays qu'on a visité, en résumé, se reconnecter tout en réfléchissant sur notre manière de consommer ».
Cette initiative créative va en effet dans le sens d’une tendance au Danemark, où l’accent est mis sur le réemploi, avec des déchèteries qui prennent la forme de boutiques de toutes tailles, omniprésentes dans les quartiers, et ouvertes à tous, dans lesquelles les habitants s’arrêtent sans hésiter pour chiner, et qui sont entrées dans les habitudes de consommation.
« Aborder le sujet environnemental sous un angle optimiste permet de redonner de l’espoir et de donner envie de changer ses habitudes, sans contraintes, mais par pur plaisir ».
Prochain rendez-vous !
Ce vendredi 23 août, entre 15h et 20h, dans le jardin de la maison de la culture de Karens Minde dans le quartier de Sydhavn, Laurette proposera une animation ludique et interactive baptisée « Pretty little things », une véritable invitation à créer et à jouer avec une sélection de petits objets et matériaux de récupération hauts en couleur. C’est gratuit, tout public, organisé en collaboration avec un collectif d'artistes locaux, Karavane 908 (en charge de la scénographie et de la programmation musicale), et c’est un excellent prétexte pour bien démarrer le week-end !
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Compte Instagram de Laurette Tribert : laurettetribert