Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

La pollution à Chiang Mai pousse les nomades digitaux vers Koh Phangan

nomades digitaux a chiang mainomades digitaux a chiang mai
courtoisie Draper Startup House - Avec la pollution, de nombreux nomades digitaux préfèrent s'échapper de Chiang Mai pour aller dans le sud de la Thaïlande
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 8 février 2021, mis à jour le 28 avril 2021

Comme chaque année, de nombreux nomades digitaux et résidents fuient Chiang Mai pour le sud de la Thaïlande afin de respirer un air plus frais, et Koh Phangan est une destination privilégiée.

La question revient dans presque toutes les conversations parmi les nomades numériques : “Où partez-vous pour la saison des brûlis?” Il n’est pas surprenant de réaliser que sur un groupe de dix personnes travaillant en ligne, entre six et huit d’entre elles prévoient de partir pour Koh Phangan dans les prochains jours ou semaines pour s’échapper quelque temps de Chiang Mai et profiter d’une qualité de l’air nettement plus respirable. Le phénomène n’a rien de nouveau, mais il est bien plus visible en l’absence de touristes.

“La situation à Koh Phangan reste encore très calme en comparaison à la période pré-Covid-19”, témoigne Quentin Seynaeve propriétaire de Seetanu Resort et du restaurant Signature Sea food & Grill à Koh Phangan. “Je constate néanmoins qu’il y a un peu plus de monde sur l’île, on voit que l’offre pour les nomades digitaux augmente, il y a des ateliers, des points de rencontre, des espaces de travail. En ce moment, il n’y a plus que ça, des travailleurs en ligne, et c’est très bien parce que maintenant ce sont eux qui nous font vivre”, souligne le Belge.

Selon une étude réalisée par Big7Travel pour classer les 50 meilleures villes pour les nomades digitaux, Chiang Mai se classe en cinquième position après Tallinn, Tbilissi, Belgrade et Bali tandis que Bangkok prend la 36ème place. On trouve parmi eux des programmeurs, des graphistes, des professeurs de langues, des spécialistes en marketing ou en e-commerce. Pour beaucoup, Chiang Mai est l’une des destinations incontournables depuis 6-7 ans, en particulier à la belle saison entre novembre et février. 

FIDÈLES LECTEURS ET LECTRICES
Si vous souhaitez recevoir 

Lepetitjournal.com Chiang Mai
directement dans votre messagerie, abonnez-vous ici, c’est gratuit !

Pour autant, à partir du mois de février ou mars, beaucoup de ces nomades ou expatriés digitaux quittent Chiang Mai à cause de la pollution et des problèmes de santé qui peuvent en découler. C’est ainsi qu’Éléonore, coach de vie et artiste vocale prévoit de quitter Chiang Mai au mois de mars : “Je pars à cause de la (non) qualité de l’air et, comme je dois enregistrer ma voix tous les jours et que j’ai de l’asthme, cela devient compliqué.” 

Jackie Blue, thérapeute, évoque aussi des problèmes physiques gênants après avoir fait l’expérience pour la première fois de la pollution à Chiang Mai durant le confinement entre mars et juin 2020. “L’année dernière, je sentais mes yeux qui brûlaient, j’ai eu une infection à l'œil qui ne cessait de revenir et je n’arrêtais pas de tousser. Là, je viens de partir pour Krabi et je pense y rester trois mois”, commente la Péruvienne. 

Un sondage réalisé par le corps consulaire de Chiang Mai sur la problématique de la qualité de l’air à Chiang Mai révèle que pour 52% des répondants la pollution de l’air est la principale raison qui pourrait les faire quitter Chiang Mai. L’étude ajoutait que les entreprises font également face à un taux d’absentéisme plus important pour des infections respiratoires durant la période des fumées entre février et avril tandis que les hôtels connaissent un nombre plus important d’annulations. Les hôteliers craignent aussi que cette mauvaise réputation ne colle à la peau de Chiang Mai de manière durable.

Lire l’article : Pour 52% d’expats à Chiang Mai, la pollution serait le motif de départ

Koh Phangan, une île qui à la cote 

Parmi les destinations régulièrement citées lors des conversations dans les espaces de travail partagés ou les cafés de Chiang Mai, Koh Phangan est l’île qui attire le plus de suffrages en raison de ses plages, son ambiance, sa communauté et des infrastructures en place pour les accueillir. L’île dispose en effet de plusieurs espaces de télétravail, de nombreux ateliers en tout genre y sont régulièrement organisés, que ce soit pour une séance de yoga ou pour en apprendre plus sur les crypto-monnaies. Des atouts qui ont fait la réputation de l’île depuis plusieurs années. Elle se classe d'ailleurs généralement en mars et avril dans le top 10 des destinations sur Nomadlist.com, une plateforme qui indique presque en temps réel où se trouvent les plus grandes communautés de nomades numériques dans le monde.

En l’absence de touristes, un autre atout incite certaines personnes à partir pour Koh Phangan où de nombreux hôtels proposent des prix défiant toute concurrence. 

“Beaucoup de resorts font des prix au mois qui coûtent ce que normalement il faudrait débourser pour une semaine!” commente Pascale, professeure de français en ligne. La quadra s'apprête à partir le 21 février pour une période de deux mois : “Je pars à cause de la pollution et de la saison chaude qui arrive. L’année dernière, durant le pire de la saison des brûlis, je restais chez moi avec les fenêtres fermées et le purificateur d’air qui tournait à fond. Cette année, j’ai décidé d’aller à Koh Phangan, j’y étais pour Noël et j’ai réalisé qu’il y avait de bonnes opportunités au niveau des logements à cause de l’absence de touristes”.

Lily Bruns, directrice de Draper Startup House, un espace de coworking à Chiang Mai, partira à Koh Phangan en mars pour les prix, mais aussi pour observer ce qui peut être fait en termes d’investissements. “En ce moment, à cause du Covid-19, il est possible de louer des villas sur la plage qu’on n’aurait jamais pu avoir en temps normal à des prix imbattables! Il est possible de louer une villa pour 8.000 bahts par mois au lieu de 25.000 bahts. Koh Phangan attire de nombreux ‘digital nomads’ parce qu’on y retrouve une ambiance et une communauté très similaire à celle de Chiang Mai”, relate l’Américano-Thaïlandaise. 

"Profiter du sud de la Thaïlande sans touristes"

Pour Éléonore, Koh Phangan offre aussi l’avantage d’y retrouver des amis. “Apparement tout n’est pas fermé à Koh Phangan et puis nous avons la chance de pouvoir profiter du sud de la Thaïlande sans touristes!”, ajoute la Française. 

Du côté des hôteliers, l’arrivée de ces personnes est de bon augure alors que l’île souffre de l’absence de touristes depuis bientôt un an en raison de la crise du Covid-19 du manière générale et aussi des restrictions sur le voyage en vigueur dans le royaume, notamment la quarantaine obligatoire. En 2020, l’île de Koh Phangan a accueilli environ 10% seulement des quelque 1,5 million de visiteurs venus en 2019. 

Après plusieurs mois sombres, Quentin Seynaeve annonce avec joie que son hôtel est actuellement complet. “Nous avons toujours une politique de prix très agressive, avec des prix divisés par 5!” Avec l’arrivée de ces nomades, l’hôtelier constate aussi certains changements dans les habitudes et les exigences de ses clients. Aujourd’hui, il lui est régulièrement demandé d’envoyer les informations sur la rapidité de sa connexion Internet avant de faire une réservation tandis que d’autres demandent à ne pas être dérangés à certaines heures de la journée parce qu’ils enseignent en ligne. 

La présence de ces jeunes travailleurs permet à Koh Phangan de s’en sortir un petit peu mieux que sa voisine Koh Samui. “Koh Phangan survit différemment, elle continue de tourner grâce aux locaux, aux expatriés et aux nomades digitaux, c’est ce qui maintient l’équilibre économique”, commente Alexandre Caporali, consul honoraire de France dans la province de Surat Thani. “Cette communauté de nomades n’est pas nouvelle et aujourd’hui, on voit qu’elle offre une alternative pour l’île pour pérenniser son économie, pour changer son image associée à la fête et à la full-moon party et lui donner un côté plus jeune, plus dynamique, plus tournée vers les technologies. Cette crise va amener du positif et Koh Phangan peut clairement changer et offrir un visage plus avant-gardiste”, ajoute celui qui est également directeur de l'école française Jungle Samui . 

Pour autant, si les soirées de pleines lunes ne rythment plus le calendrier de l’île, l’esprit de fête n’a pas disparu. Le 26 janvier, les autorités ont dû interrompre une soirée organisée dans un bar de l’île. Au total, 109 clients dont 89 étrangers ont été arrêtés et condamnés à payer une amende de 4.000 bahts pour violation des restrictions mises en place pour lutter contre la deuxième vague de coronavirus. Ils ont également été condamnés chacun à un mois de prison avec sursis pendant un an.

Chiang Mai, ville déserte ?

Si certains partent pour le sud pour profiter d’un air pur, ils sont encore nombreux à rester à Chiang Mai.

“En ce moment, nous avons encore pas mal de monde à Draper Startup House, et je vois même encore de nouvelles têtes arriver. Je pense qu’on ne peut pas encore parler d’une baisse de fréquentation, peut-être plus tard dans la saison”, confie Lily Bruns. 

Avec l’apparition du Covid-19 au mois de mars 2020, la fermeture des frontières et l’absence de liaisons aériennes vers certains pays, de nombreux nomades des temps modernes ont dû revoir leurs envies de voyages à la baisse et s’installer pour une plus longue période. 

Becki Adams et son compagnon ont décidé de partir juste deux semaines en vacances à Koh Phangan au mois de mars. “Nous avons la chance de ne pas souffrir de problèmes de santé spécifiques à cause de la pollution. Je pense que lorsqu’on vit à Chiang Mai, on ne peut pas toujours partir pour une longue période, surtout avec le Covid-19, nous avons vraiment commencé à nous installer ici, nous avons une maison, un chat, des plantes, désormais nous prévoyons nos vacances en mars pour respirer au moins pour deux semaines”. 

Pour certains, la deuxième vague de coronavirus qui a touché la Thaïlande et les nouvelles restrictions pour lutter contre l’épidémie n’invite pas à prendre de décision trop longtemps à l’avance. “Je partirais peut-être, mais plus en mode ‘dernière minute’, je veux d’abord voir comment évoluent les risques liés au coronavirus, je ne veux pas me retrouver coincée dans le sud”, justifie July, professeure d’anglais en ligne. 

Flash infos