Patrick Renard : “Le consulat accorde une grande importance aux besoins des Français”

Quel est le rôle du consul général de France en Argentine ? 

Notre consulat est compétent pour l'Argentine, le Paraguay et pour les questions de nationalité et de l’état civil en Uruguay. En Argentine, notre rôle est multiple. Nous gérons tout d’abord toutes les formalités administratives de nos compatriotes : documents d’identité, enregistrement, inscription sur les listes, mais aussi actes d’état civil (naissance, mariage, décès, PACS) et demandes de nationalité. La présence française est historiquement très importante puisqu’on estime que plus d’un million d’argentins ont au moins une ascendance française. Aujourd’hui, la communauté française enregistrée est limitée à 12.000 personnes, même si nous estimons que les détenteurs de nationalité française représentent le double du chiffre des inscrits. Nous tenons à préciser que la formalité d’inscription au registre des Français de l’Etranger ne constitue pas une obligation, mais elle nous permet de pouvoir informer et prévenir la communauté française de tout danger ou problème qui surviendrait sur le territoire argentin.

Le Consulat possède également un service social qui accompagne les Français en difficulté. Il offre notamment la possibilité aux familles françaises, qui scolarisent leurs enfants dans les établissements franco-argentins, d’obtenir une bourse de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.

Les questions de sécurité sont au cœur de nos préoccupations. À Buenos Aires, nous avons bâti un plan de sécurité en divisant la ville en plus de vingt îlots avec à leur tête un responsable nommé chef d’îlot, fonction complètement bénévole. En région, nous bénéficions d’un réseau très important de consuls honoraires qui sont le relais de proximité de la communauté française et le contact privilégié des touristes de passage qui, pour moitié, sont des routards qui sillonnent l’Amérique du Sud pendant plusieurs mois. Nous avons un rôle de prévention en conseillant les voyageurs sur les endroits à éviter où les vols sont les plus fréquents. 

Le Consulat possède également un service social qui accompagne les Français en difficulté. Il offre notamment la possibilité aux familles françaises, qui scolarisent leurs enfants dans les établissements franco-argentins, d’obtenir une bourse de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger. Les retraités et les personnes souffrant d’un handicap peuvent également faire appel au consulat pour les aider financièrement. Le service social intervient en cas de problème sanitaire grave ou d’un accident qui se produirait en Argentine. 

Enfin, le consulat est également compétent pour toutes les questions liées aux migrations d’Argentins en France qui nécessitent un visa de longue durée. Le programme vacances-travail constitue à lui seul la moitié des visas délivrés chaque année. Il permet à des jeunes de 18 à 35 ans d’aller en France et de pouvoir y travailler pendant une année complète. Par ailleurs, nous constatons une augmentation substantielle des demandes de visas de travail étant donné la situation économique en Argentine. À l’inverse, le nombre de visas étudiants attribués est en diminution car les conditions économiques ne sont pas favorables pour un étudiant argentin qui doit faire face à un coût de la vie élevé.

L’Argentine est-elle un pays attractif pour les Français ? 

L’Argentine n’est plus autant attractive qu’elle ne l’a été. Pour les expatriés employés par de grandes entreprises, la situation reflète une tendance mondiale : le nombre d'expatriés diminue, car la main-d'œuvre locale, moins coûteuse mais hautement qualifiée, prend davantage le relais. Les postes de direction, à l'exception de quelques multinationales du CAC 40, sont désormais occupés par des Argentins. Pour les expatriés entrepreneurs ou ceux travaillant dans des PME, à moins qu'ils ne puissent mener leurs activités en relation directe avec la France, les conditions deviennent de plus en plus complexes, ce qui se traduit par une diminution de leur nombre. Heureusement, la Chambre de commerce franco-argentine et Business France accompagnent nos concitoyens dans ces domaines. Face à l’augmentation des prix et à la dégradation de la situation économique, les retours vers la France semblent se multiplier. Nous restons donc vigilants, rencontrons des économistes et mobilisons quatre personnes à plein temps pour traiter des aides sociales et financières. 

Le tourisme reste un secteur clé en Argentine, attirant jusqu’à 150.000 visiteurs français chaque année.

 

Parallèlement à cette évolution, le tourisme reste un secteur clé en Argentine, attirant jusqu’à 150.000 visiteurs français chaque année. Nous observons un véritable engouement pour les paysages de la  Patagonie, avec des destinations prisées comme El Calafate, Ushuaia ou Puerto Madryn. Les provinces de Salta et de Jujuy au nord-ouest deviennent également des choix de prédilection, tout comme les chutes d'Iguazu. Buenos Aires n’est finalement plus qu’une ville de passage. 

Quels ont été les principaux enjeux que vous avez relevés depuis votre arrivée ? 

Le consulat accorde une grande importance aux besoins des Français en Argentine. Ces dernières années, notre service social a apporté son soutien et son aide dans de nombreux aspects de la vie de nos expatriés. Cette année, nous avons formulé une demande d'augmentation du budget alloué aux bourses scolaires. Nous attendons avec impatience une réponse à cette demande qui nous permettrait d’alléger les charges financières de certaines familles dans le besoin.

Malgré l'investissement initial de nombreuses entreprises françaises sur le territoire, nous observons également une baisse considérable du nombre d’expatriés français en Argentine. L’immigration a connu un large essor entre 1870 et 1920, mais les nouveaux arrivants sont rares et reflètent davantage une immigration de rencontre. Aujourd’hui, deux-tiers des citoyens français en Argentine ne parlent plus notre langue, et la tendance semble s’accroître. Les opportunités d’apprendre le français s’amenuisent, et l’étudier dans les écoles publiques en dehors de la province de Buenos Aires est rare.

L'année 2023 s'est également achevée avec l'élection présidentielle de Javier Milei, laissant certains postes de direction vacants. Malgré cela, la majorité de l'administration demeure stable, et nous sommes ravis de voir nos relations intactes. Le consulat n’a de contact qu’avec le ministère des Relations extérieures et avec ses homologues. Il revient à l’ambassade et à notre gouvernement d’entretenir des contacts directs avec le président argentin. Il est à noter que le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères Stéphane Séjourné s’est récemment rendu à Buenos Aires.

Quels sont les enjeux pour 2024 ? 

Cette année, nous devrons être attentifs à plusieurs événements importants. En juin 2024, nous prêterons une attention particulière aux élections européennes. Deux bureaux de vote seront installés, l’un au lycée franco-argentin Mermoz, l'autre à l'ambassade de France à Buenos Aires. La mobilisation des Français vivant en Argentine est un défi majeur. Lors des précédentes élections présidentielles, seulement 21 % des inscrits sur les listes électorales ont participé, tandis que ce chiffre était de 15 % pour les élections législatives, et de 7 % pour les élections européennes.

Enfin, nous avons des responsabilités concernant les Jeux olympiques de Paris 2024. Notre mission consiste à délivrer des visas spécifiques pour faciliter la venue des délégations étrangères lors de cet événement sportif exceptionnel. En parallèle, l'Institut culturel met en œuvre de nombreux événements contribuant à la “diplomatie sportive”, en collaboration avec l'ambassade de France et avec le Comité olympique argentin.