

Précurseur dans les années 90 d'une nouvelle forme de tourisme, Rio de Janeiro a montré l'exemple au reste du monde en développant un tourisme un peu particulier: la visite des favelas. Ces zones de non droit qui bordent une des villes les plus visitées au monde se sont transformées petit à petit en parcours touristiques
Ces pratiques suscitent de fortes controverses et dans ce climat délétère, est-il avouable que certains tours puissent avoir un intérêt? Ce que les anglophones appellent le Slum Tourism déchaîne la fureur de certains "c'est du pur voyeurisme", "c'est scandaleux d'aller photographier la misère des favelas". Mais cette forme de tourisme a aussi ses défenseurs, ceux qui montrent un intérêt non caché à découvrir une autre réalité, une envie de comprendre sans assouvir qu'une simple curiosité? et ceux qui expliquent les bénéfices pour la population locale par le développement de son artisanat, de ses spécificités et par l'argent que ces tours peuvent draîner dans la communauté? Comment choisir lorsque les avis sont partagés, l'opinion divisée? Un sujet délicat qui mérite d'être exploré avant de se lancer dans l'aventure.
Comment choisir ?
A Rio, plus d'une dizaine d'agences proposent de tels tours. Mêmes les guides privés peuvent vous organiser ce type de circuits si vous le souhaitez. Les favelas tours ne font plus exception. Or il y a manière et manière de le faire. Les circuits sont en effet différents, le mode de transport varie d'une agence à l'autre, l'approche est tout autre selon la formule choisie. Les agences dites classiques proposent par exemple des parcours du type "Corcovado, Foresta da Tijuca, Favela Tour", visite guidée de 4 heures qui amène ses clients de la même façon, au pied du Corcovado que dans les rues étroites de la Rocinha. D'autres plus "aventureuses" vendent des "Favelas et Jungle Hike": transport en 4x4 ou en moto taxi, chemin de traverse sur le Morro de Babilonia par exemple et visite de la favela entre autres distractions touristiques. Certaines agences vont plus loin encore dans le goût du risque et du vécu. Elles proposent d'emmener ses candidats dans des bals funks, des "favelas party" moyennant quelques trentaines de dollars. Et puis enfin il y a celles qui ne proposent que les "Favelas Tour" celles qui ont une seule et unique mission, de vous expliquer et faire connaître la réalité des favelas. C'est ce que le Petitjournal.com de Rio a choisi pour sa première expérience.
Une formule intéressante
En nous adressant à Marcelo Armstrong, fondateur de "Favela Tour", nous avons choisi celui qui a été le premier à lancer au début des années 1990 ce type d'excursion. A cette époque, les favelas étaient davantage encore coupées du reste de la ville et nul n'osait facilement s'y aventurer. L'idée, bien que motivée par une approche touristique n'était donc pas uniquement de s'adresser aux seuls touristes mais à tous ceux qui vivaient autour des favelas sans jamais oser en franchir la limite. L'objectif ultime étant d'en changer la réputation. C'est en accord avec les communautés locales de la Rocinha comme de Vila Canoas, que "Favela Tour" a commencé son travail. Aujourd'hui fortement concurrencé par de multiples offres, le "Favela Tour" reste une formule intéressante pour faire connaissance avec cette réalité de Rio et déclencher chez certains des vocations ou une simple prise de conscience.
Outre les points de vues imprenables que nous découvrons depuis la favela de la Rocinha, de Babilonia ou Dona Marta et les méandres inextricables des ruelles qui sinuent entre les constructions en briques superposées les unes aux autres, la visite des favelas livre également des explications pertinentes sur le mode de vie de ses habitants. L'arrêt devant des stands d'artisanats, la visite d'une école ou d'une garderie donnent l'occasion d'aborder le modèle économique de ces tours. Le passage devant des installations publiques (hôpital, immeubles d'habitations, centre sportif, dispensaires, Bope et UPPS?) éclaire la politique publique menée depuis plusieurs années dans ces zones défavorisées. L'observation urbanistique du lieu (réseau d'électricité, égouts?) laisse imaginer les conditions de vie locales et toutes les combines possibles pour vivre décemment! Enfin les anecdotes ne manquent pas pour illustrer ce que peut être la vie quotidienne de milliers de carioca qui vivent dans ces zones périphériques et subissent le diktat des trafiquants et autres mafias qui s'attribuent le pouvoir de manière abusive.
En vérité, sans tomber dans le cliché à tout va, une telle visite peut bousculer les idées préconçues.
Caroline Pousset Bougère (www.lepetitjournal.com - Brésil pour Buenos Aires) mardi 23 août 2011
Pour toute information, visitez le site www.favelatour.com.br





















