Alors que le Queensland se prépare à accueillir le Festival mondial de la Science durant tout le mois de mars, lepetitjournal.com est allé à la rencontre de scientifiques français exerçant leur métier en Australie.
Voici le premier portrait de la série, celui de Nicolas Soro, doctorant en ingénierie mécanique, ingénierie biomédicale et ingénierie des matériaux. Nous vous racontons son parcours et son travail à l’Université du Queensland (UQ). Nous l’avons rencontré sur le campus de St Lucia de à Brisbane.
De Nancy à l’Australie
Originaire de Lorraine, Nicolas Soro, 26 ans, a grandi et effectué toute sa scolarité à Nancy. En 2014, il part en voyage et foule pour la première fois le sol australien sur lequel il restera 3 mois. De retour en France, il doit réaliser un stage de fin d’étude pour valider son cursus à l’ESSTIN (École Supérieure des Sciences et Technologies de l'Ingénieur) de Nancy - devenue Polytech Nancy en 2017.
Pourquoi alors ne pas retourner en Australie ? Il décroche ainsi un stage de 6 mois à l’Université du Queensland (UQ) à Brisbane où il travaillera dans le département de recherche ‘’ingénierie mécanique et industrielle’’. A l’issue de ce stage, ses supérieurs australiens l’incitent à demander une bourse de recherche pour poursuivre un doctorat (PhD) à UQ.
Sans trop y croire, Nicolas remplit le dossier de candidature.
Il rentre en France, reçoit son diplôme d’ingénieur et se lance dans la vie active. A sa grande surprise, il apprend quelques mois plus tard que sa demande de financement pour effectuer sa thèse a été acceptée. Retourner en Australie, l’opportunité est trop belle ! En 2016, le lorrain s’installe à nouveau à Brisbane, mais cette fois-ci pour 3 ans, minimum.
Un sujet de recherche passionnant
La thèse de Nicolas concerne la fabrication de métaux poreux pour les applications biomédicales. En d’autres termes, Nicolas travaille à l’amélioration des propriétés mécaniques des matériaux qui constituent les implants biomédicaux.
La fonction d’un implant biomédical en métal est le plus souvent de remplacer ou réparer un os. De nos jours, le recours aux implants biomédicaux explose. En cause : l'obésité, la traumatologie urbaine, les loisirs à risque, et surtout le vieillissement de la population.
La compatibilité de l’implant avec le corps est alors un facteur clé pour que l’implant reste le plus longtemps possible dans le corps sans créer de problèmes. Une mauvaise compatibilité de l’implant avec les tissus l’entourant peut générer des irritations des structures environnantes, des inflammations, voir des descellements (perte de stabilité entre l’implant et l’os) qui nécessitent des reprises chirurgicales souvent inconfortables et coûteuses.
L’objectif du travail de Nicolas est d’utiliser les nouvelles technologies telles que l’impression 3D pour fabriquer de nouveaux alliages métalliques plus performants.
Réalisée par Nicolas, la vidéo ci-dessous donne un bref aperçu de ces problèmes et de la manière dont il travaille à l'optimisation des implants dans leur conception, leur fabrication et la sélection des matériaux.
Le goût des sciences et de l’enseignement
Alors qu’il était en filière Scientifique au lycée, Nicolas nous explique que son goût pour les sciences est finalement venu plus tard.
« Je n’étais pas très bon élève en 1ère, puis j’ai décidé de tout faire pour m’améliorer. Je me disais qu’il le fallait si je voulais faire quelque chose qui me plaisait après le bac ».
Son bac S en poche, il passe le concours GEIPEI-Polytech (le concours d’entrée en école d’Ingénieur post-bac). Ce n’est alors qu’en intégrant l’ESSTIN qu’il a pris goût aux matières scientifiques.
Aujourd’hui la conception et la fabrication mécanique font partie de son quotidien, que ce soit pour ses travaux de recherche ou pour les cours magistraux qu’il dispense aux élèves de 2ème année de licence.
Pour son projet de thèse, il fait de la recherche expérimentale et utilise ses connaissances en mécanique et calcul numérique. D’un côté, la partie expérimentale consiste à tester les propriétés mécaniques de nouvelles structures poreuses sur des machines de compression. De l’autre côté, la partie numérique lui permet de mieux comprendre les phénomènes de déformations associés grâce aux codes de calculs disponibles sur ordinateur.
En attendant d’avoir une imprimante 3D à UQ pour pouvoir fabriquer ses propres échantillons, il collabore avec l’Université Monash de Melbourne mais aussi avec l’ENSAM (École Nationale Supérieure des Arts et Métiers) de Bordeaux qui lui fabriquent ses échantillons métalliques qu’il a conçus numériquement. L’ENSAM est spécialisée en fatigue (au sens mécanique du terme) et s’avère être un partenaire intéressant pour son projet, d’autant plus que cela lui a donné l’occasion de se rendre quelques semaines en France pour réaliser des tests sur place.
Il publie régulièrement les résultats de ses recherches, ce qui lui permet d’étoffer le contenu de son rapport de thèse plus facilement.
En parallèle de son travail de chercheur, il donne un cours magistral en ‘mechanical design and manufacturing’ (conception et fabrication mécanique) en amphithéâtre devant 240 étudiants en 2ème année à UQ. Il assure également le tutorat de groupes de 50 à 60 étudiants qui préparent leur projet de fin de semestre.
« Donner un cours, c’est beaucoup de travail de préparation, mais c’est tellement gratifiant »
Être chercheur et vivre en Australie
Ce qui a le plus surpris Nicolas en travaillant à UQ, c’est la liberté qu’il lui a été donnée, à la fois pour gérer son temps mais aussi pour définir ses tâches. « Il a fallu que je détermine moi-même le problème qu’il fallait résoudre et identifier le manque dans les solutions existantes » . Même s’il n’a finalement pas travaillé en France, il pense que le poids de la hiérarchie est peut-être plus important en France qu’en Australie où son chef s’adresse à lui avec un franc ‘Hi, mate !’
Après sa thèse, qu’il va peut-être prolonger de quelques mois, Nicolas aimerait bien rester en Australie. Il aime l’ambiance qu’il y règne et les relations entre les gens qu’il trouve bienveillants et moins critiques qu’en France.
En dehors du travail, Nicolas est passionné de musique et de vidéographie. Sur son temps libre, il réalise des vidéos en tant que freelance pour des événements tels que des concerts ou des mariages.
Son site : https://www.nsrproduction.com/
Une fois son travail de recherche à l’université terminé, il pense avoir à choisir entre rester dans le monde académique ou se diriger vers le monde industriel. Pour l’instant, c’est surtout l’enseignement qui le retiendrait à UQ.