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Save The Needy, une association au côté des lépreux

LepreLepre
Écrit par Mathieu Guilleminot
Publié le 24 janvier 2018, mis à jour le 24 janvier 2018

En Birmanie, la lèpre est une maladie tabou. Officiellement disparue depuis 2003, elle reste cependant toujours active. Bénéficiant de peu de soin et d'attention, les malades sont rejetés et discriminés. Il existe pourtant des personnes voulant faire évoluer les mentalités. L'ONG Save The Needy en fait partie.

L'histoire commence en 2003. Ce jour-là Soe Amy Kyaw est accostée par un ami collectant des dons pour aider la maison de lépreux du village de Mhawbi dans l’état Mon. Curieuse, elle  l'accompagne. C'est  une révélation. La vue de ces malades, aux nombreux stigmates, parfois mutilés, vivant dans le dénuement le plus total, la bouleverse profondément. C'est cette journée là qu'est née l'idée d'une association pour leur venir en aide. L'ONG Save The Needy est ainsi créée. Le gouvernement de l'époque décide de les subventionner par une donation de 300 kyats. Somme qui peut être expliquée par le fait que la lèpre est officiellement inexistante en Birmanie. Une conséquence plus générale de ce décret officiel est que la Birmanie ne dispose d'aucun programme pour venir en aide aux lépreux. On compte pourtant près de 3000 nouveaux cas chaque année dans le pays, en particulier dans les régions montagneuses. En théorie, n'importe qui peut être atteint de la lèpre. Pourtant la plupart des malades sont des personnes pauvres se retrouvant majoritairement rejetés par la société et leur famille. C'est là qu'intervient Save the Needy. 

Au départ, l'ONG s'est concentrée sur le village de Mhawbi, situé au nord de Yangon, à seulement quelques heures de route. Une collecte de dons y est organisée, récoltant près de 2000 dollars américains, somme réunie grâce à cinq donateurs. Cela a permis d'augmenter les effectifs de l'association et d'atteindre 50 personnes à la fin de l'année 2003. L'argent était, dans un premier temps, utilisé pour acheter des vêtements, de la nourriture et des médicaments, directement redistribués dans le village. Ces interventions favorisèrent de nombreuses interactions avec les villageois et créèrent ainsi des liens permettant de mieux cibler les besoins et de préparer efficacement les prochaines interventions de l'ONG. L'association organisa également de nombreuses activités pour divertir les malades, comme des sessions de chant, des ateliers de danse, de théâtre, ainsi que des spectacles de marionnettes. Le but était de les faire se sentir humains, de leur redonner confiance en eux. Puis l'ONG, profitant des progrès techniques, créa sa page Facebook afin d'informer le public sur la situation des lépreux et ses initiatives. La création de cette page permit de nouvelles collectes de dons et attira de nouveaux volontaires. Cette aide financière et humaine favorisa le développement de nouveaux projets. Les bâtiments du village de Mhawbi furent rénovés et améliorés, tandis que l'ONG commença à s'implanter dans d'autres villages. A Ye Na Thaw, près de Mandalay, l'association fit un don pour aider l'hôpital chrétien local, datant de l'époque coloniale. Dans le village d'Ayardam, l'ONG discuta avec les villageois qui gardaient les lépreux à l'écart de la communauté. Save The Needy y entreprit la construction d'un petit hôpital, d'une capacité de vingt personnes, et demanda l'aide d'autres centres hospitaliers de la région pour obtenir le matériel adéquat. 

Le travail acharné de Save The Needy commençait à porter ses fruits. Le village de Mhawbi sortait lentement de la pauvreté et la population birmane locale commençait à changer son point de vue sur les lépreux. L'association se concentra alors sur des communautés de plus en plus éloignées de Yangon, tout en continuant à rendre visite aux habitants du village, une fois par trimestre environ. Récemment, c'est le village de Ho Khtike, situé à plus de 21 heures de bus de Yangon, qui a attiré leur attention. C'est une colonie de lépreux tenue par des moines, dans une zone difficile d'accès. Cette communauté tente de survivre grâce à de très maigres donations mais aussi par la vente de fleurs cultivées par les malades mais dont personne ne veut. L'association s’efforce de leur venir en aide, en emmenant les malades à l'hôpital ou faire des achats, pour se divertir. Elle a également aidé à améliorer le système de purification de l'eau, afin de la rendre potable. La colonie, avant complètement isolée du monde, a retrouvé des couleurs. Les améliorations ont été telles que des représentants du gouvernement s'y sont rendus afin de promettre des aides. De plus le peuple birman commence à réaliser qu'il est de son devoir d'aider les lépreux. On constate d'ailleurs certaines évolutions positives. Le maire de Ho Khtike a ainsi promis de veiller sur la colonie de lépreux et de construire un nouvel accès routier. Le ministère de la santé a également pris conscience du problème et fourni une aide financière à l'association. Malgré cette aide la plupart des dons restent réalisés par des donateurs privés. Save The Needy se démarque également par son mode de gestion. Elle fonctionne grâce à une page Facebook qui réunie ses nombreux membres. L’utilisation des réseaux sociaux leur permet de prendre des décisions de manière participative et inclusive du plus grand nombre mais permet également à l'association de communiquer de manière efficace sur ses actions. 

Cependant l'association sait qu'elle n'est pas une solution viable pour le futur, elle ne veut pas faire en sorte que les lépreux se reposent trop sur elle. Selon Soe Amy Kyaw, la fondatrice de l'ONG, la véritable solution serait de trouver du travail aux lépreux. C'est pour cela que Save The Needy a développé des partenariats, notamment avec une ONG japonaise, qui a donné des machines à coudre au village de Mhawbi, pour pouvoir apprendre un métier aux lépreux. Des partenariats ont également été conclus avec des entreprises locales, pour vendre cette production. Malgré tout, les bénéfices sont encore très minces, les clients hésitent à acheter des produits confectionnés par des lépreux. Preuve, s'il en était besoin, qu'il reste du travail pour changer les mentalités. Pour favoriser ce changement, l'ONG a également lancé un programme pour éduquer les jeunes enfants de Mhawbi quant à la maladie. L'association espère ainsi non seulement donner un nouveau souffle au village mais également renforcer l'espoir ténu qu'elle a initié dans le cœur des lépreux.

 

 

 

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Publié le 24 janvier 2018, mis à jour le 24 janvier 2018

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