Jeudi dernier, le vol direct arrivant de Wuhan s’est posé tranquillement à l’aéroport de Yangon, signe que pour l’instant les autorités birmanes ne s’affolent pas face à une possible arrivée dans le pays du coronavirus 2019-nCoV qui sévit en Chine, et dont le foyer de départ est justement cette ville de Wuhan, qui compte quelque 19 millions d’habitants et se situent dans la province du Hubei, dans le centre de la Chine. Ce vol était pourtant le dernier pour quelque semaine car depuis le 24 janvier la compagnie China Eastern a suspendu ses liaisons entre Wuhan et la Birmanie, au moins jusqu’au 29 février, à la demande du gouvernement chinois.
Côté birman en revanche, il n’est actuellement imposé aucune restriction aux déplacements, que ce soit pour entrer ou pour sortir du pays. Les autorités ne restent pas inactives et des scanners de température ainsi que des tests de dépistage, utilisés en cas de doute, sont installés et à disposition dans l’aéroport international de Yangon. C’est une équipe du ministère de la Santé et des Sports qui supervise ces opérations de prévention et de surveillance, et des mesures similaires doivent être mises en place sous peu à l’aéroport de Mandalay, qui dessert lui aussi des vols en provenance de Chine.
Les autorités sanitaires birmanes conservent à juste titre leur sang-froid car l’Organisation mondiale de la santé (OMS) se refuse pour l’instant à considérer cette nouvelle maladie comme une urgence de santé publique de portée internationale. L’organisation n’a d’ailleurs pas encore évalué le niveau de risque lié à l’épidémie, par manque de données fiables et significatives en l’état des connaissances du moment. Pour l’OMS, il est établi que ce coronavirus – virus « à couronne », ainsi dénommé car sous le microscope électronique ces virus ressemblent un peu à la couronne solaire – joliment nommé 2019-nCoV est transmissible d’humain à humain, ce qui n’est bien sûr pas une bonne nouvelle, et qu’il trouve sa source dans un animal qui a infecté un être humain. Cet animal non identifié – reptile ? Mammifère ? Poisson ? Tout est possible…- se trouvait lui sur un marché de Wuhan restait ouvert jusqu’au 31 décembre 2019 et aujourd’hui fermé sine die. Mais s’agit-il d’un seul animal ou de plusieurs ? A-t-il était débité en morceau, chacun susceptible d’être infectieux ? Combien de personnes ont pu être touchées ? Autant de questions auxquelles l’OMS ne peut encore répondre.
L’organisation s’est donc refusée à susciter l’inquiétude même si elle recommande des précautions et qu’elle a approuvé « les mesures fortes prises par le gouvernement chinois », à savoir, selon les endroits, le confinement de certaines villes, Wuhan en premier lieu, le port obligatoire de masque respiratoire, la suspension des voyages organisés en Chine et à l’étranger à compter d’aujourd’hui, l’annulation de certains transports publics, l’extension des périodes de vacances – ce sont actuellement les fêtes de nouvel an chinois – et de manière générale la limitation des déplacements afin de limiter le risque de propagation du coronavirus. L’annulation des vols de China Eastern s’inscrit dans cette logique.
Des malades ont été diagnostiqués dans presque toute la Chine et dans plusieurs autres pays d’Asie (Japon, Corée du Sud, Thaïlande) ou du monde (Etats-Unis, France aussi avec trois cas officiels à ce jour). Le nombre officiel de décès reste faible – une soixantaine en Chine – et au Japon comme en Thaïlande des personnes hospitalisées sont aujourd’hui guéries. Selon l’OMS, « les coronavirus forment une famille comptant un grand nombre de virus qui peuvent provoquer des maladies très diverses chez l’homme, allant du rhume banal au SRAS, et qui causent également un certain nombre de maladies chez l’animal ». Et si nous nous référons à ce SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) qui a terrifié l’Asie en son temps (2002-2003), son bilan officiel final se monte à plus de 8 000 malades et environ 800 morts, soit moins que l’épidémie annuelle de grippe classique en France chaque année.
Si cela ne veut surtout pas dire qu’il faut prendre 2019-nCoV à la légère, cela corrobore en revanche l’attitude raisonnable des autorités birmanes pour l’instant. Peut-être faudra-t-il bientôt suivre l’exemple de China Eastern et fermer certaines ou toutes la dizaine de lignes qui relient la Birmanie à la Chine, mais nous n’en sommes pas encore là. Pour l’instant, la principale mesure à suivre consiste à aller consulter rapidement en cas de fièvre et de problèmes pulmonaires. Le 2019-nCoV a été séquencé et des tests de diagnostic sont donc désormais disponibles. Les exemples japonais et thaïlandais prouvent que la guérison est possible si la maladie est prise à temps et bien soignée.