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L’atelier Moretti, ou le Bar du Strand

Francesco Moretti The Strand BirmanieFrancesco Moretti The Strand Birmanie
Écrit par Inès de Belsunce
Publié le 4 février 2018, mis à jour le 4 février 2018

Installez-vous sur les chaises hautes, et accoudez-vous au bar du Strand. La flamme des bougies tourbillonne légèrement entre les losanges des verres en Crystal, et leur lumière flatte les visages… Dans les fûts en bois miniatures situés en face de vous se trouvent des cocktails préparés spécialement par et pour l’hôtel : "Negroni, Vieux Cave, Boulevardière, et Cuban Manhattan". Des cocktails âgés, à la personnalité marquée par le temps passé dans le bois. On est ici dans une cuisine artisanale, dans le respect des produits, entourés de pots en verres remplis de saveurs et arômes, connues et inconnues: roses, cannelle, fleurs bleues et jaunes, inconnues et multicolores, agrumes séchés. Un laboratoire d’alchimie.

L’alcool bien préparé est un art, et l’artiste porte toujours le même tablier: un pantalon de costume et un gilet, bleuté ou bordeaux. Regardez-le préparer attentivement un verre, qui sera bu en quelques minutes. La concentration est marquée sur son visage. Chaque cocktail compte. Il faut couper, doser, mélanger, décorer. Francesco Moretti pioche dans les bocaux, assaisonne, saupoudre. Ses clients le scrutent, il les décrit d’ailleurs "curieux de ce qu’il fait". Lorsque je fais un Gin & Tonic, je mélange juste du Gin et du Tonic. Pas lui. Il n’est pas comme nous. Lui "exprime sa personnalité à travers un verre". Vous consommez, il crée. Dans l’hôtel qu’il définit comme "le plus connu du monde", au sein de ce bar qu’il a conçu, le "Sarkies", il a installé son atelier.

Dans son espace de travail, il y a le monde. Francesco Moretti a voyagé partout et cela se sent. Sa formation commence à 18 ans à Monte Carlo, entre l’Italie et la France, dans le monde des casinos, des courses de voitures, de la nuit et de l’argent. Apres la Méditerranée, ce sera l’Amérique, l’atlantique, et le bling de Miami. Autre style, autres saveurs, art déco et sable blanc. Il passera ensuite à Paris, reprendre un zeste d’intemporalité dans le monument historique qu’est l’hôtel de La Paiva, 25 avenue des Champs Elysées. L’Europe durera huit ans, puis enfin suivra l’Asie : le sulfureux et select Bar Rouge à Shanghai ; CHAR, et le VOGUE lounge à Bangkok, le menant jusqu’au Strand, ici, à Yangon.

Chaque ville visitée imprime sa marque, son ambiance et ses goûts. C’est à Paris que la mixologie commence, l’apprentissage de la science du mélange. Paris, qui semble être pour Francesco une ville à double visage, à qui il assigne comme identité alcoolique à la fois le respectable champagne et la scandaleuse absinthe. Toujours des alcools de fête. Et si Yangon était un verre ? Il répond "Pegu club", boisson pour climats chauds, anglaise et acidulée, légère. Le cocktail préféré de Francesco ? "Le Negroni", italien, simple. 

La dernière fois, je suis arrivée à midi au Strand, pour le brunch. Je suis partie à 21h, du bar. A chaque fois c’est pareil, je suis bloquée dans un espace-temps indéfinissable où les verres vont et viennent, délicieux et délicats cocktails. Etre barman ne se limite pas à la qualité des cocktails, il faut un univers, donner des histoires aux cocktails, soigner ses gestes. Rapide, discret, Francesco Moretti vous sert sans faire de bruit, dans le cadre feutré du Sarkies, barman attentif, qui vous fait déposer les cocktails devant vous, du coin de l’œil, veillant à ce que le personnel ne perturbe pas votre conversation. Sarkies est intimiste pour cet homme qui dit que s’il était une ville, il serait New York. Alors s’il était un bar, le sien, en dehors du Strand, à quoi ressemblerait l’Atelier Moretti?

Atelier mixologie du Strand (30 à 50 USD par personne, de 8 à 16 personnes par atelier)
Infos: barmanager@hotelthestrand.com

picture ines
Publié le 4 février 2018, mis à jour le 4 février 2018

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