« Aujourd’hui, le thanaka traditionnel birman est de plus en plus imité par d’autres pays, qui se mettent à le porter comme nous et prétendent qu’il provient de leur culture », regrettait récemment U Kyaw Lwin Oo, directeur général du ministère des Affaires religieuses et de la Culture, lors d’une conférence tenue à Monywa, dans le centre du pays et l’un des hauts lieux de production de cette pâte végétale typiquement birmane qu’est le thanaka. Le ministère souhaite donc faire inscrire cet arbre, la manière de préparer la pâte et la poudre qui en sont extraites et les nombreux usages qui en sont fait sur la liste du patrimoine immatériel de l’humanité de l’Unesco.
Il est de fait que le thanaka, une pâte ou poudre jaune pâle obtenue de l’arbre éponyme, est le cosmétique par excellence de la Birmanie, où les femmes se décorent le visage avec tous les matins et où beaucoup d’hommes le portent aussi. Voir ce produit revendiquer par d’autres est pour beaucoup une insulte à la culture birmane, un enjeu de taille dans un pays aussi profondément nationaliste. U Kyaw Lwin Oo se réjouit donc que les efforts de son administration depuis maintenant « 7 ou 8 ans » soient sur le point de porter leurs fruits, avec un dossier presque complet, à déposer au plus tard en mars 2020. « Nous prévoyons des meetings et des ateliers d’information autour de cette candidature », explique-t-il.
Le ministère liste actuellement tous les lieux de patrimoine exceptionnels aux yeux des Birmans, comme des pagodes ou de vieux bâtiments, dans l’espoir de les faire inscrire sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité, et il souhaite dans le même temps faire reconnaître sur la liste du patrimoine immatériel des pratiques culturelles comme certaines traditions d’art de la marionnettes ou l’usage du thanaka. « Certes, l’arbre est un bien tangible mais la manière dont nous préparons son bois, l’usage que nous faisons de sa poudre, tout cela est purement culturel et appartient à la Birmanie. Les traces de l’utilisation du thanaka dans notre pays remonte au 11ème siècle de notre ère », affirme U Kyaw Lwin Oo.
Pour l’instant, le ministère recense la bagatelle de 2 502 héritages culturels immatériels en Birmanie, et il a bon espoir d’en faire reconnaître plusieurs au niveau planétaire grâce à l’Unesco. « Il y a plus de 200 pays dans le monde, dont 198 sont membres de l’Unesco, pour un total de 508 héritages culturels immatériels, relatifs à 122 pays », analyse U Kyaw Lwin Oo, « or, la Birmanie n’a encore à ce jour fait enregistrer aucune de ses pratiques culturelles alors que 33 en provenance de sept pays de l’Asie du Sud-Est sont reconnues par l’Unesco. L’année dernière, le massage thaïlandais traditionnel a été ajoute à cette liste. Pourquoi pas le thanaka l’année prochaine ? ».