Le 27 septembre dernier, lors d’une cérémonie marquant la fondation de la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND) aujourd’hui au pouvoir, le Dr Myo Nyunt a déclaré qu’il existait aujourd’hui un risque réel que le scrutin législatif de 2020 ne puisse pas se tenir dans certaines zones du pays à cause de questions de sécurité. Selon ce porte-parole de la LND, il n’y aura « des élections dans les régions où se tiennent actuellement des combats que si la paix peut être rétablie dans ces lieux, et ces questions de sécurité sont très dépendantes des opinions de la Tatmadaw (le nom local de l’armée birmane ».
Des combats sont encore en cours dans les états de Shan, de Kachin et d’Arakan, de nombreux villages ont été détruits, et le nombre de déplacés se chiffre en dizaines de milliers, probablement largement plus d’une centaine de milliers. Dans ces conditions, la mise à jour de listes électorales crédibles est déjà une gageure puisqu’elle nécessite que les électeurs soient domiciliés et détenteurs de carte nationale d’enregistrement. Preuve que la possibilité de voter ne va pas de soi partout en Birmanie, plusieurs sièges de députés sont aujourd’hui vacants, dû aux décès de certains élus ou aux promotions d’autres au poste de ministres régionaux, et n’ont pu être pourvus faute des conditions de sérénité nécessaires à un scrutin libre, équitable et crédible.
Les déclarations du Dr Myo Nyunt ne sont bien sûr pas passées inaperçues, et U Pe Than, député du Parti National Arakanais (PNA) à la Pyithu Hluttaw (Chambre basse), a déclaré le 30 septembre craindre que la NLD annule les élections dans neuf circonscriptions de l’Arakan où les combats ont toujours lieu. « Notre parti a un fort soutien dans les zones de conflit », a-t-il confié en marge d’une réunion du PNA concernant la préparation aux élections, et une annulation reviendrait donc à réduire l’influence de cette formation politique locale.
Pour sa part, la Commission des élections de l'Union (CEU) a fait savoir qu'elle ferait tout son possible pour que les élections puissent se dérouler dans les zones de conflit. « Nous collectons des données dans ces régions, notamment dans le nord de l’Arakan, afin de planifier les modalités de vote de chacun », a déclaré U Myint Naing, membre de la CEU, évoquant dans leur ensemble, et les personnes déplacées, et les travailleurs migrants. Lors de son allocution, le Dr Myo Nyunt avait bien précisé qu’à ses yeux « tout échec dans la tenue d'élections pour des raisons de sécurité dans n'importe quelle région compromettra l'essence même du scrutin ». Le même avait aussi déclaré que son parti « avait compris le message des électeurs mécontents des zones ethniques » après les élections partielles de 2018 où la LND avait perdu cinq des six sièges en jeu dans ces zones ethniques.
Pour les élections générales de 2010 que l’USDP de l’ex-président Thein Sein avait emporté, il avait été impossible de voter dans 35 circonscriptions. Pour celles de 2015, ce nombre avait diminué à 13 circonscriptions, où il n’était toujours pas possible d’exercer son droit de vote lors des élections partielles de 2018.