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Contes birman: Pourquoi il y tant de pagodes à Bagan?

Contes de Birmanie- pagodes BaganContes de Birmanie- pagodes Bagan
Écrit par Rédaction lepetitjournal.com Birmanie
Publié le 9 décembre 2018, mis à jour le 8 juillet 2019

L’histoire birmane nous a transmis de nombreux contes, issus de tout le pays, qui transmettent une morale au travers d’une courte histoire. Guillaume Rebière, auteur passionné de la Birmanie, en a fait la traduction depuis l’anglais. Lepetitjournal.com Birmanie vous propose de les découvrir.



Pourquoi il y tant de pagodes à Bagan?


Il y a bien longtemps, les habitants de Bagan étaient très pauvres. A cette époque vivait un moine, qui était également alchimiste et qui essayait de découvrir la Pierre Philosophale. Ses expériences étaient coûteuses et il devait faire appel au patronage du roi pour financer ses recherches. Il suivit étape après étape les instructions d’un très vieux parchemin. Celles-ci étaient nombreuses et variées, et les semaines puis les mois passèrent. Le trésor royal se vida peu à peu et le peuple commença à gronder, refusant de payer de nouveaux impôts et accusant le roi de gaspiller son or pour un imposteur. Finalement, le moine parvint à la dernière instruction : “puis, placez la boule de métal dans de l’acide et vous obtiendrez la Pierre Philosophale”. Il s’adressa donc à la foule et l’apaisa en lui promettant que tout serait fini après une dernière expérience. La population accepta donc de payer ses impôts et se retira. Une fois retiré dans son laboratoire, le moine plaça la boule de métal qu’il avait obtenue après ses longues expériences dans de l’acide. Sept jours passèrent mais la boule de métal ne subit aucun changement. Le moine alla donc voir le roi pour lui annoncer que son expérience avait échoué. La rumeur se répandit dans la ville et une foule encercla peu après le palais royal, exigeant que le moine fut punit pour son imposture. Le roi était dans l’embarras, car il savait le moine honnête. D’un autre côté, il ne savait comment calmer la colère de son peuple. Le moine résolu lui-même le dilemme du souverain en s’arrachant les yeux. Puis il alla trouver la foule et leur cria : “mes orbites sont maintenant vides. Ne considérez-vous pas que j’ai été assez puni ? “. La population fut satisfaite et la foule se dispersa.

Les jours suivants, le moine resta prostré dans son laboratoire en prise au désespoir. Finalement, il se sentit si déçu par la science de l’alchimie qu’il se leva et brisa tous ses instruments. Puis, il dit à son novice, qui l’avait assisté pendant toutes ses années d’expérimentation, de jeter la boule de métal inutile dans les latrines. Le jeune novice obéit. Mais, une fois la nuit tombée, il lui sembla que les latrines brillaient de mille feux, et il alla trouver le vieux moine pour lui dire : “Maître, Maître, regardez, les latrines doivent être pleines de fées ou de fantômes”. Rappelle-toi que je suis aveugle !”, répliqua le moine, “décris-moi plutôt le phénomène”. Quand il eut écouté la description que lui faisait le novice, il réalisa que la boule de métal s’était enfin métamorphosée en Pierre Philosophale. Il se rendit compte que le scribe qui avait écrit le parchemin avait écrit, par maladresse, “acide” au lieu de “terreau nocturne”. Le novice alla chercher la Pierre Philosophale dans les latrines et la donna à son Maître. Ce dernier lui ordonna ensuite de se rendre dans une boucherie pour y récupérer les deux yeux d’un bœuf ou d’une chèvre. Mais, comme il était déjà tard, toute la viande avait été vendue et il ne restait plus alors qu’un œil de bœuf et un œil de chèvre, que le jeune novice ramena au monastère. Le moine plaça les deux yeux sur ses orbites vides, les toucha avec la Pierre Philosophale et ils rentrèrent aussitôt dans ses orbites. Ayant ainsi recouvré la vue malgré la différence de taille entre les deux yeux, il déclara à son novice en plaisantant : “à compter de ce jour, je prendrai le nom de Moine Chèvre-Bœuf”. Puis, sans plus attendre, il se rendit au palais royal pour annoncer la bonne nouvelle au roi. Il exprima également son intention de quitter le monde des êtres humains dès le lendemain matin et demanda au roi de faire fondre tout son cuivre et tout son plomb dans de grandes jarres, et de placer celles-ci devant le palais au moment du lever du soleil. “Vous pouvez dire à tous vos sujets de faire de même”, déclara le moine avant de quitter la cour pour retourner à son monastère. Bien qu’il fut déjà minuit passé, le roi envoya tous ses hommes de réveiller la ville au son du gong, afin d’ordonner à tous les habitant de mettre tout leur plomb et leur cuivre devant leur maison avant le lever du soleil. 

A l’aube, le Moine Chèvre-Bœuf sortit de son monastère en compagnie de son novice et se rendit d’abord au palais puis devant chaque maison de la ville. A chaque fois, il jeta la Pierre Philosophale dans les pots, changeant ainsi le cuivre en argent et le plomb en or. A partir de ce jour, les habitants de Bagan devinrent très riches et possédèrent tant d’argent et tant d’or qu’ils les utilisèrent pour construire des milliers de pagodes, dont la majorité peut encore être admirée dans la plaine de Bagan. Une fois sa mission accomplie, le Moine Chèvre-Bœuf se rendit au Mont Popa en compagnie de son novice. Alors qu’ils se tenaient au pied de la montagne, les vignes vierges qui poussaient sur les flancs de celle-ci se courbèrent et portèrent doucement le moine et son élève jusqu’au sommet. Là, le moine enterra la Pierre Philosophale. Une plante brillante poussa à cet endroit qui possédait six racines. Le moine en avala trois. Il donna les trois autres à son novice qui, par contre, ne trouva pas la force de les avaler tant les racines ressemblaient à de la chair humaine et le jus à du sang humain. “Qu’est-ce qui te gêne ?”, demanda le moine. “C’est de la chair et du sang humain”, répondit le novice. “Bien sûr que non”, rétorqua le moine, “t’ai-je jamais menti ?”. Mais le novice fut saisi de nausées quand il essaya de nouveau d’avaler les racines. “Il est évident que tu n’es pas destiné à partager mon succès en alchimie”, soupira le moine avec tristesse, “et nous devons donc nous dire adieu ici”. Le novice avait les larmes aux yeux en faisant ses adieux à son maître. Ce dernier lui donna une pièce d’or en cadeau puis ordonna aux vignes vierges de le déposer au pied de la colline. Le novice se sentit perdu sans son maître et préféra se rendre chez sa mère, qui était veuve, plutôt que de retourner au monastère. “Mère, prépare-moi mon petit-déjeuner”, demanda-t-il. “Mon fils, tu sais que je suis pauvre et que je n’ai pas assez d’argent pour acheter du riz”, lui répondit sa mère. Le novice se souvint alors du cadeau que lui avait fait le moine et sortit la pièce d’or de sa poche pour la donner à sa mère. Alors que sa mère s’apprêtait à quitter la maison, il sentit de nouveau la pièce dans sa poche. ”Mère, mère”, cria-t-il, “ne t’ai-je pas donné une pièce d’or ?”. “Si, la voilà”, dit-elle en lui montrant l’écu qu’elle tenait dans sa main. Le novice sortit de nouveau la pièce qu’il avait dans la poche et la donna à sa mère. Mais, une nouvelle fois il sentit une autre pièce dans sa poche. Et ainsi de suite jusqu’à ce que sa mère se retrouve avec dix pièces d’or entre les mains. Alors seulement le novice comprit-il que son maître lui avait fait le don perpétuel de l’or.


Traduction: Guillaume Rebière

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Publié le 9 décembre 2018, mis à jour le 8 juillet 2019

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