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LE TRISHAW BIRMAN - Le seul, le vrai, l’unique, l’authentique !

Écrit par Lepetitjournal Birmanie
Publié le 30 mars 2017, mis à jour le 30 mars 2017

Cent kilos qui se déplacent au ralenti dans la circulation dantesque de Yangon? Une tortue géante ? Non, un trishaw, un vélo assorti d'un side-car (d'où son nom birman, ?sai-kaaa?), dans lequel le cycliste transporte de tout, et même au-delà? Personnes et marchandises empruntent quotidiennement ce moyen de transport ancien et si authentiquement birman que son efficacité, son prix et sa simplicité ont couronné roi de la ville.

U Chit Tin Oo a 53 ans et il est conducteur de trishaw depuis qu'il a 16 ans. Son vélo-porteur, il l'a hérité de son père, qui lui a transmis comme un bijou de famille : ?Je suis propriétaire de mon vélo puisque mon père en était lui-même propriétaire. Il faut savoir que neuf, un trishaw coûte entre 400 000 et 500 000 K. Et encore sous la junte, le prix pouvait aller jusqu'à 700 000 K?. Ce moyen de locomotion très pratique se retrouve un peu partout en Asie du Sud-est. Or, le vélo-porteur birman se distingue de ses confrères régionaux par quelques particularités. Il ne comporte pas de banquette à l'arrière du conducteur mais plutôt deux sièges disposés de telle sorte que les passagers se retrouvent dos à dos. Un troisième passager peut également grimper sur le siège arrière à même la bicyclette. Dans cette Birmanie britannique, ce véhicule, introduit en 1930 à Mandalay, est devenu très populaire en termes de transport. Il est facile d'utilisation et sa la taille permet d'emprunter les ruelles les plus étroites. 

Un emploi en héritage
Si U Chit Tin Oo possède son trishaw, tous ses collègues ne sont pas propriétaires. ?Quand tu es locataire tu dois payer 1 000 K par jour. À mon avis, il est préférable d'être propriétaire car il n'y a pas d'imprévu mais c'est un investissement sur du long terme. Regarde moi, 37 ans après mes débuts je suis toujours en selle sur le même engin?, s'amuse-t-il. Il sillonne les rues sur son tricycle douze heures par jour, de 9h à 21h. Le travail est épuisant, les journées longues et les pauses bien méritées. ?Les jeunes pédalent tant qu'ils le peuvent pour gagner le plus d'argent possible?, indique l'homme aux mollets musclés, avant d'ajouter, ?il y a de ça quelques années, j'arrivais encore à suivre le rythme, mais maintenant je me suis rangé?.  En moyenne, un conducteur de trishaw gagne 6 000 à 8 000 K par jour. ?Ceux qui repoussent la fin de leur service au maximum peuvent espérer se faire 10 000 K par jour?, informe U Chit Tin Oo. Même si la négociation est un passage obligé, les petites courses coûtent généralement 300K et les plus grandes ? jusqu'à 30 minutes de ?distance? ? atteignent 1 000 K. Évidemment, le prix diffère selon le nombre de passagers. Remorquer une personne ne demande pas le même effort que d'en remorquer trois. Cela va de soi !

Un système bien rodé
Attention, le métier ne consiste pas à circuler n'importe comment, au hasard des rues, à la recherche du client. Chaque trishaw a un secteur attribué. Selon le quartier où le client veut se rendre, il doit choisir son trishaw par rapport à la couleur de la plaque d'immatriculation. ?Ma plaque à moi est bleue, ce qui veut dire que je peux me rendre à South Okkalarpa, Yankin, North Dagon, Thingangyun?, explique U Chit Tin Oo. Cette délimitation permet au conducteur de connaître leur secteur par c?ur et de passer par des raccourcis souvent peu connus. ?Je connais mon quartier comme ma poche?, se vante le travailleur, le regard complice tourné vers ses collègues. Car complicité il y a. On ne peut pas vraiment parler de concurrence entre les différents conducteurs. Même s'ils sont nombreux.

Où peut-on les trouver ?
Dans les endroits bien spécifiques, souvent des coins de rues ou des carrefours qui deviennent de vrais parkings à vélo, ils sont généralement cinq ou six à se réunir. Mais il y a des codes immuables. Pas question de sauter sur le client dès qu'il se pointe. Il y a un incontournable un système de numérotation. ?Chaque vélo à un numéro  qui lui est attribué de 1 à 10. Le vélo qui a le numéro 1 partira avec le premier client, le vélo numéro 2, attendra le second ainsi de suite. À son retour, le vélo numéro 1 devra attendre que les autres numerous prennent à leur tour un client?, décrit le cycliste. Au même moment, une cliente se présente. C'est au tour du numéro quatre de monter en selle.

Qui trouve-t-on derrière les guidons ?
?Aucune femme !?, s'exclame U Chit Tin Oo. Selon lui, le métier serait trop physique et très dangereux à ca use la circulation anarchique de Yangon. Du côté des ?mâles?, tout le monde peut devenir conducteur de trishaw à sa majorité. ?Mais le gouvernement a mis en place une réglementation plus stricte pour les conducteurs. Désormais, il nous faut obtenir deux licences?, détaille le gaillard. La première licence concerne le trishaw lui-même et coûte K3 000 ; la seconde concerne le conducteur qui doit aussi payer K1 500. Pour obtenir les licences il faut se rendre dans les mairies des arrondissements. ?C'est comme un permis de conduire, on nous délivre une petite carte. Sous le régime militaire on devait avoir cette carte sur nous en permanence. Aujourd'hui c'est plus souple?.

En bon commerçant, à la fin de notre entretien, l'homme glisse amusé : ?le trishaw est un moyen de transport relativement peu cher comparé au taxi et relativement modulable par rapport aux bus. Et puis, quand on voit la circulation et les embouteillages dans Yangon, nous sommes souvent aussi rapides que les véhicules motorisés sur les petites distances?. Ses acolytes boivent du petit lait. Et, très vite, ils acquiescent d'un large sourire.
Vendredi 31 Mars 2017 (www.lepetitjournal.com/Birmanie) Pauline Autin 

 

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Publié le 30 mars 2017, mis à jour le 30 mars 2017

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