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PANAMA PAPERS – « Nous avons fait bouger les choses »

Écrit par Karine Hayek Germani
Publié le 19 décembre 2016, mis à jour le 19 décembre 2016


Will Fitzigibbon, l'un des journalistes ayant participé à la publication des « Panama Papers », était de passage au Liban, invité par la Fondation May Chidiac à l'occasion du forum "Free Connected Minds " qui s'est déroulé le 26 novembre dernier. Nous l'avons interrogé.

Photo : Will Fitzigibbon

Lepeitijournal.com/Beyrouth : Quel processus a mené à la publication des ?Panama Papers? en avril dernier ?Will Fitzigibbon : Le choix de la date fut le fruit d'un long débat plus ou moins démocratique parmi les journalistes de l'ICIJ (International Consortium of Investigative Journalists) à l'origine de la publication des documents. 

Il a d'abord fallu que les 400 journalistes qui ont pris part à cette enquête digèrent ces millions de documents.

Beaucoup de dates ont été proposées, chaque pays ayant son propre calendrier politique. Mais nous avons fini par décider qu'il fallait se départir de ces considérations. Nous nous sommes d'accord sur le fait que l'impact serait décuplé si les documents étaient publiés en même temps et partout dans le monde.

Quel souvenir gardez-vous du 3 avril 2016, jour de la diffusion des « Panama Papers » ?
Il restera ancré en moi. Ce jour-là, j'étais rivé devant l'écran, je scrutais les réseaux sociaux. Sut Twitter, le hashtag #panamapapers a tout explosé en quelques secondes. Ce fut un tsunami numérique. 

Quel était l'objectif ?
J'essaye toujours d'expliquer que ce n'est pas la divulgation des noms de personnalités qui importent, mais la dénonciation du système. Ces individus, célèbres ou non, utilisent un système corrompu qu'il faut changer. Ce qui importe, c'est changer les choses.

Quelles suites les « Panama Papers » ont-elles eu après leur diffusion ?
Après la secousse provoquée par la diffusion de ces documents, la tempête s'est calmée car les gouvernements ont pris le relais. Nous sommes rentrés dans une phase administrative et juridique. 

Plus de 80 Etats ont lancé des enquêtes et des poursuites judicaires. Grâce aux journalistes qui ont collaboré à ce travail, nous savons que les choses bougent, notamment en France ou au Canada.

Néanmoins, certains pays n'ont pas bougé comme la Chine qui a empêché la diffusion de ces documents car de nombreux proches de responsables gouvernementaux sont cités.

Y'a-t-il eu une prise de conscience des autorités de régulation internationales ?
Des instances comme le Parlement européen ou la présidence des Etats-Unis ont rapidement réagi, du moins dans les mots. Depuis plusieurs années, des documents fuitent sur les sociétés offshores ? Swisslekas, LuxLeaks? Les gouvernements et la société civile luttent contre ces sociétés écran offshore. 

Il est important que des institutions internationales réagissent aussi, comme l'OCDE ou l'Union Européenne pour que des lois transnationales soient mises en place pour  faciliter l'échange d'information. A ce jour, plus de 100 pays ont signé un traité multilatéral d'échange.

Les choses ont-elles changé ?
Oui, les choses changent mais lentement. La mise en place de lois de régulation dans tel ou tel pays, c'est un paradis fiscal en moins et c'est positif. Il y a quelques années, la question des paradis fiscaux ne suscitait pas l'intérêt qu'elle suscite aujourd'hui. 

Continuez-vous à suivre ces dossiers ?
Bien sur. Je publierai bientôt plusieurs articles sur le sujet dans lesquels je décrirai les conséquences de la publication de ces documents, les réformes entreprises. Des journalistes ayant participé à l'enquête ont été mis sous pression au Panama, au Venezuela, en Equateur par exemple, ou licenciés comme à Hong Kong.

Les « Panama papers » ont-ils eu des effets que vous ont dépassés ?
Nous ne nous attendions pas à l'effet de bombe que cela a provoqué. Nous avions imaginé que nous pourrions obtenir des résultats, surtout dans les pays européens. Mais nous ne nous attendions pas, par exemple, à ce que le Premier ministre soit forcé de démissionner en Islande.  Le terme « Panama Papers » est devenu un symbole.

D'un point de vue personnel, j'ai craint qu'une accusation erronée vienne décrédibiliser le projet et le métier de journaliste. Une erreur aurait suffi pour que les « Panama Papers » s'écroulent.

 

Karine GERMANY   (www.lepetitjournal.com/Beyrouth) lundi 19 décembre 2016

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Publié le 19 décembre 2016, mis à jour le 19 décembre 2016

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