LPJ Beyrouth : La célèbre actrice française était au Liban pour une conférence du Centre libanais pour l'éducation spécialisée (CLES). Nous sommes allés à sa rencontre.
Nathalie Baye. L'impression de tout savoir sur elle. Le talent évident de l'élève du cours Simon et du Conservatoire, lauréate de quatre Césars. Ses rôles bouleversants dans « Sauve qui peut » de Jean-Luc Godard, « Le Retour de Martin Guerre » de Daniel Vigne ou « La Balance » de Bob Swaim. Son humour désopilant dans « Absolument fabuleux » de Gabriel Aghion. Ses prestations déroutantes dans « Le Petit Lieutenant » de Xavier Beauvois ou dans « Une liaison pornographique » de Frédéric Fonteyne (qui lui a valu un Prix d'interprétation à la Mostra de Venise). Et même ses passions amoureuses avec le grand Philippe Léotard ou avec l'icône Johnny.
Et pourtant, c'est une facette moins connue de la comédienne qui est derrière sa venue cette semaine au Liban. Ado, sa dyslexie lui a compliqué son parcours scolaire. Une expérience qu'elle a voulu partager à l'occasion de la conférence « 10-10-DYS » du CLES (Centre libanais pour l'éducation spécialisée).
Comment avez-vous entendu parler du travail du CLES ?
J'ai rencontré Carmen Debbané (fondatrice et présidente du CLES) aux Etats Unis lors d'un festival de cinéma. Nous en sommes venues à parler de ma dyslexie et de celle de son fils. A travers l'association, Carmen s'est totalement investie dans l'aide aux enfants ayant des troubles de l'apprentissage et j'ai eu envie d'essayer d'apporter mon soutien à cette superbe initiative.
Vous-même enfant dyslexique, vous avez eu la chance d'avoir un soutien familial et scolaire?Enfant,
je confondais les lettres ou bien je mettais les mots à l'envers. Mais à l'époque, la dyslexie était totalement inconnue. Ma chance a été d'être dans une école où le corps enseignant était à l'écoute et mes professeurs ont détecté sans doute une forme de dyslexie. Mes parents ont alors rencontré Claude Chassagny. Lui-même enfant dyslexique et dysorthographique, M. Chassagny dirigeait une classe pour dyslexiques dans une école expérimentale. Il est par la suite devenu une référence en matière de dyslexie en France.
Une chance que n'ont pas forcément tous les enfants ayant des troubles scolaires?
Absolument. J'ai eu la chance d'être écoutée et suivie. Aujourd'hui encore, on qualifie de cancres ou de paresseux des enfants qui ont tout simplement des troubles d'apprentissage. Ce matin (mardi), je me suis rendue dans une classe pilote CLES d'une école à Beyrouth et j'y ai vu le travail incroyable effectué par le centre, les orthophonistes, les institutrices. Ce sont de telles initiatives qu'il faut soutenir absolument car elles permettent de redonner confiance à des enfants qui ne comprennent pas ce qui leur arrive mais aussi à des parents qui sont dépassés.
Quelle force avez-vous tiré de cette enfance un peu différente ?
Ma dyslexie a fait que j'étais toujours ailleurs et a laissé la part belle à mon imagination. C'est ce qui me permet aujourd'hui de m'évader, de puiser dans mon imaginaire et dans mes rêves la matière pour créer des personnages. Ceci dit, je ne pense pas que mon parcours aurait été si différent si ma dyslexie avait été détectée plus tôt et prise en charge avec les moyens que nous avons aujourd'hui. Ma voie et ma passion sont en moi, la dyslexie a simplement exacerbé ma facilité à me créer un monde, à être dans une bulle imaginaire. Comme un rôle finalement.
Le Centre libanais pour l'éducation spécialisée |
La conférence « 10-10-DYS » |