Dans le cadre d'une conférence organisée par l'Université Pour Tous, Mr Olivier Garro, secrétaire général des chaires Senghor et directeur de l'Institut International pour la Francophonie, s'est exprimé sur les dynamiques entre « Mondialisation, Connaissances et Francophonie ».
Créé en 2003, le réseau international des chaires Senghor a pour vocation de « mailler les territoires francophones ». Les quatre objectifs principaux des chaires Senghor sont l'enseignement universitaire de base sur la francophonie, la recherche sur la francophonie, l'animation d'un débat d'idées sur le monde francophone et son évolution, et enfin la coopération entre partenaires francophones. Composé de 18 chaires, le réseau est présent dans différentes régions du monde (Afrique, Amérique, Asie et Europe).
Élu récemment directeur de la chaire Senghor du Liban, Mr Gérard Bejani inaugure la conférence en livrant « un exemple d'une chronique avancée de la francophonie à Beyrouth ». « L'identité libanaise est une identité qui se nourrit de l'autre (?) Cet autre a été pendant longtemps la France » constate-t-il. « La francophonie est un territoire mental, spirituel, fondamental : celui de la langue française » explique M. Bejani. Professeur à l'Université Saint-Joseph, il souhaiterait constituer une mémoire de la francophonie, notamment au Moyen Orient.
Après cette introduction, Olivier Garro, qui a vécu pendant quatre ans au Liban, débute son exposé. Selon lui, le processus de mondialisation repose sur la capacité de l'être humain à développer ses connaissances. Ces connaissances proviennent majoritairement des établissements supérieurs comme les universités ou les centres de recherche. Oscillant entre 15 et 20 000, les établissements supérieurs sont des acteurs majeurs de la mondialisation. Ils doivent à la fois diffuser et produire de la connaissance. Dans ce domaine, la francophonie est l'une des seules aires qui a décidé de renforcer ses établissements et ses échanges avec ses partenaires. Cette politique a été payante. Aujourd'hui, l'Agence Universitaire de la Francophonie constitue le plus grand réseau universitaire au monde avec plus de 800 universités.
Photo : Olivier Garro (à gauche), Gérard Bejjani (à droite).
« La connaissance est une marchandise comme une autre » affirme Mr Garro. Dans cette logique économique, les universités doivent à la fois entrer en compétition pour produire la meilleure connaissance et coopérer entre elles pour avancer. La langue de la connaissance est bien entendu l'anglais. Mais « il y a dans les langues, des termes intraduisibles », note Mr Garro, si bien qu'il est parfois compliqué de diffuser des connaissances dans des grandes aires.La diversité des langues est « un trésor pour l'humanité », confie Mr Garro. Les langues sont toutes différentes et riches de sens. Chaque langue a un point de vue culturel qui lui est propre. « La langue française permet de concevoir le monde d'une manière différente du vietnamien ou du chinois, par exemple », estime Mr Garro au détour d'une anecdote.
Aujourd'hui, on dénombre entre 3000 et 7000 langues différentes dans le monde. Il y a 140 langues officielles et sept langues internationales : l'anglais (60 pays), le français (30 pays), l'arabe (26 pays), l'espagnol (20 pays), l'allemand et le russe. On compte également une dizaine de « grandes langues » c'est-à-dire, des langues équipées scientifiquement pour porter la connaissance. Certains pays comme le Cambodge, n'ont pas les moyens de délivrer ces connaissances dans leur langue natale, ils doivent par conséquent utiliser une « grande langue » comme le français.
« Quel bilan pouvons-nous dresser de ces dynamiques ? » s'interroge pour finir Olivier Garro. Au final, « la francophonie est beaucoup plus forte que les francophones ne le croient » déclare-t-il. « Dans l'avenir, la francophonie se portera très bien », assure Mr Garro, statistiques à l'appui. On estime qu'il y aura en 2050 entre 500 et 700 millions de francophones dans le monde. La réussite de la francophonie dépendra des connaissances qui seront diffusées. « Il faut toujours prendre en compte l'imprévisible mais on ne peut aller que vers un développement de la francophonie » soutient-il. En réalité, « le plus grand perdant de la mondialisation, c'est l'anglais car ce n'est pas la langue de Shakespeare qui est promue à travers le monde ».
Sarah DELBOS (www.lepetitjournal.com/Beyrouth) jeudi 4 mai 2017
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