Depuis son arrivée à la tête de l'établissement en septembre dernier, la proviseure a pris la mesure de "ce gros navire" de 2.800 élèves. Forte d'une culture anglo-saxonne héritée à Ottawa, où elle a dirigé un établissement du réseau, Joëlle Émorine entend multiplier les initiatives pédagogiques au sein du Lycée, en s'appuyant sur un socle essentiel : le projet d'établissement, en cours de formalisation
Joëlle Émorine, dans son bureau (Photo Lepetitjournal.com)
Ses premières impressions ont tout de suite été positives : un établissement voué à l'excellence, des initiatives pédagogiques de qualité, une ville chaleureuse et accueillante, une Catalogne qui lui rappelle, à bien des égards, l'Ontario franco-canadien où elle a passé les cinq années précédentes... La période de découverte largement écoulée, Joëlle Émorine évoque, non sans passion, les opportunités et les projets du LFB. A commencer par la finalisation d'un document essentiel : le projet d'établissement.
Lepetitjournal.com : Quel est l'état d'avancée du projet d'établissement ?
Joëlle Émorine : Le projet devrait être finalisé au printemps. Il avait été ébauché avant mon arrivée au sein du LFB et porte sur quatre grands axes : échange et ouverture, plurilinguisme, citoyenneté, orientation et accès à l'enseignement supérieur.
Qu'est ce que ce projet va changer pour le LFB ?
Il va notamment permettre de canaliser les initiatives pédagogiques : il se fait énormément de projets dans l'établissement, mais il y a un grand besoin de coordonner le tout et de leur donner une cohérence.
Par exemple, nous allons dès la rentrée prochaine impliquer les élèves de la maternelle à la Terminale, sur ce qui s'intitulera "Les arts et les sciences dialoguent à Barcelone". L'idée est d'organiser des conférences, faire venir des intervenants au sein du Lycée, ou encore proposer des sorties au musée. Nous pensons mettre sur pied une ou deux "semaine(s) des arts et sciences". C'est un projet interdisciplinaire qui devrait permettre de dynamiser l'apprentissage, dans le cadre de l'échange, de l'ouverture, du plurilinguisme.
Qu'en est-il de l'apprentissage des langues au Lycée ?
Il est primordial et va continuer à s'intensifier. Les élèves apprennent ici le français, l'espagnol, le catalan, l'anglais et le latin. En outre, nous allons instituer des groupes de progression dans l'enseignement de certaines de ces langues, afin d'évaluer les élèves dans le cadre européen. On pourra regrouper les enfants par niveau (A1, B1, C1 etc) et non simplement par classe. En anglais, nous allons développer les disciplines non linguistiques (DNL) : l'éducation musicale est déjà enseignée dans cette langue en classe de troisième. Prochainement, nous envisageons d'introduire quelques heures en anglais dans les disciplines scientifiques et en histoire ?géographie... C'est une offre qui correspond d'ailleurs à la demande des parents.
D'autres projets ?
Oui, je souhaite instaurer des ateliers de langue dans le cadre des activités parascolaires. Je pense notamment à l'allemand, l'italien mais aussi l'arabe et le mandarin.
Qu'en est-il du catalan ?
La place du catalan est importante, évidement. Il est enseigné en tant que langue vivante, en tant que langue véhiculaire (en cours de sport ou d'arts plastiques par exemple) et comme langue maternelle (avec des cours de littérature de la langue concernée).
En provenance du Canada, où le régionalisme québécois est très marqué, retrouvez vous ici des similitudes ?
Oh oui, c'est certain : au Canada, la lutte pour la défense et la conservation des identités régionales est forte. Je trouve cela très intéressant. Pour ma part, je pense qu'il faut toujours agir dans le respect de la culture locale, car toutes les cultures s'enrichissent les unes des autres. A Ottawa, il y avait 48 nationalités qui cohabitaient au sein de l'établissement : c'était extraordinaire.
En Catalogne, je suis profondément marquée par un sens de l'éducation et du respect très fort, que l'on ne trouve pas toujours en Amérique du Nord. Les élèves ici sont très bien éduqués, ils ont un sens du respect de l'adulte, ils sont très "classes", si vous me permettez l'expression.
Êtes-vous revenue d'Amérique du Nord avec une certaine touche anglo-saxonne, dans votre manière de gérer l'établissement ?
Bien sûr ! J'ai intégré une valeur très importante au Canada, c'est la notion de « l'estime de soi », que l'on transmet aux élèves. Cela passe par la valorisation de l'autre : il faut toujours chercher du positif dans l'évaluation d'un élève. Je pense qu'on n'enlève pas les points, mais qu'au contraire, on les additionne. L'élève sait toujours faire quelque chose et c'est primordial d'avoir cela en tête, surtout dans un établissement comme celui-ci, où les élèves sont brillantissimes et où le niveau d'exigence est très élevé.
Concrètement, comment est-ce que cela se traduit ?
Il faut faire attention aux élèves en difficulté. Nous travaillons au sein du LFB sur ce qu'on appelle les "troubles d'apprentissage". Nous proposons un protocole, en collaboration avec le médecin scolaire de l'établissement et les équipes pédagogiques, qui permet d'aider les enfants qui souffrent de ce type de problèmes. Nous avons ainsi instauré un dispositif permettant d'obtenir des adaptations d'épreuves, lors des examens : par exemple des tests moins longs, l'accès à un ordinateur pour passer l'examen etc... Je suis persuadée qu'il faut aller chercher l'intelligence de l'élève ; auparavant, on stigmatisait les enfants en échec, aujourd'hui il existe des moyens pour identifier ce qui bloque, et les aider à contourner l'obstacle.
Quels sont les prochains grands rendez-vous du Lycée ?
Je souhaite en évoquer deux : premièrement la participation, à Arcachon, de quatre équipes de seconde du LFB, deux de handball et deux de volley au tournoi de sports de plage, organisé par l'UNSS France et l'Agence pour l'Enseignement Français à l'Etranger. Plus de 300 élèves venus du monde entier s'y retrouveront.
Egalement la soirée des finissants, le 27 mai prochain: tous les élèves de Terminale seront conviés à une cérémonie, où leur sera remis un diplôme attestant des années d'étude au sein du LFB ou d'un autre établissement du réseau. La soirée a lieu avant les résultats du bac : tout le monde participe, à l'image un peu des graduations américaines.
Enfin, nous avons tourné un lipdub pour accompagner la création du nouveau site du lycée. Le titre en est « Ça c'est vraiment nous ». L'objectif est de renforcer l'esprit d'appartenance au LFB.
Propos recueillis par Vincent GARNIER (www.lepetitjournal.com - Espagne) Mardi 5 avril 2011
LYCEE FRANÇAIS - Joëlle Émorine : "Les élèves du LFB sont brillantissimes"
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