La France et l'Espagne sont bien plus que deux pays voisins. Les deux États s'entraident et maintiennent de très bonnes relations diplomatiques. Leurs collaborations transfrontalières se multiplient et s'intensifient au fil du temps, grâce à des projets bilatéraux qui touchent des domaines aussi variés que l'énergie, l'éducation, la sécurité ou les transports.
(photo domaine public) Suite à la réforme territoriale votée en 2014, qui a fait passer de 22 à 13 le nombre de régions administratives françaises, toutes les régions de l'Hexagone ont adopté en 2016 leurs nouveaux noms. Les deux nouvelles régions frontalières de l'Espagne sont "Occitanie" qui regroupe les anciennes régions Midi-Pyrénées (Toulouse) et Languedoc-Roussillon (Montpellier) ; et la région "Nouvelle Aquitaine", qui regroupe les anciennes régions administratives d'Aquitaine (Bordeaux), du Limousin (Limoges) et de Poitou-Charentes (Poitiers). La création de ces nouvelles régions suppose l'impulsion d'un dynamisme supplémentaire dans le cadre des relations bilatérales, notamment concernant les initiatives prises au niveau régional. Même si les nouvelles régions administratives sont encore en période de mise en place pour le moment, on suppose que les nouveaux préfets aborderont ces questions transfrontalières dans les mois à venir avec leur homologues espagnols pour réaffirmer et poursuivre la collaboration sur de nombreux dossiers, dans le cadre des coopérations entre eurorégions.
Nouvelle phase de collaboration au Pays basque
Le mois dernier, une rencontre a eu lieu à Bayonne entre le président de la région espagnole du Pays Basque, Iñigo Urkullu, et le maire de Bayonne, Jean-René Etchegaray, qui est aussi le président de la nouvelle Communauté d'agglomération du Pays basque français (iparralde en euskera). Les deux représentants politiques s'accordent sur la nécessité d'avoir une vison commune sur une fin "ordonnée" du groupe ETA, comptant sur un désarmement complet et un respect pour la mémoire des victimes et pour leurs familles. D'autre part, les deux hommes ont confirmé leur souhait de renforcer et développer la collaboration entre le pays basque espagnol et la nouvelle communauté d'agglomération française frontalière ; les dossiers envisagés concerneront les domaines de l'économie, du transport, de l'environnement, de la culture, des langues et des services à la personne, selon la presse locale basque. Il s'agit de la première rencontre entre des responsables régionaux espagnols des zones frontalières et les nouveaux dirigeants régionaux français, ce qui laisse présager de nombreuses possibilités de collaboration à l'avenir.
Les interconnexions énergétiques
Parmi les projets de collaboration bilatérale les plus avancés se trouve celui des interconnexions énergétiques et notamment électriques. Le président français s'est rendu en Espagne en 2015 pour le dernier sommet tripartite sur les interconnexions énergétiques avec le Portugal. Les dirigeants y ont réaffirmé leur engagement pour atteindre l'objectif de 10% d'interconnexions énergétiques avant 2020 : des projets de part et d'autre des Pyrénées devront porter le niveau d'interconnexion total entre la France et l'Espagne à près de 8.000 mégawatts. La péninsule ibérique possède l'un des taux d'interconnexion les plus bas de l'Union européenne, c'est-à-dire qu'elle ne peut importer ou exporter qu'une très faible quantité d'énergie, ce qui limite ses possibilités d'aider ou d'être aidée en cas de défaillance de son système électrique. Voilà pourquoi en février 2015, la ligne THT (très haute tension) - qui relie Baixas, au nord de Perpignan, et Santa Llogaia, près de Figueres - a été inaugurée afin de doubler le niveau d'interconnexion électrique entre la France et l'Espagne, qui est passé de 1,4 GW à 2,8 GW, ce qui reste tout de même inférieur aux 10% minimum recommandés par l'Union européenne.
La lutte contre le terrorisme
La fin contrôlée et le désarmement du groupe terroriste ETA est depuis plusieurs années déjà une priorité dans la collaboration des autorités espagnoles et françaises frontalières du pays-basque. Cependant, la montée généralisée de la menace terroriste djihadiste ces dernières années est un sujet sensible devenu prioritaire sur lequel les deux pays, dans un contexte de sécurité européenne renforcée, collaborent et sont très vigilants. Le ministre des Affaires Étrangères espagnol José Manuel Garcia Margallo s'était félicité cet été de l'exceptionnelle collaboration entre l'Espagne et la France dont les services de sécurité travaillent main dans la main pour diagnostiquer la menace et lutter contre ses réseaux de financement.
Coopération universitaire et de recherche
France comme Espagne poursuivent leurs accords et leurs engagements dans le domaine de l'enseignement, afin de faciliter la mobilité des connaissances comme des personnes. D'éventuels accords régionaux sont à espérer entre les universités et centres de formation transfrontaliers suite à la mise en place des nouvelles régions françaises. Chaque année des appels à projets communs dans les domaines de l'enseignement supérieur et de la recherche sont lancés conjointement par l'ambassade de France en Espagne et le ministère espagnol de l'Éducation, de la Culture et du Sport. Leur but est de promouvoir des actions pour la réalisation des objectifs définis au niveau de la coopération bilatérale entre l'Espagne et la France. Selon l'ambassade, ces actions seront conduites grâce notamment à des séjours de mobilité d'étudiants, de doctorants et d'universitaires et permettront de renforcer la contribution franco-espagnole à la construction de "l'Espace Européen de l'Enseignement Supérieur".
Les transports et le couloir méditerranéen
En terme de transport de personnes et de marchandises, les relations entre la France et l'Espagne se sont fortement développées ces dernières années, grâce notamment à la coopération des compagnies ferroviaires espagnoles et françaises RENFE et SNCF qui n'ont cessé d'améliorer la communication entre les deux pays. Le couloir ferroviaire méditerranéen est un projet qui s'inscrit dans le cadre du réseau de transport transeuropéen (RTE-T), un programme de développement des infrastructures de transport de l'Union européenne approuvé le 19 octobre 2011 qui vise une hausse des échanges entre les pays membres, et l'augmentation de la part des transports les plus respectueux de l'environnement. La nouvelle infrastructure doit relier la péninsule ibérique à la frontière ukrainienne, sur une longueur de 3.000 kilomètres de chemins de fer en passant en Espagne le long de la côte méditerranéenne, de Algeciras jusqu'à la frontière française. Une fois achevé, le corredor Mediterráneo représentera, avec le corredor Atlántico et le corredor Central, l'un des trois principaux réseaux de transports de personnes et de marchandises entre l'Espagne et le reste de l'Europe. Le problème, c'est que le développement de cet axe est très lent à certains points, et inexistant à d'autres. Des conseillers territoriaux rattachés à la Generalitat de Catalunya ont formé un groupe stratégique pour le couloir méditerranéen. Dans un communiqué publié la semaine dernière, les responsables catalans réclament un calendrier clair et précis sur l'avancement du projet ferroviaire du couloir méditerranéen. Ils vont porter leur demande devant les responsables espagnols, mais aussi devant les autorités françaises et européennes.
Développement économique
En terme de soutien aux entreprises, d'innovation et de développement, les collaborations entre France et Espagne se multiplient, avec entre autres le développement de l'agence de développement international (Business France) en Espagne pour accompagner les entrepreneurs dans leurs projets dans la péninsule ibérique.
Dans cet esprit, Bpifrance (banque publique d'investissement) et le CDTI (Centre pour le Développement Technologique Industriel) lancent un appel à projets pour promouvoir et soutenir financièrement des partenariats technologiques entre PME françaises et espagnoles. L'appel vise des partenariats technologiques réunissant au moins une entreprise française et une entreprise espagnole, quelle que soit la thématique, mais avec "un focus sur des secteurs technologiques d'intérêt commun pour la France et l'Espagne dont notamment les secteurs des biotechnologies et des technologies médicales, de l'énergie et de l'environnement, de l'agroalimentaire, des TIC, et des procédés industriels, matériaux et transport". Inscription avant le 28 février. Plus d'informations ici.
Perrine LAFFON (www.lepetitjurnal.com - Espagne) Mercredi 8 février 2017
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