Édition internationale

ALCOOLIQUES ANONYMES – Harmonie : un groupe francophone ouvre ses portes à Barcelone

Écrit par Lepetitjournal Barcelone
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 18 septembre 2014

Barcelone, avec son alcool à prix réduit et son contexte festif, est le paradis pour les fêtards en tous genres. L'optique d'une bonne cuite est peut être un peu plus pressant ici qu'ailleurs? et notamment pour les Français. C'est pourquoi Harmonie, groupe des Alcooliques Anonymes (AA) en français, ouvre ses portes, grâce à deux vétérans AA. Une première en Espagne.

(CC Dominique Chappard)

Harmonie est née d'une rencontre entre Philippe et Manuel, deux hommes animés par le même objectif : aider leur prochain. Philippe, un Français vivant à Barcelone, a eu besoin des réunions AA. Une amie anglaise lui conseille de se rendre dans des séances anglophones. "Ce n'était pas un problème pour moi car j'ai la chance d'être bilingue et de comprendre parfaitement l'anglais" explique Philippe, "du coup, quand je vais à Paris, par habitude, j'entre aussi dans des réunions anglophones". En juillet dernier, lors d'un nouveau rassemblement, il rencontre un Espagnol, Francisco (venu pour son problème d'alcool mais aussi pour améliorer son anglais), et lui explique son problème. "Je lui dis : 'mon rêve, c'est monter un groupe français à Barcelone, pour les personnes qui en ont besoin'. Il me répond : 'j'ai la personne qu'il te faut !'. C'était Manuel".

"Reconnaître que l'alcoolisme est une maladie"
Manuel, Catalan, vétéran âgé de 90 ans aujourd'hui, a fait du chemin depuis son épisode à Paris un fameux 25 juillet 1960. Une date clé dans sa vie. Après une "énorme cuite" selon ses dires, Manuel rentre dans son appartement. Mais il est vide. "Ma femme venait de partir, avec notre enfant, à cause de mon alcoolisme" se remémore-t-il. "Mon existence devenait un véritable désastre. Je suis monté dans la Tour Eiffel et je voulais me jeter du 2e étage. Mais je n'y arrivais pas. J'avais peur. Mon instinct de survie m'en empêchait".

Incapable de se suicider mais n'ayant plus la volonté de vivre, Manuel a profité de sa solitude pour boire une bouteille de Gin qu'il avait caché dans les toilettes. "J'ai commencé à boire dans la cuisine, et là j'ai vu un journal par terre". L'édition publiait quotidiennement des extraits de "Avec les Alcooliques Anonymes", écrit par Joseph Kessel. "D'un coup, j'ai tout compris. Je me suis rendu compte que c'était une maladie progressive, que ma vie avait toujours tourné autour de l'alcool. C'est mon miracle". Reconnaître que l'alcoolisme est une maladie a aidé Manuel. A l'hôpital, il a subi 17 électrochocs pour "guérir". "J'ai compris que je ne serais plus jamais seul, c'est important".

La 2e étape : aider son prochain
Fort de leur expérience, Philippe et Manuel ont donc pour objectif d'aider ceux qui vivent ce qu'ils ont vécu. La méthode des AA, c'est transmettre et donner. "Quand on a eu cette blessure très jeune, on acquiert un égo surdimensionné pour se défendre", explique Philippe, "mais du coup on devient irritable, on fait les choses par intérêt seulement. Il faut revenir au langage du c?ur. On ne s'en sort que si on aide les autres, ça permet d'oublier l'égoïsme". Ainsi, les habitués des réunions deviennent parrains. Lorsqu'un nouveau venu arrive dans une réunion AA, le parrain guide son protégé, le conseille, lui donne du courage. Mais outre le fait de soutenir ses semblables, les réunions permettent aux anciens de se rappeler le chemin parcouru. "Ça recharge les batteries car on a la mémoire très courte" analyse Philippe.

Harmonie a ouvert ses portes aux AA le 3 septembre dernier, au rythme d'une séance par semaine, le mercredi. "Les gens osent parler, se confier" relate Manuel. "On remarque beaucoup de respect entre les intervenants, voire un peu d'amour parfois" renchérit Philippe, "on fait passer le message pour qu'ils progressent (pour en savoir plus, RDV ici)". Harmonie, comme les autres groupes AA, n'existe pas pour convaincre à tout prix. "Les gens viennent et prennent ce qu'ils veulent. Un alcoolique qui veut arrêter de boire doit en faire sa priorité, c'est à lui de gérer" prévient Philippe, "nous, nous sommes là pour lui fournir des outils".
Le nom d'Harmonie symbolise le rassemblement des personnes de milieux très différents autour d'une même cause. D'ailleurs, en Afrique du Sud, "juste avant l'Apartheid, les Blancs et les Noirs se réunissaient ensemble autour de ce problème" relate Manuel, "l'unique barrière qui sépare les AA, c'est la langue". Grâce à Harmonie, il n'y a plus de barrière à Barcelone pour les AA francophones.

Pierre LEPINE (www.lepetitjournal.com - Espagne) Jeudi 18 septembre 2014

Info pratique : réunion tous les mercredis matin de 10h00 à 11h15. Calle Cardenal Casanas, 16. Sonnez à la salle Sant Josep Oriol. Pour s'y rendre : métro Liceu, L1, ligne verte.

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Publié le 17 septembre 2014, mis à jour le 18 septembre 2014
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