Au terme de cinq ans de travaux et un investissement de 1,4 milliards de dollars, le barrage laotien Nam Theun 2 est entré en service le 30 avril dernier. Inauguré jeudi dernier, ce projet hydro-électrique, qui est le plus grand de l'histoire du pays communiste, suscite beaucoup d'espoir de la part des institutions partenaires du projet mais aussi des critiques des écologistes
Le Laos a inauguré jeudi dernier le barrage Nam Theun 2 après cinq années de travaux, en présence des dirigeants du régime communiste et du Premier ministre thaïlandais Abhisit Vejjajiva. Estimé à plus de 1,4 milliards de dollars, c'est le plus grand projet hydro-électrique jamais réalisé dans ce pays. Soutenu par la Banque asiatique de développement et la Banque mondiale, la centrale d'une capacité maximale de 1.700 mégawatts est détenue par le gouvernement laotien, Electricité de France (EDF), et la compagnie publique d'électricité de Thaïlande (EGAT). D'après les sources officielles, elle devrait fournir près de 95% de sa capacité à la Thaïlande voisine et satisfaire jusqu'à 20% de la demande laotienne, a confirmé la compagnie Nam Theun 2 (NT2) qui sera en charge de l'exploitation de l'installation mise en service en avril dernier.
2 milliards de dollars en 25 ans pour le Laos
"Ce barrage est une chance unique", avance Haruhiko Kuroda, président de la Banque asiatique de développement. Selon NT2, cette centrale située sur la rivière Nam Theun, un cours d'eau tributaire du Mékong, devrait rapporter au Laos 2 milliards de dollars en 25 ans. "Les fonds seront affectés à l'amélioration de l'enseignement primaire, des services de santé, du réseau électrique rural et à d'autres programmes nationaux de lutte contre la pauvreté", précise l'ADB. Haruhiko Kuroda assure que Nam Theun 2 permettra au Laos de réduire sa dépendance envers l'aide internationale. Le barrage devrait contribuerait aussi de 7 à 9% au budget national et engendrerait une croissance de 3% du produit intérieur brut, qui se chiffrait à 5,6 milliards de dollars en 2009.
Plus de 16.000 personnes affectées
Néanmoins, le projet ne fait pas que des émules. "C'est trop tôt pour appeler ce projet un succès", tempère Ikuko Matsumoto de l'organisation International Rivers. Près de 6.000 personnes ont dû être déplacées et 10.000 en aval pour la construction du barrage. Face aux critiques, l'ADB a précisé que la grande majorité des personnes touchées considéraient leur vie meilleure, sans occulter les dossiers à améliorer. "Bien sûr, il y a toujours des défis pour assurer durablement la subsistance des populations affectées, pour répondre aux impacts en aval et protéger les zones naturelles inondées, qui représentent l'une des dernières étendues sauvages sur la planète", explique le président de l'ADB, Haruhiko Kuroda. Au niveau des autorités françaises, le secrétaire d'Etat chargé du commerce extérieur, Pierre Lelouche, a jugé les préoccupations concernant l'environnement et les populations déplacées "exemplaires". "NT2 a défié les sceptiques qui affirmaient qu'un projet complexe ne pourrait pas être réalisé dans un pays pauvre", a quant à elle réagi Sri Mulyani Indrawati, directrice générale de la Banque Mondiale, qui a supervisé et suivi le développement. Du côté des écologistes, l'inquiétude reste toutefois présente. Huit nouvelles centrales sur le Mékong au Laos sont actuellement à l'étude. La Commission de la rivière du Mékong, une organisation intergouvernementale, a assuré que ces projets pouvaient avoir "de profondes conséquences socio-économiques et environnementales".