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Marrokiat, la web-série qui libère la parole féminine

Rahib, MarrokiatRahib, Marrokiat
@Marrokiat, ep.7 : Rahib
Écrit par Adrien Filoche
Publié le 9 mars 2018, mis à jour le 9 mars 2018

S’extirper de la chape de plomb qui pèse sur leurs épaules. Dans une web-série, des femmes marocaines brisent les tabous et les pressions sociétales. Homosexualité, harcèlement, interdits vestimentaires, aucun sujet n’est occulté. 

Douze vidéos rapides et incisives dans lesquelles douze femmes -une par épisode- filmées en pleine rue et à visage découvert, clouent au pilori les prétendues bienséances de la société marocaine.  "J'avais envie de poster des femmes dans la rue, dans cette rue hostile et sauvage qui ne leur appartient pas, pour que le temps d'une prise de parole, elles disent je suis là, j'existe, qu'elles s'approprient cet espace", explique Sonia Terrab, 33 ans, réalisatrice de la web-série Marokkiat ("Marocaines"). Le succès est phénoménal. En quelques mois, la série diffusée sur la page Facebook Jawjab a généré plus de 6 millions de vues.

 

Faire ‘’le portrait d'une société, d'une féminité à la marocaine

"Je mène la vie d’une personne bisexuelle. Juste le fait que je ne trouve pas ce terme dans le dialecte marocain prouve plusieurs choses…’’ souligne Rihab dans un épisode. Dans une autre vidéo, Nada s’insurge : "La fille doit suivre des normes et s'habiller selon le principe des hommes, pour qu'ils ne soient pas tentés : n'importe quoi ! "En tant que filles, on est des demi-êtres et ça, ça me dérange." Salima, 25 ans, chef d'équipe dans un groupe d'e-commerce, a décidé de dénoncer les agressions verbales provoquées par son tatouage, "perçu dans la rue comme un très gros acte de rébellion".  

"Quand elles s'expriment sans filtre sur internet, les filles ont des retours très violents, en général", souligne Fatim Bencherki, 33 ans, directrice du média casablancais Jawjab qui produit la web-série. Avec Marrokiat "on a eu une avalanche de retours, des messages de soutien, des messages d'amour, des témoignages : beaucoup de filles se sont spontanément présentées pour venir s'exprimer, libérer leur énergie, parler de leur vie tout simplement", se félicite la jeune patronne.

Une manière de casser les idées reçues avec les réseaux sociaux. "On l'a bien vu avec le phénomène #MeToo, à travers le monde, on parle de troisième révolution féministe", relève Sonia Terrab. Dresser ‘’le portrait d'une société, d'une féminité à la marocaine", voilà l’objectif de Marrokiat

 

Le Maroc se libère de ses chaînes ? 

‘’La parole est en train de se libérer au Maroc : chez les jeunes femmes, il y a un vrai désir d'émancipation, prendre la parole dans la rue et dans l'espace virtuel les dérange de moins en moins", assure la réalisatrice. Pourtant, plus d'un Marocain sur deux reconnaît avoir déjà harcelé sexuellement une femme dans l'espace public. Selon une enquête publiée par le HCP (Haut-Commissariat au plan), 40,6 % des femmes ont déclaré avoir été ‘’victimes au moins une fois d’un acte de violence’’ en milieu urbain. Récemment votée, la loi 103.3, un texte contre les violences faites aux femmes, a divisé le Royaume. Le chemin est encore long…

 

Marrokiat est disponible sur la page facebook Jawjab, en arabe, sous-titré en français
 

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