Après cinq années passées à la tête du Lycée Français Jean Giono à Turin, Daniel Raynal, nouveau proviseur au lycée René Goscinny, faisait hier sa première rentrée varsovienne. Qui est-il ? Quelle est sa vision du rôle de chef d'établissement ? Quelles sont les valeurs qu'il souhaite représenter ? Lepetitjournal.com/Varsovie est allé à sa rencontre.
Lepetitjournal.com/Varsovie : Pouvez-vous vous présenter ? Quel a été votre parcours ?
Daniel Raynal : J'ai 51 ans, je suis marié et ai 2 enfants qui sont étudiants en France. J'ai fait des études de droit à l'université de Toulouse. Après l'obtention d'une Maîtrise, j'ai d'abord passé le concours de CPE, puis très rapidement celui de chef d'établissement. J'ai à présent une expérience de 20 années à la direction d'établissements dans l'Académie de Toulouse principalement, puis en Italie, à Turin, où j'ai exercé pendant 5 ans, de 2009 jusqu'à cette année.
En effet, j'avais envie de donner une nouvelle orientation à ma carrière, et l'étranger m'attirait? J'y ai trouvé un terrain d'expression qui m'a permis un épanouissement professionnel, dans la mesure où l'autonomie dont on dispose dans des établissements français à l'étranger, et notamment dans ceux qui sont conventionnés comme le Lycée René Goscinny à Varsovie, est un système optimal qui favorise les projets et les initiatives.
Je suis aujourd'hui très heureux de mon affectation à Varsovie ; la ville faisait en effet partie de mon premier choix parmi d'autres options comme Copenhague ou Moscou. Je trouve que la proximité avec la France est appréciable ; cela me permet de voir mes enfants régulièrement.
Quelle est votre première impression de la ville ?
Je suis arrivé le 20 août, il y a donc très peu de temps. Mais ma première impression est très positive. Je fais connaissance avec la ville à une période où il fait beau, et je trouve les polonais plutôt accueillants et souriants. J'ai donc profité du soleil et des terrasses de café de la ville. Mais j'ai bien conscience que les mois d'hiver seront plus difficiles !
Avez-vous déjà des projets pour le lycée français de Varsovie ?
Je pense que ma première tâche est de me positionner en observateur et de faire un état des lieux. Il ne s'agit pas de dupliquer les projets que j'ai menés dans le passé, aussi réussis soient-ils, mais de comprendre, dans un premier temps, quelles sont les spécificités de l'établissement, comment il fonctionne, de rencontrer les partenaires, c'est-à-dire les parents d'élèves, les élèves et les enseignants, et de prendre connaissance de leurs ambitions, tout en gardant, bien entendu, mon regard critique de professionnel.
Cette rentrée a été préparée par mon prédécesseur, c'est en quelque sorte "sa rentrée", même si évidemment, j'ai déjà pris la mesure du lycée en m'imprégnant des dossiers et notamment celui de l'immobilier auquel je compte m'atteler rapidement. Le fait que j'aie déjà une expérience à l'étranger est aussi un élément facilitateur car je suis immédiatement opérationnel.
Qu'est-ce qui vous intéresse particulièrement dans votre mission de chef d'établissement et de chef d'établissement à l'étranger ?
Ce qui m'intéresse vraiment, c'est la mise en ?uvre de projets. Faire en sorte qu'en travaillant avec les partenaires, nous puissions définir ce qu'il y a à améliorer au sein de l'établissement, quels sont nos objectifs et quels sont donc les projets à mettre en place pour servir les intérêts des élèves. C'est avant tout un travail d'équipe, et je considère que le rôle premier d'un chef d'établissement est de fédérer toutes les énergies autour d'objectifs et de projets communs. Le projet de l'école n'est pas celui du proviseur, mais celui de la communauté. Sinon, ça ne marche pas !
Je trouve par ailleurs intéressante la manière de développer la citoyenneté européenne dans l'enseignement français à l'étranger. C'est une chose qui est mise en valeur à travers des événements comme l'exposition universelle 2015 à Milan. Des élèves représentant leurs camarades des lycées français d'Europe feront leurs propositions autour de la thématique choisie "Nourrir la planète, énergie pour la Vie". Je suis pour un établissement qui participe de la construction de l'individu, des jeunes, à travers le sport également. Il est important que les élèves puissent être partie prenante de leur Vie Scolaire au travers des instances de l'établissement.
Vous évoquiez le sujet de l'immobilier ; pouvez-vous nous en dire plus ?
Le Conseil d'administration travaille beaucoup sur ce sujet. L'équipe des parents d'élèves est extrêmement impliquée, et il y a des avancées très positives qui sont engagées. D'ici fin 2014, nous pourrons avoir une vision plus précise sur les aboutissements du projet.
Il faut savoir, par ailleurs, que pratiquement tous les établissements français à l'étranger font face à cette problématique de l'immobilier. J'en connais peu qui ne soient pas concernés, parce que ce sont des lycées qui se créent, bien souvent, de façon spontanée et empirique, qui croulent sous les demandes d'inscriptions, et dans lesquels les structures évoluent constamment. C'est un sujet plutôt complexe mais qui est bien pris en charge, ici à Varsovie. C'est la raison pour laquelle je suis plutôt optimiste.
Les écoles françaises à l'étranger ont un coût souvent exorbitant. Pensez-vous que la gratuité soit possible ?
On a présenté les établissements français à l'étranger comme une prolongation du service public de l'enseignement mais on s'aperçoit que ces établissements ne peuvent pas être financés à 100% par l'état français. En effet, on y accueille beaucoup d'élèves étrangers (qui répondent à l'objectif d'une diplomatie d'influence et un rayonnement de la langue française) et le budget de chaque établissement étant colossal, il paraît peu probable que l'état des finances actuel de la France permette d'assumer ce coût? La gratuité me semble donc totalement utopique. Cependant, il est regrettable que ces écoles soient, de fait, sélectives, mais il existe un système de bourse qui a été profondément réformé l'an dernier. Et l'établissement a un devoir d'information envers la communauté française sur l'existence de cette aide financière.
Plus personnellement, maintenant, si je vous demandais de citer certaines de vos qualités et défauts, que diriez-vous ?
Je pense que le suis quelqu'un de rigoureux, dynamique, enthousiaste. J'aime aussi faire la fête et m'amuser ! Concernant mes défauts? j'évoquerais un côté un peu perfectionniste et exigent. Disons que je suis pour l'excellence. Mais l'excellence est à distinguer de l'élitisme : c'est pour moi la capacité d'amener chaque élève au maximum de ce qu'il peut faire. Mais en aucun cas, cela ne consiste à écarter certains élèves ! Je suis très proche des élèves et je veux que chacun ait sa chance. C'est ce qui m'anime et j'aimerais que le lycée renvoie cette valeur.
Qu'aimez-vous lire ?
Je suis un amateur de polars. J'ai beaucoup aimé les "Millenium", par exemple.
Quelle musique aimez-vous écouter ?
J'aime la variété et les chansons françaises.
Pouvez-vous citer un film que vous avez aimé ?
J'évoquerai "Ida" un film polonais sur la vie d'une religieuse dans les années 60 qui a obtenu un beau succès d'estime en France. Cela m'a permis de prendre un premier contact avec la Pologne !
Pratiquez-vous un sport ?
Oui, le sport a toujours été important pour moi. J'ai joué au rugby longtemps, et je joue aussi au tennis. J'espère bien que nous allons pouvoir monter une équipe de rugby au lycée français de Varsovie et défendre ainsi les couleurs polonaises !
Propos recueillis par Laura Giarratana (Le Petit Journal/Varsovie) ? Jeudi 4 septembre 2014.