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19 AVRIL 1943 - Insurrection du ghetto de Varsovie

Écrit par Lepetitjournal.com Varsovie
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 19 avril 2013

 

Immortalisé par Pola?ski dans Le Pianiste, le ghetto de Varsovie était le plus important ghetto d'Europe, et le plus terrible de tous. A partir d'octobre 1940, près de 40% de la population de Varsovie y vécut, contrainte de tenter de survivre sur 8% du territoire de la ville. Au printemps 1943, le ghetto se révoltait contre les déportations, et pour sauver l'honneur des juifs de Pologne. C'était il y a 70 ans.

"Nous voulons simplement sauver la dignité humaine"

"Nous ne voulons pas sauver notre vie. Personne ne sortira vivant d'ici. Nous voulons simplement sauver la dignité humaine" déclarait Izrael "Arie" Wilner en avril 1943, peu avant l'insurrection du ghetto de Varsovie. Sans aucune chance de survie, mais voulant mourir les armes à la main, sous les ordres de Dawid Apfelbaum, Mordechaj Anielewicz, Marek Edelman ou Pawe? Frenkel, les 500 à 1000 combattants des organisations de résistance juives (Union Militaire Juive, ?ZW et Organisation Juive de Combat, ?OB) réussirent pendant près d'un mois à tenir tête à des SS pourtant supérieurs en nombre et en armement. 

L'insurrection débute le 19 avril 1943, jour de la Pâque juive, alors qu'il ne reste plus que 71 000 personnes dans un ghetto déserté par les allemands après les grandes déportations de l'été 1942. En effet, le 18 janvier 1943, les résistants juifs ont pris le contrôle du ghetto en repoussent les nazis suite à une opération de déportation. Le 19 avril, le commandement SS décide d'achever la liquidation du ghetto en 3 jours, mais l'offensive est contrainte à l'échec. Himmler nomme alors à la tête de la SS de Varsovie le général Jürgen Stroop qui décide de rapatrier des SS du front de l'est, et de mener une opération de destruction méthodique et totale du ghetto. 

Devant la violence de la répression, la résistance s'effondre, mais "devant les flammes, pas devant les allemands", comme le notera Marek Edelman en 2007. Le dirigeant le plus emblématique de la résistance du ghetto, Mordechaj Anielewicz, 23 ans, se résout au suicide le 8 mai, alors que 13 000 juifs ont été massacrés et que 56 000 seront déportés (chiffres du rapport Stroop). Le bilan côté allemand restera probablement inconnu, évalué à 16 par les nazis, à 86 selon la résistance.

Une lutte conjointe entre juifs et polonais

Dès le 19 avril 1943, les insurgés hissaient sur les toits de l'ancienne place Muranowski le drapeau de la ?ZW mais aussi le drapeau polonais, signe du soutien des résistants polonais aux juifs du ghetto. La présence de ces symboles de lutte et d'indépendance fut à l'origine des combats les plus violents de l'insurrection, Himmler ayant notamment ordonné à Stroop de "supprimer ces drapeaux à tout prix". Le soutien polonais était confirmé le 23 avril par l'Etat polonais clandestin, appelant à la lutte "pour votre liberté et pour la nôtre", reprenant la célèbre formule de Ko?ciuszko, alors que les soldats de l'Armia Krajowa (Armée de l'intérieur, AK) tentaient à plusieurs reprises de créer des brèches dans le mur du ghetto.

Le soutien de la résistance polonaise aux juifs opprimés n'était pas, en 1943, une nouveauté, même si elle reste sujette à caution pour certains. L'AK fournira ainsi relativement peu d'armes aux juifs insurgés, préférant les conserver en vue de l'insurrection qui se produira en Août 1944. La résistance polonaise est en revanche la seule en Europe à avoir instauré une commission d'aide aux juifs, la ?egota, chargée notamment de venir au secours des juifs échappés du ghetto à partir de 1942, alors même que l'aide aux juifs était elle-même punie de mort par les nazis sur le territoire du Gouvernement Général, fait lui aussi unique en Europe.

70 ans après, une journée de mémoire

Si d'autres révoltes ont émaillé l'écrasement des ghettos par les nazis en 1943, notamment à Bia?ystok et Cz?stochowa, l'insurrection du ghetto de Varsovie a marqué autant par le courage dont ont fait preuve les combattants juifs sous-équipés et épuisés, que par la violence déployée pour mettre fin à la révolte par les troupes SS. Le rapport réalisé par Jürgen Stroop peu après la liquidation du ghetto est à l'image de ce que fût l'écrasement du ghetto. Intitulé par le général nazi "Il n'y a plus de quartier juif à Varsovie !" (Celui-ci fut en effet entièrement rasé durant la liquidation du ghetto), l'un des trois exemplaires originaux de ce rapport a été dévoilé par l'Institut de la Mémoire Nationale le 17 avril dernier.

70 ans après le déclenchement de l'insurrection, Varsovie se souvient de son histoire juive. Deuxième foyer juif mondial après New-York en 1939, la ville comptait plus de juifs que la France tout entière. C'est pour leur rendre hommage que sera inauguré dans la journée le Musée de l'Histoire des Juifs de Pologne, à l'issue d'une journée de commémorations placée sous le patronage du président polonais Bronis?aw Komorowski. La cérémonie d'hommage prendra place à 10h au monument des héros du ghetto, en présence notamment du président du parlement européen Martin Schulz. Une marche sera ensuite organisée jusqu'au monument de l'Umschlagplatz, sur ul.Stawki.

Les cérémonies se poursuivront jusqu'au 16 mai, jour considéré comme le dernier de l'insurrection, au cours duquel la grande synagogue (aujourd'hui au niveau de la tour située sur Plac Bankowy) fut dynamitée. La plupart des évènements se tiendront au monument des héros du Ghetto, dans Muranów, ou sur la place Grzybowska. 

Programme complet : http://www.getto.waw.pl/accompanying_projects/str/1/lang/en

 Charles Hubert (www.lepetitjournal.com/varsovie) - vendredi 19 avril 2013

photos : LPJ

 

lepetitjournal.com varsovie
Publié le 18 avril 2013, mis à jour le 19 avril 2013
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