C'est un peu le sourire de la France à Turin : à l'Alliance française où elle est responsable pédagogique, Stéphanie Grindatto accueille, conseille et oriente les nombreux étudiants qui souhaitent approfondir leurs connaissances dans la langue de Molière. Aujourd'hui, pour nos lecteurs, elle dévoile un peu de son expérience turinoise.
Souriante, discrète, réservée, Stéphanie Grindatto est une observatrice attentive qui pose sur Turin un regard très personnel. Sans doute en raison de ses origines piémontaises, car dès son plus jeune âge cette Parisienne a régulièrement franchi les Alpes pour retrouver, non loin des montagnes qui lui sont chères, la famille de son père. Elle porte donc l'Italie en elle : "J'ai passé toutes mes vacances en Italie, le Piémont fait partie de mes racines. Ce qui ne m'empêche pas de me sentir fondamentalement française." C'est d'ailleurs pendant des vacances passées quelque part dans les Alpes italiennes qu'elle a rencontré celui qui allait devenir son mari et pour qui elle a choisi de venir vivre à Turin. "Au risque d'être affreusement banale, je dois avouer que, comme tant d'autres, c'est par amour que je suis arrivée à Turin." Une décision mûrement réfléchie et surtout une installation soigneusement préparée : "Avant de m'orienter vers les métiers de la communication, j'avais obtenu une licence de lettres. Je me suis réinscrite à l'université en maîtrise de FLE mais quand je suis arrivée à Turin je n'avais rien de concret en vue. C'est grâce à la directrice française d'une école de langues de la ville, qui m'a permis d'assister à des cours de français pour iIaliens, que j'ai pu valider ma maîtrise et m'engager dans la voie de l'enseignement." Une opportunité professionnelle qui l'a menée quelques années plus tard au poste de responsable pédagogique de l'Alliance française qu'elle occupe aujourd'hui et qui lui a permis bien avant de découvrir la ville autrement.
"Ce sont les Turinois qui m'ont fait connaître leur ville"
Certes, à son arrivée à Turin en octobre 2004, elle connaissait déjà la ville où elle avait des amis mais ses élèves lui ont permis de la découvrir sous un jour différent : "En enseignant, j'ai rencontré des Turinois. Ce sont eux qui m'ont fait connaître leur ville." Ils aidé la Parisienne qu'elle était à s'acclimater : "Les premiers temps ont été un peu difficiles, c'était la période préolympique. L'aspect culturel me manquait. Malgré tout, on sentait qu'on vivait un moment intéressant et qu'il allait se passer quelque chose." Au fil de la conversation, les réminiscences deviennent littéraires, de L'immense solitude de Frédéric Pajak, "un livre sur Nietzsche à Turin qui m'a accompagnée tout au début. J'y cueillais un petit côté nostalgique qui me semblait très vrai mais que je sens moins aujourd'hui", aux allusions à Natalia Ginzburg et à son Lessico famigliare (Les mots de la tribu), à Cesare Pavese, à Primo Levi?
Les avantages du "village" et ceux de la grande ville
Elle aime l'Italie, elle aime Turin, elle aime la langue italienne ("Ah, l'emploi des quatre temps du subjonctif", soupire-t-elle). Et les Turinois ? "Ils sont très sympathiques, mais très réservés. Ici, il est difficile de se faire des amis. C'est plus facile à Paris alors qu'on prétend souvent le contraire ! Il est vraiment difficile de pousser la porte." Comble du paradoxe, ce trait caractéristique coexiste avec une certaine forme de convivialité qui passe par "la facilité avec laquelle on vous adresse la parole : les gens qui vous parlent dans le bus, ou le fait que tout le monde donne son avis, c'est tout à fait normal. Et puis il y a aussi un côté "village" plutôt sympathique : quand on vous présente quelqu'un, vous pouvez être sûr qu'au bout de quelques minutes vous allez découvrir que vous avez des amis ou du moins des connaissances en commun. Rien de provincial dans tout cela, car Turin reste quand même une grande ville."
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Christine Correale (www.lepetitjournal.com/Turin) mercredi 25 septembre 2013